Thomas de Quincey

De L'Assassinat Considéré Comme Un Des Beaux-Arts


3 textes écrits à des époques différentes et ayant pour dessein de considérer le crime par son côté esthétique. En commençant par affirmer qu'il y en a un...

L'auteur se présente comme faisant partie d'un "club" de connaisseurs, jaugeant chaque forfait pour sa noblesse, sa perfection et ses couleurs... En gros, il faut imaginer une scène sanglante comme un tableau et en apprécier sa facture, selon des critères très objectivement définis. (Le crime bâclé ou inachevé ne suscitant que le mépris des amateurs...)

Après un rappel érudit et historique des crimes célèbres, on en vient aux faits divers contemporains, avec l'étude du cas John Williams, qui tuait pour la beauté du geste, notamment des familles entières.

Si les descriptions sont monstrueuses d'un point de vue moral, De Quincey sait nous faire partager son terrible point de vue avec feu et exaltation et le lecteur vit avec le criminel les "sensations fortes" éprouvées pendant les actes. Le style nous emporte tellement qu'on se prête au jeu et on finit par avoir honte d'avoir lu certains passages avec voracité (les auteurs de thrillers actuels devraient relire ce classique).

Un ouvrage totalement atypique, admirablement écrit, et qui contient sa grandeur, malgré le thème surréaliste.

Il était cité à l'expo "Crime et châtiment".



A lire absolument.

Merci, Crevette, c'est très intéressant

Je crois que j'ai quelque part une traduction - adaptation des Confessions of an English opium eater par Musset.

Ahhhh, je voulais le lire pour mon mémoire, le mangeur d'opium, et puis j'ai oublié
Je l'avais vu sur Priceminister en collection L'Imaginaire

les confessions d'un opiomane ont été traduites d'abord par Mussset, puis par Baudelaire.

C'est très intéressant, notamment par les visions de l'opiomane, qui sont à la fois merveilleuses et terrifiantes. De Quincey raconte l'origine de son addiction (douleurs crâniennes), et ses amours dans la débine.


Et Thomas de Quincey buvant
L’opium poison doux et chaste
À sa pauvre Anne allait rêvant...

Apollinaire.

Mais à part la traduction, il me semble que Baudelaire a été très influencé aussi pour son oeuvre ?


La vie de De Quincey vaut son pesant d'or. Le pauvre homme avait une ribambelle de bambins, qu'il avait du mal à nourrir. Toujours fauché, il écrivait sans cesse pour gagner 4 sous. C'est pourquoi le livre sur l'assassinat a été écrit avec des intervalles de 7/10 ans entre chaque texte.

Il y a pourtant une belle cohérence de fond.

Il a eu le temps de peaufiner son angle de vue.

Œuvres, par Thomas De Quincey, sous la direction de Pascal Aquien, Gallimard, la Pléiade


L'opium a mauvaise réputation: il serait religieux pour endormir les masses, il détournerait du travail en répandant la torpeur. De Quincey, avec une précision médicale, apporte ici un témoignage essentiel et très dérangeant.

Contrairement à l'alcool, qui dépouille un homme de sa maîtrise de soi, «il communique sérénité et équilibre à toutes les facultés, actives ou passives». Telle est la révélation: «Le mangeur d'opium ressent que la partie divine de sa nature est souveraine: ses sentiments moraux connaissent une sérénité sans nuages, et, au-dessus de tout, brille avec majesté la grande lumière de l'intelligence.»

L'opium n'abrutit pas, au contraire, il est « éloquent». Si c'est une religion, il s'agit d'une Eglise dont le sujet concerné est le seul membre, et elle est fondée sur «un abîme de divine volupté». «O juste, puissant et subtil opium !» Il bouleverse toutes les coordonnées habituelles, destitue tous les pouvoirs, se balade dans toutes les dimensions, vous offre le paradis mais aussi l'enfer. Si vous en sortez vivant, comme De Quincey, on pourra dire que vous savez vraiment ce qu'est la santé et l'intelligence. Rien à voir avec la vertu ni avec la morale, l'opium ouvre sur une vérité qui est à la fois délice et horreur.

Sollers présente Thomas De Quincey

Certes, mais les cauchemars que rapporte De Quincey ne sont pas enviables, à moins que vous aimiez les crocodiles.