kovess-Masfety, péter un câble ?

Vivianne kovess-Masfety : N'importe qui peut-il péter un câble ?, chez Odile Jacob.

j'ai abandonné les schizophrènes de Paul Claude Racamier, dans la petite bibliothèque payot : trop de références à des travaux antérieurs, et un vocabulaire de specialistes qui pense admises des notions de base.

Vivianne kovess-Masfety, en revanche, part d'exemples concrets de "pétage de câble" relevés sur le Net, et commentés par des internautes. On a ainsi différentes figures de crise, depuis la colère mal contrôlée, jusqu'au délire verbal, en passant par quelques "manies" : l'idée d'une persécution personnelle, la phobie des insectes etc.

A partir de ces exemples concrets, l'auteur définit les termes et les notions, note l'importance du milieu social et du facteur génétique, décrypte les méthodes d'étude.

Pourquoi ces "crises" nous fascinent-elles ? parce qu'elles nous arrivent, qu'elles nous font peur, et qu'elles sont mal admises dans une société où on étiquette facilement les "non-conformes".

D'ailleurs plus la société est rigide et sécuritaire, plus il est courant de voir les normes franchies, avec les retentissements, personnels et sociaux, qui en découlent.

Vivianne Kovess-Masfety est psychiatre, épidémiologiste. Elle dirige une unité de recherche de l'université Paris-Descartes, où elle enseigne, et est professeur à l'université McGill à Montréal.

N'importe qui peut-il péter un câble ? chez Odile Jacob.

L'auteur étudie les différentes vulnérabilités en faisant intervenir les contextes, les "genres"(hommes ou femmes, celles-ci plus exposées en général); les facteurs déclenchant (en particulier l'alcool et certaines drogues), mais aussi des remarques sur les cultures :

"les patients chinois se plaignent plutôt de symptômes qui se rapprochent de la neurasthénie décrite au XIXe siècle : plutôt que souffrir de tristesse, de culpabilité excessive et d'idées suicidaires, ils présentent des maux de tête, de l'insomnie, des vertiges ou des douleurs diverses, mais en réalité ils souffrent de dépression".

"Au Japon les relations interpersonnelles sont bien différentes [des occidentales]. Ainsi certaines personnes de culture japonaise vont présenter fréquemment une peur exagérée et invalidante d'incommoder les autres par leur odeur, leur apparence physique ou encore par leurs mouvements ou leurs expressions. Ce syndrome spécifique est lié à une peur quasi délirante d'être la cause d'une gêne ou même d'un léger inconfort chez une autre personne."

Des exemples littéraires viennent illustrer les considérations sur les traumatismes subis, ainsi un « long dimanche de fiançailles » pour les séquelles psychologiques de la guerre, et on trouverait facilement des exemples pour les traumatismes d'un deuil, ou d’un accident.

Les propos sont généraux, comment pourrait-il en être autrement dans un livre court (265 p.) ? les chapitres sont bien organisés, comme le chapitre V : "les troubles de la dépression et de l’anxiété" que je lirai bientôt.

- Sommes-nous tous égaux devant la folie ?

L’avantage de ce livre, bien organisé, est qu’on peut le parcourir en choisissant la rubrique qui intéresse.

Professions à risques de dépression selon une étude américaine :

1 les avocats, 2 conseillers d’éducation et enseignants s’occupant des handicapés, 3 les secrétaires.

Professions à risques de suicide ;

1 médecins, 2 infirmières, 3 vétérinaires.

Des développements nuancés parlent de policiers, des enseignants, et des cultivateurs, dont la situation est l’objet d’analyses complexes.

Il ne faut pas négliger l’importance de l’alcoolisme et de la toxicomanie, facteurs importants auxquels certaines professions paraissent plus prédisposées.

Les artistes et les grands sportifs sont guettés aussi par la psychose maniaco-dépressive, qui les fait passer alternativement de l’euphorie exubérante à la prostration, avec des délires etc.

Pour rapprocher le problème de notre quotidien, on ne parle pas de la psychologie des internautes et des administrateurs de forums (rire), mais des ennuis informatiques, un ordinateur récalcitrant sont signalés comme fréquents déclencheurs de crises de nerf.

Qui s’en serait douté ?

Les risques des profs.

20% des enseignants ont peur des violences physiques et 40% des violences verbales.

Violences physiques : Les femmes ont plus peur que les hommes dans les collèges (30% contre 20%)

Violences verbales dans les collèges : 63% des femmes et 50% des hommes les redoutent.

En fait selon les statistiques de l’Éducation nationale, ces violences seraient cantonnées à 200 établissements sur 700.000 environ.

Il est vrai que parfois les faits divers sont dramatiques et que les médias leur donnent un grand retentissement.

Pour que les profs tiennent le coup, il faut une un soutien des collègues dans la gestion des problèmes.

Source : péter un câble

Des remarques sur quelques troubles !

- les troubles alimentaires, anorexie, boulimie, (souvent liées).

les filles des classes sociales aisées ont plus souvent que les autres le désir d'être minces.

les troubles du comportement alimentaire (notamment l'anorexie mentale) sont extrèmement rares dans les pays asiatiques.

Chez nous, ils sont peu fréquents et sont stabilisés. par contre ils commencent à se généraliser dans d'autres pays, parallèlement à la tendance à faire des régimes pour être minces.

- Trouble panique et agoraphobie.

la crise d'angoisse est relativement fréquente, sans correspondre pour autant au trouble panique qui correspond à une maladie et vous conduit aux urgences, en piteux état.

Les personnes qui en ont souffert n'osent plus sortir de chez elles, et elles souffrent alors d'une agoraphobie associée.

trouble panique avec ou sans agoraphobie : en France, 1% des personnes sur une année,

agoraphobie sans trouble panique, c'est encore plus rare 0,5% sur une année.

Mais il y a une comorbidité élevée avec troubles dépressifs et usages de substances, voire dépendance.

Très intéressant, apparemment, ce livre. Je vais essayer de me le procurer.

Péter un câble ! ce n'est pas grave en soi, si c'est rare. Ce qui est inquiétant, c'est quand la personne récidive plusieurs fois. J'ai peur des gens colériques, ça me tétanise.

Mais il y a plusieurs indications pour cette expression, non ? Dans le livre, l'auteur explique-t-il ce qu'il entend réellement par là ? si cet état conduit à une dépression, voire, à une tentative de suicide, c'est différent.

Je suis allée "rôder" sur différents forums et j'ai parfois assisté à des empoignades qui m'ont fait frémir. Rien de tel heureusement sur GDS* !

L'expression "péter un câble" est une accroche d'éditeur, bien sûr, et l'auteur a soin de distinguer les colères courantes, ou les crises, des symptômes d'une maladie. Quand le comportement est affecté, là il risque d'y avoir une maladie, ou plutôt car on utilise des euphémismes pour contrer les idées reçues, souvent négatives, des troubles de la santé mentale.

Ces crises surviennent à la conjonction de plusieurs facteurs, et l'alcool joue souvent un rôle déclencheur, ainsi que le cannabis dont on remettrait en cause une innocuité trop vite déclarée.

Le livre fait le tour de plusieurs questions courantes, sans les approfondir, mais en apportant des notions qui servent à décrypter des comportements.

Personnellement je croirais qu'il y a de plus en plus de personnes atteintes de troubles mentaux. L'auteur est plus prudent, il examine différents facteurs qui contribuent à cette impression, sans l'établir.

Quand je vois les faits-divers de la semaine dans ma région, j'ai pourtant tendance à croire que la situation ne va pas en s'ameliorant. Les problèmes sociaux accroissent les vulnérabilités personnelles.

Quant aux forums sur internet, dont tu parles Ysandre, je crois que parfois ils regroupent des personnes mal à l'aise socialement, qui se livrent plus facilement à des excès sous couvert d'anonymat.
On trouve aussi des "pros", ie des provocateurs qui vont de forums en forums. Le nom de "trolls" me paraît bien choisi, car sans dramatisation excessive.

Schizophrénie.

peu de détails sur la maladie elle-même, sinon qu'actuellement, tandis qu'on sort facilement des hopitaux psy pour dépression ou troubles maniaco-dépressifs, les sorties de patients schizophrènes sont en diminution.

D'ailleurs la classification des troubles schizophréniques évolue constamment, en raison de "l'effet lithium", très bénéfique pour les formes schizoaffectives.

Trois facteurs prédisposent ou sont favorables à la schizophrénie :

- les facteurs sociaux défavorables. Cinq fois plus de schizophrènes dans les quartiers défavorisés, analyse à nuancer toutefois.

- l'isolement social dans l'environnement urbain est très néfaste, dès l'enfance.

- certaines populations caribbéennes supportent mal l'immigration, en raison, entre autres facteurs, de la vie dans des appartements suroccupés par plusieurs familles. Ainsi les enfants séparés de leurs mères (absentes pour le travail), et confiés à la garde de personnes peu matures...

quand tu cites les enfants très jeunes confiés par leur mère qui travaille, à des personnes peu matures.... je frémis ! il y en à tant maintenant ! heureusement qu'ils ne deviennent pas tous schizo !
Je connais une jeune femme de 40 ans, très belle, toute mince, intelligente, avec des défauts bien sûr, mais elle a élevé 5 enfants d'une façon extraordinaire. La petite dernière à 4 ans.
Elle commence à étouffer dans sa belle maison avec piscine, ses 5 petits, (l'ainée à 16 ans) elle veut travailler.
Ca me navre !

Ysandre a écrit:

quand tu cites les enfants très jeunes confiés par leur mère qui travaille, à des personnes peu matures....

je nuance.

Il était question de familles immigrées d'origine caribbéenne, et les enquêteurs essayaient d'isoler les facteurs de risques pour la schizophrénie. S'agissait-il de facteurs génétiques ou environnementaux ?

Les familles d'immigrés sont touchées par le phénomène, mais les conditions de vie semblent jouer un rôle déterminant, y compris pour la deuxième génération.

Comme tout fait humain, la propension à une maladie reste complexe, et les interactions culturelles, sociales s'ajoutent à des vulnérabilités personnelles. Si on ajoute que les mères travaillent dans des secteurs penibles qui supposent des horaires de nuit ou très matinaux (les femmes de ménage pour les bureaux), on imagine facilement les dégâts psychologiques sur la vie familiale.

oui, dans ce contexte, j'imagine aisément : la pauvre mère déracinée, qui travaille la nuit et ne voit ses enfants qu'en vitesse si elle veut dormir un peu, et puis ils sont à l'école, ou... ailleurs.
Comment veux tu qu'il y ait une éducation, de la tendresse ? ce doit être la bagarre permanente, le renoncement ...
Et l'enfant, lui, livré à la rue, à la violence ou à la solitude. ça me rend très triste de penser que des gosses qui n'ont même pas demandé à naître se retrouvent enfermés, en proie à leurs cauchemars.

Quel est ce monde étrange qui se reproduit vaille que vaille sans s'occuper du devenir de descendants !