La classe ouvrière va au paradis ( La classe operaia va in paradiso) film italien de 1971. Palme d'or au Festival de Cannes 1972.
vu hier soir. Très interessant, il retrace l'itineraire d'un ouvrier qui, tel Busard dans
325. 000 francs de
Roger Vailland veut s'en sortir tout seul en travaillant plus pour gagner plus. Il est partisan de la prime à la rentabilité individuelle, du travail aux pièces, aux dépens de sa vie familiale et de sa personnalité.
D'autres voient les choses autrement et s'insurgent contre l'accélération des cadences et du critère de rendement que valorisent - à leur insu, les individualistes stakhanovistes.
Le film a le mérite d'être une comédie sur un sujet actuel, vu de manière premonitoire mais déjà sur le tapis.
on voit
l'alienation du travailleur : la petite coiffeuse comme l'ouvrier ou le technicien épousent la vision de l'entreprise comme un "challenge", un chemin vers le bonheur, vu comme l'accumulation de biens et d'argent. On aboutit à l'alienation psychologique, ie à ne plus penser par soi-même, voire à se transformer en machine à produire, et à se pervertir les raisonnements et le comportement.
Le film va loin, qui voit dans les écoliers l'éducation de "petits ouvriers", dociles etc.
La surveillance constante par la maîtrise, les chronometreurs et DRH, révèle les ravages de l'hyperrationalité : un psycho remplit des cases pour traiter les problèmes mentaux : on fiche, on étiquette, là encore une pratique en cours dès le plus jeune âge.
Sur ces sujets brûlants, la charge de Petri grossit le trait. Faire rire un esclave est lui restituer son aspect humain. Bien d'autres aspects du film pourraient être mis en relief, comme la séparation intellectuels/ouvriers dans l'optique du "que faire ?", ou le symbolisme sexuel, ou la metaphore vécue de l'enfermement.
Toujours est-il que, dirait Mordillat, on ne voit pas souvent un film traiter aussi concretement du travail à l'interieur de l'usine, et des servitudes qui lient le travailleur salarié à son environnement matériel et administratif.