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 MICHEL-ANGE

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Dindon
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Dindon


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MessageSujet: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyJeu 17 Fév 2011, 16:55

Article Le monde de ce jour.


"Carteggio / Correspondance", de Michel-Ange : Michel-Ange, le sublime et l'infime

LE MONDE DES LIVRES | 17.02.11



Courriers quotidiens et professionnels, lettres d'amour, réflexions sur l'art et le temps, le corps et la fragilité de l'être. De 1496 à 1564, soixante-huit ans de vie inscrits dans l'encre d'un demi-millier de lettres esquissent le portrait d'un homme qui a donné forme à un siècle.

Ecrire "n'est pas mon métier", se défend Michel-Ange. Il est pourtant le premier artiste dont on conserve une telle correspondance. Le processus de création y apparaît dans son économie et sa banalité, et l'auteur y élabore un discours sur le travail artistique et sur son oeuvre, contribuant ainsi à la construction de sa propre image et de sa réputation.

Traduit pour la première fois dans son intégralité en français et proposé dans une version bilingue, le Carteggio offre de l'artiste une biographie en clair-obscur, précédée d'une introduction qui en rappelle les principaux enjeux. L'oeuvre de Michel-Ange s'y mêle à l'histoire, celle de la Renaissance et celle de son quotidien, de son travail acharné et d'une existence au service des princes, passée à réclamer ses comptes et à solder ses dettes. "Et, avec ces grands maîtres, il faut y aller doucement ; on ne peut les forcer", écrit-il à son père, au seuil d'une carrière qui sera longue et harassante.

Le succès est rapide. Sa Correspondance s'emplit progressivement des contraintes de la commande et d'une urgence étouffante : "Je ne sais pas quel jour nous sommes, mais hier c'était la Saint-Luc", note-t-il... A mesure que la célébrité s'accroît, la crainte de l'échec et l'angoisse de ne pas satisfaire ses commanditaires deviennent son obsession. Le mythe enfle, et le créateur vieillissant sait qu'il doit se montrer à la hauteur.

Michel-Ange est une affaire familiale. Certes, se défend-il, "je ne cherche pas mon intérêt en semblables cas, mais l'intérêt et l'honneur de mes maîtres et de ma patrie". Pourtant, la majorité des lettres sont bien adressées à ses frères et à son père puis à son neveu, avec lesquels se règlent les questions matérielles, les achats de propriétés et la redistribution de cette fortune douloureusement accumulée.

"J'ai été trimer à travers toute l'Italie, supportant toute honte, endurant toute peine, rompant mon corps à toute épreuve, et j'ai exposé ma vie à mille dangers, seulement pour aider ma famille", écrit Michel-Ange. A son père, avec qui il entretient une relation intime et souvent conflictuelle, il dit : "Hurlez et dites de moi tout ce que vous voudrez, mais ne m'écrivez plus, car vous m'empêchez de travailler."

Au fil de la Correspondance, l'oeuvre se dévoile, souvent évoquée sur le ton de l'anecdote, ou au coeur des tourments de l'artiste. En 1508, il est à la recherche de beaux bleus, car il doit peindre "certains sujets". Il vient en effet de signer le contrat pour la chapelle Sixtine. Les quatre années qui suivent sont celles de l'incertitude de la fresque en train de se faire. Suspendu en haut d'un échafaudage de 20 mètres, "dans une grande angoisse, avec une très grande fatigue physique, je n'ai aucune sorte d'ami et je n'en veux pas ; et je n'ai pas assez de temps pour manger à ma faim". Puis finalement, au détour d'une lettre d'octobre 1512 : "J'ai terminé la chapelle que je peignais ; le pape en est fort satisfait."


Un travail collectif


L'artiste est encore un artisan, et les lettres sont empreintes de ces onces de laque, livres de cuivre, blocs de pierre, lapis-lazuli et onguents asservis à son talent. Le voilà sous les pluies diluviennes à la fin de l'été 1518, arrachant aux montagnes de Carrare les blocs de marbre dont il se nourrira : "J'ai entrepris de ressusciter les morts à vouloir amadouer ces montagnes et introduire l'art en ce pays." Qu'importe si des ouvriers se rompent le cou et si lui-même est à deux doigts de mourir, il faut l'imaginer se débattre avec fureur à la recherche des marbres les plus purs, pour contenter le goût des papes et des Médicis, exalter leur grandeur et la sienne.

L'art reste un travail collectif. Contrairement à l'image qu'il cherche à donner de lui-même, Michel-Ange est entouré d'assistants et d'apprentis, dont il ne cesse toutefois de dénoncer les inaptitudes : "ce vaurien de Rubecchio (qui) m'a presque abîmé une colonne que j'ai extraite" ou cet autre garçon, "questa merda secha"... Seul Urbino trouvera grâce à ses yeux, ce serviteur et disciple qui restera à ses côtés pendant plus de vingt-cinq ans, et dont la mort l'assomme : "Elle m'a causé une lourde perte et une douleur infinie. La grâce a consisté en ce que, alors qu'en vie il m'aidait à vivre, en mourant il m'a appris à mourir." Ainsi l'irascible et ironique Michel-Ange peut-il se montrer affectueux et amoureux, comme dans les rares lettres à Tommaso Cavalieri, celui qui lui inspira ses poèmes.


"On peint avec la tête"


L'âge avançant, le cercle de ses interlocuteurs s'élargit. Pour Vittoria Colonna ou Giorgio Vasari, il distille ses commentaires sur l'art et le labeur de l'artiste. Pour François Ier ou Cosme de Médicis, il aiguise son profil de génie. Car Michel-Ange affirme que "l'on peint avec la tête et non avec les mains, et qui ne peut disposer de tout son cerveau se déshonore", revendiquant pleinement le nouveau statut de l'artiste, lentement mûri, depuis plus d'un siècle, par cette "Renaissance" italienne. L'oeuvre qu'il crée ne peut donc se passer de discours, ceux de ses lettres, comme ceux des confidences qu'il dicte à son biographe Condivi. C'est lui l'Artiste du siècle, martèle Michel-Ange, et non pas Raphaël, dont il cherche à minimiser le talent, encore plus de vingt ans après sa mort : "Ce qu'il savait en matière d'art, il l'avait reçu de moi."

Ainsi, le corps de celui qui inventa le corps est tout entier présent dans cette Correspondance. Michel-Ange, qui sut insuffler aux nus une tension inédite, une puissance et un érotisme tenus à l'équilibre, gémit et se lamente. Ironie du sort, le voilà qui souffre de coliques néphrétiques, la "maladie de la pierre", "hurlant jour et nuit sans pouvoir dormir, et sans aucun répit". Ses lettres s'emplissent de l'inquiétude de l'âge, et il endure "tous les maux qu'ont d'ordinaire les vieux ". "Le pire est que je suis plein d'angoisses ", "aveugle, sourd et mal habile de mes mains et de ma personne". Et de conclure, quelques années avant de mourir : "J'en suis arrivé à ma vingt-quatrième heure et il ne naît en moi nulle pensée où ne soit sculptée la mort."

Cette Correspondance donne ainsi à lire ce que le processus artistique a de plus humain dans les gestes quotidiens et les fatigues de l'être. Elle raconte le travail, la matière et le corps, l'objet qui n'est pas encore sacré, l'artiste qui n'est pas encore génie. Et celui qui écrit, ici, est simplement "Michel-Ange Buonarroti, non pas peintre, sculpteur ni architecte, mais ce que vous voulez que je sois".

CARTEGGIO / CORRESPONDANCE de Michel-Ange. Présentation, traduction et notes d'Adelin Charles Fiorato, Les Belles Lettres, "Bibliothèque italienne", 2 volumes, 1 100 p., 75 €.
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptySam 07 Mai 2011, 07:15

Coucou à tous,

Me voilà de retour après un petit séjour à Florence et Bologne........ Je suis tombée amoureuse du David de Michel Ange

MICHEL-ANGE Gimg_1179537

Il est magnifique. Un vrai chef d'oeuvre !!! I love you

Par contre, j'ai été déçue par la Naissance de Vénus....Elle est bien mieux en reproduction.....

Je mettrai des photos quand j'arriverai à les mettre sur mon ordi.... Laughing
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptySam 07 Mai 2011, 09:21

cleo a écrit:
Me voilà de retour après un petit séjour à Florence et Bologne........ Je suis tombée amoureuse du David [...] I love you

Prince d'Aquitaine a écrit:
Ca y est, cleo a craqué pour un homme tout nu toc

MICHEL-ANGE Dave10

Il a l'air assez désinvolte...
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MessageSujet: michel ange   MICHEL-ANGE EmptySam 07 Mai 2011, 10:04

Laughing Détrompez-vous ! Ce qui m'a charmée, c'est le réalisme de sa main ! L'artiste a réussi à dessiner le réseau des veines... drunken c'est magique !


Et à Bologne, j'ai pu admirer la première université européenne..... Smile
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyVen 13 Mai 2011, 16:13


MICHEL-ANGE Tentat10


Adam et Eve après la tentation Wink
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MessageSujet: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyVen 13 Mai 2011, 20:23

Eh bé oui ! ça leur pendait au bout du nez comme un sifflet de deux ronds ! et tout ça pour une pomme ! UNE POMME ! evil
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyLun 16 Mai 2011, 20:17

MICHEL-ANGE Portab14

La main !!!!!!!!!!!!!!! Elle est magnifique, les veines I love you I love you I love you
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 06:05

Les mains sont souvent ce qu'il y a de plus dur à représenter... C'est à elles que l'on peut, entre autres, reconnaître un maître en son art...
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MessageSujet: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 06:14

et pourtant, il était plus difficile, à l'époque, de représenter des mains, les muscles. J'ai lu que ces peintres étudiaient l'anatomie avant de se lancer. C'est une belle leçon ! être consciencieux à ce point !!! Nos modernes ont à en prendre de la graine, hum !
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MessageSujet: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 06:16

J'ai lu beaucoup de biographies de peintres. Le Caravage quant à lui, observait les personnages des bas-fonds, les morts dans une rixe, etc...
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 06:32

En effet, bien qu'il existe des écoles et que l'on peut regrouper les artistes ainsi, ils ont cependant un peu tous leur propre trait... formation parfois commune certes mais sensibilité, vécu et environnement visuel fort différent.
Comme Titien le Vénitien, qui peint plus qu'il ne dessine d'où des limites parfois floues qui en fait transposent la brume vénitienne qui gomme les détails et donne plus de force à un ensemble.
Quoiqu'il en soit Michel-Ange tout comme Vinci sont considérés comme les deux plus grands maîtres en leurs domaines, toutes époques confondues, tels Mozart et Beethoven en musique, et, étrangement, comme ces derniers, furent contemporains...
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MessageSujet: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 06:40

COUCOU MERWYN oui, une époque où la recherche de la vérité était essentielle pour certains. Une grande soif de savoir !
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Dindon
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyMar 17 Mai 2011, 15:56

Il ne fallait pas rater l'expo sur les trésors des Médicis, en début d'année.
Les Médicis ont beaucoup oeuvré pour Michel Ange et il y avait là une sculpture très émouvante.
Toujours cette idée de l'esprit qui veut s'échapper de la matière. Ce souhait de "désincarcération de l'âme".

Un artiste planant réellement au dessus des autres.

Une puissance qui n'a même pas l'air humaine...

En revanche, sur le livre publié cité par Le monde, il paraît que ça n'est pas si intéressant que ça. C'est plutôt quotidien.

Finalement, je ne l'ai pas acheté, vu le prix.
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Amadak
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MessageSujet: Arts - michelange, l'artiste et l'homme   MICHEL-ANGE EmptyMer 01 Aoû 2012, 02:25



Nous avons lu cette intéressante histoire sur GDS
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Amadak
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MessageSujet: Arts - michelange, l'artiste et l'homme   MICHEL-ANGE EmptyMer 01 Aoû 2012, 12:55

ravie de voir la réussite de ma vidéo!!!!
merci
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soussou
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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyVen 29 Mar 2013, 19:37

Michel-Ange et Victoria Colonna

MICHEL-ANGE Dyn004original166269jpe


Jean AICARD, (1848-1921), poète, romancier et auteur dramatique français (élu à l'Académie française en 1909)









Michel-Ange, architecte, peintre, sculpteur, fut aussi un poète. (Je ne connais, de ses poésies, aucune traduction en vers français.)

Son père, podestat de Chiusi et de Caprese, sans fortune, l’avait mis en nourrice chez un tailleur de pierre.

Le frère de lait des tailleurs de pierre, l’architecte de Saint-Pierre de Rome, le peintre du Jugement dernier, le sculpteur du tombeau des Médicis, portait dans sa tête un génie étrange.

Comment pensait cette tête qui conçut le Jour et la Nuit, et le Moïse ? Comment aimait ce coeur puissant, gonflé de troubles ? Rien ne le dit mieux que les sonnets.

On y voit sa pensée, contournée, tordue, douloureuse et vivante comme cette figure de la Nuit, assise sur la tombe des Médicis, et adossée au Jour que, sans doute, elle appelle amoureusement, et inutilement.

Et qui aima-t-il, ce Michel-Ange, avec sa grande âme ?

Un humble d’abord, son domestique Urbino ; puis un apôtre, un réformateur, Savonarole ; enfin une femme en deuil, Vittoria Colonna, marquise de Pescara.

À Urbino, devenu vieux, il disait un jour :

– Que deviendras-tu, mon brave Urbino, après ma mort ?

– Il faudra bien que j’essaie, tout vieux comme je suis, de servir un autre maître !

– Sois préservé de cette misère, mon pauvre ami ! répondit Michel-Ange.

Et il lui donna une petite fortune.

La mort de son ami Savonarole bouleversa l’âme de ce Michel-Ange. qui pourtant savait par coeur l’Enfer du Dante.

Quand le moine, passionné pour Dieu, eut été torturé sept fois et brûlé vif, Michel-Ange quitta Florence.

Pour la marquise, il avait un demi-siècle d’âge quand il se mit à l’aimer d’un amour vain et tourmenté.

Et, en son honneur, il devint poète.

Celui qui, se voyant refuser un jour la porte de Jules II, criait : « Eh bien ! quand le pape demandera Michel-Ange, vous lui direz que Michel-Ange est absent ! », ce géant de fierté se tint courbé longtemps aux pieds de la Femme, – d’une femme vouée au deuil.

Peut-être, en elle, est-ce une image de la Mort qu’aima le transcendant génie ; peut-être le spectre de la Fidélité par delà la vie ; peut-être la même pensée dont il avait fait déjà cette immortelle Nuit de pierre, qui dort, qui rêve l’infini, et qui vit pourtant parmi les vivants.

Il se sentait terrassé par le temps, quand elle lui apparut, comme Béatrice à Dante. Il l’adora de se laisser aimer sans espoir. Un tel amour, une telle douleur, lui sembla un bienfait suprême. À coup sûr il l’aima pour les pensées hautes et sombres, pareilles à son génie même, qui lui venaient d’elle, dont elle marchait entourée, cette marquise voilée, à l’attitude hautaine, à l’âme grande, cette visiteuse du tombeau de l’amour unique.

À soixante-seize ans, il lui demandait la permission de peindre son portrait ou de sculpter sa statue.

En même temps, François Ier écrivait à Michel-Ange pour solliciter du grand statuaire quelque oeuvre d’art, dont il voulait honorer une de ses chapelles de France.

Et celui que sollicitait François Ier continuait à supplier timidement la marquise de se laisser rendre immortelle dans un marbre taillé par lui... Elle refusa.

En des heures de révolte il soupirait :

– Oh ! après tant de souffrances, que je reçoive enfin le prix si désiré de mon amour !

Et encore :

– Oh ! donner son amour, son dévouement, sa fidélité, son culte, pour des mépris, de la douleur, et une mort continuelle !

Vittoria Colonna était une des plus illustres dames de l’Italie, de l’Europe, du monde.

Elle aimait les pauvres, et le Christ. Elle aima aussi le génie de Michel-Ange. Peut-être crut-elle servir ce génie, en n’aimant que lui et non pas l’homme ; il en souffrit avec ravissement, avec orgueil, avec reconnaissance.

Quand elle fut morte, il lui baisa la main.

Et après cela, selon le témoignage de Condivi, il demeura comme privé de raison.

Bénie soit cette Muse noire, grâce à qui nous avons de Michel-Ange quelques pensées écrites, ses propres paroles sur l’amour ! Bénie soit l’étrange épouse de son âme, grâce à qui les poètes peuvent se dire :

– Et lui aussi, ce « Michel, più chè mortal, angel divino », lui aussi il fut un poète !



Jean AICARD.











MADRIGAUX ET SONNETS DE MICHEL-ANGE
À VITTORIA COLONNA

Citation :



I

Comme l’ébauchoir, que ma main conduit,
Fait de la pierre, masse dure,
Jaillir vivante une figure
Qui s’accroît d’autant plus que le bloc se réduit,
Tel, si j’ai dans moi-même une oeuvre juste et bonne,
Mon âme, qui devant son avenir frissonne,
D’une vile enveloppe étroite l’emprisonne.
Mais tu peux, ô toi, le sais-tu ?
Ébauchant le bloc et brisant l’écorce,
Dégager en moi la vertu,
La raison et la force.




II


Hélas ! oh ! malheureux, malheureux que je suis !
Lorsque je songe aux ans l’un après l’autre enfuis,
Je ne vois pas un jour dont je puisse me dire
Qu’il m’ait appartenu.
Fallacieux espoirs, vanités qu’on désire,
J’en suis bien revenu !
On gémit, on aime, on brûle, on soupire :
Tout cela m’est connu !
Car je n’ignore aucun des amours de ce monde...
Ils m’ont assez longtemps loin du vrai retenu !
D’heure en heure à présent la nuit s’en vient profonde ;
Je m’en vais lentement... Le soleil a baissé...
Et je tombe, infirme et lassé.




III

Sans savoir où je vais, je vais, ah ! malheureux !
J’ai peur du noir voyage ; et, voici, d’heure en heure,
Approche le moment qui fermera mes yeux.
L’âge a bien transformé ma vie extérieure,
Et la mort maintenant, mon âme, toutes deux,
Se livrent des combats qui me sont rude épreuve !
Et si je ne suis pas trompé par mes terreurs,
(Veuille l’amour de moi, ciel, qu’à tort je m’émeuve !)
Je vois mon châtiment tout prêt dans mes erreurs,
Dans le vrai mal compris, mal pratiqué, mon Père !
Et je ne sais plus ce que je m’espère !




IV


Lorsque de près, dame que j’aime,
Tu tournes vers moi tes yeux,
Je peux me voir moi-même en eux,
Comme alors dans les miens tu peux te voir toi-même.

Dans tes yeux je me vois, hélas ! tel que je suis
Vaincu par la douleur, chargé d’âge et d’ennuis ;
Et toi, comme une étoile au fond des miens, tu luis.

Et le ciel, contraire à ma joie,
Alors sans doute est irrité
Qu’en des yeux si beaux, – si laid je me voie,
Et que mes yeux si laids reflètent ta beauté !

Et non moins que le ciel est injuste et cruelle
La destinée, hélas ! qui fait que toi, si belle,
Tu descends par mes yeux jusqu’en mon coeur charmé,
Lorsque moi je suis, n’étant pas aimé,
Bien hors de toi, sitôt que ton oeil s’est fermé !
Si tu me tiens ainsi loin de toi-même,
C’est que plus ton charme est grand et divin,
Plus mon humble mérite à côté paraît vain ;
C’est qu’il faut, par l’âge et la beauté même,
Être presque égaux, pour qu’on s’aime !




V


Mes yeux, soyez certains que le temps suit son cours,
Et l’heure approche où, pour toujours,
Se ferme le chemin des regards et des larmes !
Qu’une douce pitié de vous vous tienne ouverts
Tant que ce monde aura ma dame aux divins charmes ;
Mais si le ciel la veut reprendre, si je perds
Cette grâce unique, suprême ;
Si mon astre – celle que j’aime –
Là-haut, parmi les choeurs joyeux,
Près des âmes ses soeurs remonte dans les cieux,
Oh ! alors, vous pourrez vous fermer, oui, mes yeux !




VI


Comment donc, – et l’exemple en est là, sous nos yeux ! –
Se peut-il qu’un effet soit plus fort que la cause ?
Qu’une image de pierre, et vivante en sa pose,
Au sculpteur bientôt mort survive, et dure mieux ?

L’art, qui rend la nature, en est victorieux ;
Et si quelqu’un le sait, c’est bien moi, je suppose,
Dont la noble sculpture est l’amie et la chose ;
Moi que trahit le temps puisque je tue fais vieux.

Peut-être que je peux allonger notre vie,
Et mettre dans le marbre, – ou, selon mon envie,
Sur la toile, – nos traits, nos amours à jamais,

Pour qu’après nous, mille ans après, on se rappelle
Et comme je t’aimais et comme tu fus belle,
Et que je n’étais pas un fou, quand je t’aimais !




VII


L’artiste vrai jamais ne conçoit un dessein
Que le seul marbre en lui n’enferme et ne comporte ;
Mais jusqu’au plan caché seule atteint la main forte
Qui sait être soumise à l’esprit ferme et sain.

Ainsi se cache en toi, charmante, être divin,
Le mal que je veux fuir et le bien qui m’importe ;
Et pour ma peine et pour ma fin, tout va de sorte
Qu’à servir mes souhaits mon art s’épuise en vain.

L’amour ! Ce n’est donc pas l’amour, ce n’est pas même
Ta beauté, ni ta haine ou ton dédain suprême,
Qui me font ma douleur... c’est mon destin, mon sort,

Si la mort dans ton coeur, la pitié sont ensemble,
Et si ma faible main, qui désire et qui tremble,
Ne sait tirer de toi rien autre que la mort !




VIII


Afin que ta beauté se conserve ici-bas
Dans une femme autant aimée et moins cruelle,
A la nature un jour, mourante, tu rendras
Tes charmes qui s’en vont, tout ce qui te fit belle.

Qu’elle les garde ; et puis qu’elle les renouvelle,
En formant une autre âme avec la tienne, – hélas !
Que l’amour soigne alors cette âme, et mette en elle
La pitié... tous les dons d’aimer que tu n’as pas.

Que la nature prenne encor toutes mes larmes,
Et qu’elle joigne enfin mes soupirs à mes pleurs,
Et les donne à qui doit – demain – chérir tes charmes.

Lors, celui-là peut-être, heureux par mes douleurs,
Obtiendra la faveur de l’autre plus humaine,
Et tu seras touchée avec ma propre peine !




IX


Rendez, fleuve ! oh ! rendez, source ! à mes yeux taris,
Cette force qui fait, – ô fleuve, ô source vive ! –
Que tout à coup gonflés et submergeant la rive
Vos flots inattendus couvrent les champs surpris.

À mes yeux tristes, toi par qui le jour arrive,
Air, – où j’ai tant jeté de soupirs et de cris,
Je n’en ai plus ! rends-les à mon âme plaintive !
Donne un éclat plus pur à tes feux amoindris...

Mes pas avaient laissé sur l’herbe des empreintes
Qu’effaça le printemps, sous un nouveau gazon
Rends-les-moi, Terre ! Écho, rends-moi, rends-moi mes plaintes !

Vous, ses yeux, rendez-moi mon coeur et ma raison,
Pour que, – si l’on s’obstine à désoler mon âme, –
Je puisse une autre fois aimer une autre femme !




X


Comme tes blonds cheveux, où la fleur s’enguirlande,
Semblent se réjouir, couronne d’or vivant !
Fiers cheveux ! Ce qui fait leur fierté la plus grande,
C’est de baiser ton front les premiers, et souvent !

Ton corsage est heureux d’avoir ton sein mouvant,
Le jour, aussi longtemps qu’il faut qu’il le défende ;
Et quand il s’ouvre, heureux cheveux, sur le cou blanc,
Libres que leur flot d’or, caressant, s’y répande !

Mais heureuse surtout, légère, s’enroulant
En replis gracieux, la bandelette fine
Qui touche, enlace, baise et soutient ta poitrine !

Et la chaste ceinture autour de ton beau flanc.
Murmure : « À tout jamais je la veux, je la presse...
À quoi bon d’autres bras pour une autre caresse ? »




XI


Le plaisir le plus vif d’un goût sévère et sain,
C’est l’oeuvre du plus grand des arts, qui, dans la pierre,
Dans la cire ou l’argile imite un corps humain,
Traits et gestes, vivant par son allure entière.

Si le temps fait outrage au chef-d’oeuvre divin,
S’il le brise ou le tord, ou n’en fait que poussière,
L’esprit, qui n’en fut pas frappé jadis en vain,
L’évoque et le revoit dans sa beauté première.

De même, purs reflets des ornements du ciel,
Accordés à nos yeux par l’Artiste éternel,
Ton charme sans égal, ta grâce et ton visage,

Peu à peu s’en allant avec le temps et l’âge,
Me laisseront au coeur, souvenir jeune et cher,
Une beauté que rien n’entame, aucun hiver.




XII


Après que l’art divin a, dans sa forme entière,
Dans ses gestes, compris un être en l’observant,
Il modèle, – et déjà le projet est vivant, –
La simple ébauche avec la plus humble matière.

La seconde naissance à suivi la première,
Et l’ébauchoir a fait ce qu’il promit avant :
Le bloc dur a pris souffle, et, soudain s’élevant,
La statue a conquis la gloire et la lumière !

... L’ébauche d’une âme, oui, j’étais cela d’abord !
C’est vous qui m’avez fait et meilleur et plus fort ;
L’amour par vous me rend plus noble, haute dame...

Quelle peine attendrait mon vain aveuglement,
Si je pouvais, ingrat, dédaigner un moment
Votre pitié qui crée et qui grandit mon âme.




XIII


Dans un fragile esquif, par d’orageuses mers,
Déjà, car ainsi va le cours de notre vie,
J’arrive au port commun, où justes et pervers
Doivent un compte exact de l’oeuvre triste ou pie.

Tout est vain, tout est faux de ce que l’homme envie !
Ah ! je le vois, l’erreur m’avait chargé de fers,
Quand j’avais fait de l’art ma seule fantaisie,
Mon tyran, mon idole, et mes soins les plus chers !

Amours vains et joyeux que mon coeur se reproche,
Qu’est cela, – maintenant que la mort double est proche ?
L’une est certaine ici ; l’autre m’attend là-bas !

Peindre ou sculpter n’est rien, mon coeur ! Il ne nous reste
Qu’à demeurer tournés vers cet Amour céleste
Qui, pour nous recevoir, ouvre en croix ses deux bras !




XIV


Vivant dans le péché, je vis mort pour moi-même.
Ma vie est-elle à moi ? non, mais au péché noir
Dans les chemins duquel, perdu, je vais sans voir.
Aveugle, je n’ai plus ma raison, bien suprême.

Ma liberté, par qui j’étais noble, et que j’aime,
Est mon esclave... Hélas ! voici le désespoir !...
Si ta pitié, Seigneur, ne doit plus s’émouvoir,
Pour quels maux suis-je né, Dieu ! pour quel anathème ?

Lorsque vers le passé je veux faire un retour,
Je vois l’erreur emplir tous mes ans, chaque jour,
Et n’en peux accuser que mon audace insigne !

C’est que, lâchant le frein à mon âme maligne,
J’ai fui le beau sentier qui mène à ton amour !...
Maintenant, tends la main vers moi... qui suis indigne !





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MessageSujet: Re: MICHEL-ANGE   MICHEL-ANGE EmptyVen 29 Mar 2013, 20:49

magnifique poème que je ne savais pas ! merci Soussou merci
Dans ses trois vers, il est tout entiier rassemblé :
Citation :
Quand j’avais fait de l’art ma seule fantaisie,
Mon tyran, mon idole, et mes soins les plus chers !
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