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| | Le Comte de Lautréamont | |
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+8ignatius Prince d'Aquitaine fulcanelli L'émane Ghaast Lîlâ rotko Firenze 12 participants | |
Auteur | Message |
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Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Le Comte de Lautréamont Mar 10 Fév 2009, 20:23 | |
| Isidor Ducasse, plus connu sous son pseudonyme du Comte de Lautréamont (certainement une déformation du roman Latréamont d'Eugène Sue), est un poète franco-uruguayen dont l'œuvre est essentiellement constituée des Chants de Maldoror, épopée en prose composée de six chants, publiée en 1869. Les éditeurs prennent d'ailleurs souvent soin d'y joindre les courtes Poésies I et II (publiées pour leur part en avril et juin 1870), rassemblant ainsi l'intégralité des écrits de Ducasse, qui ne vécut que 24 ans. A l'instar de ses thèmes d'écriture, la raison de sa mort reste assez ténébreuse. Hors mis les établissements français où il étudia après être parti de Montevideo vers 1859, parmi lesquels le lycée impérial de Tarbes et quelques autres privés pour lui permettre de recevoir le baccalauréat, on sait peu de chose de sa (courte) vie. Penchons-nous donc un peu plus sur ces fameux Chants de Maldoror, qui, à l'image des Fleurs du Mal (et dont Isidor fut beaucoup influencé, évidemment), ont souvent fait l'objet d'idolâtrie de la part des jeunesses en manque de sensation et de ténèbres gores et cie. L'épopée, au cours de laquelle un seul personnage s'exprime (vous l'aurez deviné, Maldoror), peut en réalité être considérée presque comme un assemblage de poèmes, quoiqu'il faille bien remarquer une certaine cohérence à l'intérieur de chaque chant, sinon une certaine progression, du point de vue de la narration, au fil de ces derniers. Les strophes, en général conséquentes, sont elles-mêmes assez indépendantes les unes des autres. Sans entrer plus dans les détails, évoquons juste l'influence considérable qu'eut Lautréamont, dont le succès fut bien sûr posthume, sur le surréalisme, jusqu'à être parfois déclaré précurseur du mouvement.
Dernière édition par Firenze le Mar 10 Fév 2009, 20:25, édité 1 fois | |
| | | Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mar 10 Fév 2009, 20:24 | |
| Quelques extraits pour conclure cette introduction à cette œuvre aux interprétations diverses et très variées, à commencer par un éloge au sujet assez déroutant (comme souvent chez Maldoror, avec notamment le très célèbre éloge du pou et de la saleté), ou qui du moins ravira les scientifiques du forum : Ô mathématiques sévères... (Chant II, strophe 10) - Spoiler:
O mathématiques sévères, je ne vous ai pas oubliées, depuis que vos savantes leçons, plus douces que le miel, filtrèrent dans mon coeur, comme une onde rafraîchissante. J'aspirais instinctivement, dès le berceau, à boire à votre source, plus ancienne que le soleil, et je continue encore de fouler le parvis sacré de votre temple solennel, moi, le plus fidèle de vos initiés. Il y avait du vague dans mon esprit, un je ne sais quoi épais comme de la fumée; mais, je sus franchir religieusement les degrés qui mènent à votre autel, et vous avez chassé ce voile obscur, comme le vent chasse le damier. Vous avez mis, à la place, une froideur excessive, une prudence consommée et une logique implacable. A l'aide de votre lait fortifiant, mon intelligence s'est rapidement développée, et a pris des proportions immenses, au milieu de cette clarté ravissante dont vous faites présent, avec prodigalité, à ceux qui vous aiment d'un sincère amour. Arithmétique! algèbre! géométrie! trinité grandiose! triangle lumineux! Celui qui ne vous a pas connues est un insensé! Il mériterait l'épreuve des plus grands supplices; car, il y a du mépris aveugle dans son insouciance ignorante; mais, celui qui vous connaît et vous apprécie ne veut plus rien des biens de la terre; se contente de vos jouissances magiques; et, porté sur vos ailes sombres, ne désire plus que de s'élever, d'un vol léger, en construisant une hélice ascendante, vers la voûte sphérique des cieux. La terre ne lui montre que des illusions et des fantasmagories morales; mais vous, ô mathématiques concises, par l'enchaînement rigoureux de vos propositions tenaces et la constance de vos lois de fer, vous faites luire, aux yeux éblouis, un reflet puissant de cette vérité suprême dont on remarque l'empreinte dans l'ordre de l'univers. Mais, l'ordre qui vous entoure, représenté surtout par la régularité parfaite du carré, l'ami de Pythagore, est encore plus grand; car, le Tout-Puissant s'est révélé complétement, lui et ses attributs, dans ce travail mémorable qui consista à faire sortir, des entrailles du chaos, vos trésors de théorèmes et vos magnifiques splendeurs. Aux époques antiques et dans les temps modernes, plus d'une grande imagination humaine vit son génie, épouvanté, à la contemplation de vos figures symboliques tracées sur le papier brûlant, comme autant de signes mystérieux, vivants d'une haleine latente, que ne comprend pas le vulgaire profane et qui n'étaient que la révélation éclatante d'axiomes et d'hyéroglyphes éternels, qui ont existé avant l'univers et qui se maintiendront après lui. Elle se demande, penchée vers le précipice d'un point d'interrogation fatal, comment se fait-il que les mathématiques contiennent tant d'imposante grandeur et tant de vérité incontestable, tandis que, si elle les compare à l'homme, elle ne trouve en ce dernier que faux orgueil et mensonge. Alors, cet esprit supérieur, attristé, auquel la familiarité noble de vos conseils fait sentir davantage la petitesse de l'humanité et son incomparable folie, plonge sa tête, blanchie, sur une main décharnée et reste absorbé dans des méditations surnaturelles. Il incline ses genoux devant vous, et sa vénération rend hommage à votre visage divin, comme à la propre image du Tout-Puissant. Pendant mon enfance, vous m'apparûtes, une nuit de mai, aux rayons de la lune, sur une prairie verdoyante, aux bords d'un ruisseau limpide, toutes les trois égales en grâce et en pudeur, toutes les trois pleines de majesté comme des reines. Vous fîtes quelques pas vers moi, avec votre longue robe, flottante comme une vapeur, et vous m'attirâtes vers vos fières mamelles, comme un fils béni. Alors, j'accourus avec empressement, mes mains crispées sur votre blanche gorge. Je me suis nourri, avec reconnaissance, de votre manne féconde, et j'ai senti que l'humanité grandissait en moi, et devenait meilleure. Depuis ce temps, ô déesses rivales, je ne vous ai pas abandonnées. Depuis ce temps, que de projets énergiques, que de sympathies, que je croyais avoir gravées sur les pages de mon coeur, comme sur du marbre, n'ont-elles pas effacé lentement, de ma raison désabusée, leurs lignes configuratives, comme l'aube naissante efface les ombres de la nuit! Depuis ce temps, j'ai vu la mort, dans l'intention, visible à l'oeil nu, de peupler les tombeaux, ravager les champs de bataille, engraissés par le sang humain et faire pousser des fleurs matinales par-dessus les funèbres ossements. Depuis ce temps, j'ai assisté aux révolutions de notre globe; les tremblements de terre, les volcans, avec leur lave embrasée, le simoun du désert et les naufrages de la tempête ont eu ma présence pour spectateur impassible. Depuis ce temps, j'ai vu plusieurs générations humaines élever, le matin, ses ailes et ses yeux, vers l'espace, avec la joie inexpériente de la chrysalide qui salue sa dernière métamorphose, et mourir, le soir, avant le coucher du soleil, la tête courbée, comme des fleurs fanées que balance le sifflement plaintif du vent. Mais, vous, vous restez toujours les mêmes. Aucun changement, aucun air empesté n'effleure les rocs escarpés et les vallées immenses de votre identité. Vos pyramides modestes dureront davantage que les pyramides d'Égypte, fourmilières élevées par la stupidité et l'esclavage. La fin des siècles verra encore, debout sur les ruines des temps, vos chiffres cabalistiques, vos équations laconiques et vos lignes sculpturales siéger à la droite vengeresse du Tout-Puissant, tandis que les étoiles s'enfonceront, avec désespoir, comme des trombes, dans l'éternité d'une nuit horrible et universelle, et que l'humanité, grimaçante, songera à faire ses comptes avec le jugement dernier. Merci, pour les services innombrables que vous m'avez rendus. Merci, pour les qualités étrangères dont vous avez enrichi mon intelligence. Sans vous, dans ma lutte contre l'homme, j'aurai peut-être été vaincu. Sans vous, il m'aurait fait rouler dans le sable et embrasser la poussière de ses pieds. Sans vous, avec une griffe perfide, il aurait labouré ma chair et mes os. Mais, je me suis tenu sur mes gardes, comme un athlète expérimenté. Vous me donnâtes la froideur qui surgit de vos conceptions sublimes, exemptes de passion. Je m'en servis pour rejeter avec dédain les jouissances éphémères de mon court voyage et pour renvoyer de ma porte les offres sympathiques, mais trompeuses, de mes semblables. Vous me donnâtes la prudence opiniâtre qu'on déchiffre à chaque pas dans vos méthodes admirables de l'analyse, de la synthèse et de la déduction. Je m'en servis pour dérouter les ruses pernicieuses de mon ennemi mortel, pour l'attaquer, à mon tour, avec adresse, et plonger, dans les viscères de l'homme, un poignard aigu qui restera à jamais enfoncé dans son corps; car, c'est une blessure dont il ne se relèvera pas. Vous me donnâtes la logique, qui est comme l'âme elle-même de vos enseignements, pleins de sagesse; avec ses syllogimes, dont le labyrinthe compliqué n'en est que plus compréhensible, mon intelligence sentit s'accroître du double ses forces audacieuses. A l'aide de cet auxiliaire terrible, je découvris, dans l'humanité, en nageant vers les bas-fonds, en face de l'écueil de la haine, la méchanceté noire et hideuse, qui croupissait au milieu de miasmes délétères, en s'admirant le nombril. Le premier, je découvris, dans les ténèbres de ses entrailles, ce vice néfaste, le mal! supérieur en lui au bien. Avec cette arme empoisonnée que vous me prêtâtes, je fis descendre, de son piédestal, construit par la lâcheté de l'homme, le Créateur lui-même! Il grinça des dents et subit cette injure ignominieuse; car, il avait pour adversaire quelqu'un de plus fort que lui. Mais, je le laisserai de côté, comme un paquet de ficelles, afin d'abaisser mon vol... Le penseur Descartes faisait, une fois, cette réflexion que rien de solide n'avait été bâti sur vous. C'était une manière ingénieuse de faire comprendre que le premier venu ne pouvait pas sur le coup découvrir votre valeur inestimable. En effet, quoi de plus solide que les trois qualités principales déjà nommées qui s'élèvent, entrelacées comme une couronne unique, sur le sommet auguste de votre architecture colossale? Monument qui grandit sans cesse de découvertes quotidiennes, dans vos mines de diamant, et d'explorations scientifiques, dans vos superbes domaines. O mathématiques saintes, puissiez-vous, par votre commerce perpétuel, consoler le reste de mes jours de la méchanceté de l'homme et de l'injustice du Grand-Tout!
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| | | Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mar 10 Fév 2009, 20:24 | |
| Autre extrait, extrêmement révélateur de l'influence de Baudelaire (ici à comparer avec L'Homme et la mer) Vieil océan... (Chant I, strophe 9) - Spoiler:
Je me propose, sans être ému, de déclamer à grande voix la strophe sérieuse et froide que vous allez entendre. Vous, faites attention à ce qu'elle contient, et gardez-vous de l'impression pénible qu'elle ne manquera pas de laisser, comme une flétrissure, dans vos imaginations troublées. Ne croyez pas que je sois sur le point de mourir, car je ne suis pas encore un squelette, et la vieillesse n'est pas collée à mon front. Écartons en conséquence toute idée de comparaison avec le cygne, au moment où son existence s'envole, et ne voyez devant vous qu'un monstre, dont je suis heureux que vous ne puissiez pas apercevoir la figure; mais, moins horrible est-elle que son âme. Cependant, je ne suis pas un criminel... Assez sur ce sujet. Il n'y a pas longtemps que j'ai revu la mer et foulé le pont des vaisseaux, et mes souvenirs sont vivaces comme si je l'avais quittée la veille. Soyez néanmoins, si vous le pouvez, aussi calmes que moi, dans cette lecture que je me repens déjà de vous offrir, et ne rougissez pas à la pensée de ce qu'est le coeur humain. O poulpe, au regard de soie! toi, dont l'âme est inséparable de la mienne; toi, le plus beau des habitants du globe terrestre, et qui commandes à un sérail de quatre cents ventouses; toi, en qui siégent noblement, comme dans leur résidence naturelle, par un commun accord, d'un lien indestructible, la douce vertu communicative et les grâces divines, pourquoi n'es-tu pas avec moi, ton ventre de mercure contre ma poitrine d'aluminium, assis tous les deux sur quelque rocher du rivage, pour contempler ce spectacle que j'adore! Vieil océan, aux vagues de cristal, tu ressembles proportionnellement à ces marques azurées que l'on voit sur le dos meurtri des mousses; tu es un immense bleu, appliqué sur le corps de la terre: j'aime cette comparaison. Ainsi, à ton premier aspect, un souffle prolongé de tristesse, qu'on croirait être le murmure de ta brise suave, passe, en laissant des ineffaçables traces, sur l'âme profondément ébranlée, et tu rappelles au souvenir de tes amants, sans qu'on s'en rende toujours compte, les rudes commencements de l'homme, où il fait connaissance avec la douleur, qui ne le quitte plus. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, ta forme harmonieusement sphérique, qui réjouit la face grave de la géométrie, ne me rappelle que trop les petits yeux de l'homme, pareils à ceux du sanglier pour la petitesse, et à ceux des oiseaux de nuit pour la perfection circulaire du contour. Cependant, l'homme s'est cru beau dans tous les siècles. Moi, je suppose plutôt que l'homme ne croit à sa beauté que par amour-propre; mais, qu'il n'est pas beau réellement et qu'il s'en doute; car, pourquoi regarde-t-il la figure de son semblable avec tant de mépris? Je te salue, vieil océan! Vieil océan, tu es le symbole de l'identité: toujours égal à toi-même. Tu ne varies pas d'une manière essentielle, et, si tes vagues sont quelque part en furie, plus loin, dans quelque autre zone, elles sont dans le calme le plus complet. Tu n'es pas comme l'homme, qui s'arrête dans la rue, pour voir deux boule-dogues s'empoigner au cou, mais, qui ne s'arrête pas, quand un enterrement passe; qui est ce matin accessible et ce soir de mauvaise humeur; qui rit aujourd'hui et pleure demain. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, il n'y aurait rien d'impossible à ce que tu caches dans ton sein de futures utilités pour l'homme. Tu lui as déjà donné la baleine. Tu ne laisses pas facilement deviner aux yeux avides des sciences naturelles les mille secrets de ton intime organisation : tu es modeste. L'homme se vante sans cesse, et pour des minuties. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, les différentes espèces de poissons que tu nourris n'ont pas juré fraternité entre elles. Chaque espèce vit de son côté. Les tempéraments et les conformations qui varient dans chacune d'elles, expliquent, d'une manière satisfaisante, ce qui ne paraît d'abord qu'une anomalie. Il en est ainsi de l'homme, qui n'a pas les mêmes motifs d'excuse. Un morceau de terre est-il occupé par trente millions d'êtres humains, ceux-ci se croient obligés de ne pas se mêler de l'existence de leurs voisins, fixés comme des racines sur le morceau de terre qui suit. En descendant du grand au petit, chaque homme vit comme un sauvage dans sa tanière, et en sort rarement pour visiter son semblable, accroupi pareillement dans une autre tanière. La grande famille universelle des humains est une utopie digne de la logique la plus médiocre. En outre, du spectacle de tes mamelles fécondes, se dégage la notion d'ingratitude; car, on pense aussitôt à ces parents nombreux, assez ingrats envers le Créateur, pour abandonner le fruit de leur misérable union. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, ta grandeur matérielle ne peut se comparer qu'à la mesure qu'on se fait de ce qu'il a fallu de puissance active pour engendrer la totalité de ta masse. On ne peut pas t'embrasser d'un coup d'oeil. Pour te contempler, il faut que la vue tourne son télescope, par un mouvement continu, vers les quatre points de l'horizon, de même qu'un mathématicien, afin de résoudre une équation algébrique, est obligé d'examiner séparément les divers cas possibles, avant de trancher la difficulté. L'homme mange des substances nourrissantes, et fait d'autres efforts, dignes d'un meilleur sort, pour paraître gras. Qu'elle se gonfle tant qu'elle voudra, cette adorable grenouille. Sois tranquille, elle ne t'égalera pas en grosseur; je le suppose, du moins. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, tes eaux sont amères. C'est exactement le même goût que le fiel que distille la critique sur les beaux-arts, sur les sciences, sur tout. Si quelqu'un a du génie, on le fait passer pour un idiot; si quelque autre est beau de corps, c'est un bossu affreux. Certes, il faut que l'homme sente avec force son imperfection, dont les trois quarts d'ailleurs ne sont dus qu'à lui-même, pour la critiquer ainsi! Je te salue, vieil océan! Vieil océan, les hommes, malgré l'excellence de leurs méthodes, ne sont pas encore parvenus, aidés par les moyens d'investigation de la science, à mesurer la profondeur vertigineuse de tes abîmes; tu en as que les sondes les plus longues, les plus pesantes, ont reconnu inaccessibles. Aux poissons... ça leur est permis: pas aux hommes. Souvent, je me suis demandé quelle chose était le plus facile à reconnaître : la profondeur de l'océan ou la profondeur du coeur humain ! Souvent, la main portée au front, debout sur les vaisseaux, tandis que la lune se balançait entre les mâts d'une façon irrégulière, je me suis surpris, faisant abstraction de tout ce qui n'était pas le but que je poursuivais, m'efforçant de résoudre ce difficile problème! Oui, quel est le plus profond, le plus impénétrable des deux : l'océan ou le coeur humain? Si trente ans d'expérience de la vie peuvent jusqu'à un certain point pencher la balance vers l'une ou l'autre de ces solutions, il me sera permis de dire que, malgré la profondeur de l'océan, il ne peut pas se mettre en ligne, quant à la comparaison sur cette propriété, avec la profondeur du coeur humain. J'ai été en relation avec des hommes qui ont été vertueux. Ils mouraient à soixante ans, et chacun ne manquait pas de s'écrier : « Ils ont fait le bien sur cette terre, c'est-à-dire qu'ils ont pratiqué la charité : voilà tout, ce n'est pas malin, chacun peut en faire autant. » Qui comprendra pourquoi deux amants qui s'idolâtraient la veille, pour un mot mal interprété, s'écartent, l'un vers l'orient, l'autre vers l'occident, avec les aiguillons de la haine, de la vengeance, de l'amour et du remords, et ne se revoient plus, chacun drapé dans sa fierté solitaire. C'est un miracle qui se renouvelle chaque jour et qui n'en est pas moins miraculeux. Qui comprendra pourquoi l'on savoure non seulement les disgrâces générales de ses semblables, mais encore les particulières de ses amis les plus chers, tandis que l'on en est affligé en même temps? Un exemple incontestable pour clore la série : l'homme dit hypocritement oui et pense non. C'est pour cela que les marcassins de l'humanité ont tant de confiance les uns dans les autres et ne sont pas égoïstes. Il reste à la psychologie beaucoup de progrès à faire. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, tu es si puissant, que les hommes l'ont appris à leurs propres dépens. Ils ont beau employer toutes les ressources de leur génie... incapables de te dominer. Ils ont trouvé leur maître. Je dis qu'ils ont trouvé quelque chose de plus fort qu'eux. Ce quelque chose a un nom. Ce nom est : l'océan! La peur que tu leur inspires est telle, qu'ils te respectent. Malgré cela, tu fais valser leurs plus lourdes machines avec grâce, élégance et facilité. Tu leur fais faire des sauts gymnastiques jusqu'au ciel, et des plongeons admirables jusqu'au fond de tes domaines : un saltimbanque en serait jaloux. Bienheureux sont-ils, quand tu ne les enveloppes pas définitivement dans tes plis bouillonnants, pour aller voir, sans chemin de fer, dans tes entrailles aquatiques, comment se portent les poissons, et surtout comment ils se portent eux-mêmes. L'homme dit : « Je suis plus intelligent que l'océan. » C'est possible; c'est même assez vrai; mais l'océan lui est plus redoutable que lui à l'océan : c'est ce qu'il n'est pas nécessaire de prouver. Ce patriarche observateur, contemporain des premières époques de notre globe suspendu, sourit de pitié, quand il assiste aux combats navals des nations. Voilà une centaine de léviathans qui sont sortis des mains de l'humanité. Les ordres emphatiques des supérieurs, les cris des blessés, les coups de canon, c'est du bruit fait exprès pour anéantir quelques secondes. Il paraît que le drame est fini, et que l'océan a tout mis dans son ventre. La gueule est formidable. Elle doit être grande vers le bas, dans la direction de l'inconnu! Pour couronner enfin la stupide comédie, qui n'est pas même intéressante, on voit, au milieu des airs, quelque cigogne, attardée par la fatigue, qui se met à crier, sans arrêter l'envergure de son vol : « Tiens! ... je la trouve mauvaise! Il y avait en bas des points noirs; j'ai fermé les yeux : ils ont disparu. » Je te salue, vieil océan! Vieil océan, ô grand célibataire, quand tu parcours la solitude solennelle de tes royaumes flegmatiques, tu t'enorgueillis à juste titre de ta magnificence native, et des éloges vrais que je m'empresse de te donner. Balancé voluptueusement par les molles effluves de ta lenteur majestueuse, qui est le plus grandiose parmi les attributs dont le souverain pouvoir t'a gratifié, tu déroules, au milieu d'un sombre mystère, sur toute ta surface sublime, tes vagues incomparables, avec le sentiment calme de ta puissance éternelle. Elles se suivent parallèlement, séparées par de courts intervalles. A peine l'une diminue, qu'une autre va à sa rencontre en grandissant, accompagnées du bruit mélancolique de l'écume qui se fond, pour nous avertir que tout est écume. (Ainsi, les êtres humains, ces vagues vivantes, meurent l'un après l'autre, d'une manière monotone; mais, sans laisser de bruit écumeux). L'oiseau de passage se repose sur elles avec confiance, et se laisse abandonner à leurs mouvements, pleins d'une grâce fière, jusqu'à ce que les os de ses ailes aient recouvré leur vigueur accoutumée pour continuer le pèlerinage aérien. Je voudrais que la majesté humaine ne fût que l'incarnation du reflet de la tienne. Je demande beaucoup, et ce souhait sincère est glorieux pour toi. Ta grandeur morale, image de l'infini, est immense comme la réflexion du philosophe, comme l'amour de la femme, comme la beauté divine de l'oiseau, comme les méditations du poète. Tu es plus beau que la nuit. Réponds-moi, océan, veux-tu être mon frère? Remue-toi avec impétuosité... plus... plus encore, si tu veux que je te compare à la vengeance de Dieu; allonge tes griffes livides, en te frayant un chemin sur ton propre sein... c'est bien. Déroule tes vagues épouvantables, océan hideux, compris par moi seul, et devant lequel je tombe, prosterné à tes genoux. La majesté de l'homme est empruntée; il ne m'imposera point: toi, oui. Oh! quand tu t'avances, la crête haute et terrible, entouré de tes replis tortueux comme d'une cour, magnétiseur et farouche, roulant tes ondes les unes sur les autres, avec la conscience de ce que tu es, pendant que tu pousses, des profondeurs de ta poitrine, comme accablé d'un remords intense que je ne puis pas découvrir, ce sourd mugissement perpétuel que les hommes redoutent tant, même quand ils te contemplent, en sûreté, tremblants sur le rivage, alors, je vois qu'il ne m'appartient pas, le droit insigne de me dire ton égal. C'est pourquoi, en présence de ta supériorité, je te donnerais tout mon amour (et nul ne sait la quantité d'amour que contiennent mes aspirations vers le beau), si tu ne me faisais douloureusement penser à mes semblables, qui forment avec toi le plus ironique contraste, l'antithèse la plus bouffonne que l'on ait jamais vue dans la création: je ne puis pas t'aimer, je te déteste. Pourquoi reviens-je à toi, pour la millième fois, vers tes bras amis, qui s'entr'ouvrent, pour caresser mon front brûlant, qui voit disparaître la fièvre à leur contact! Je ne connais pas ta destinée cachée; tout ce qui te concerne m'intéresse. Dis-moi donc si tu es la demeure du prince des ténèbres. Dis-le moi... dis-le moi, océan (à moi seul, pour ne pas attrister ceux qui n'ont encore connu que les illusions), et si le souffle de Satan crée les tempêtes qui soulèvent tes eaux salées jusqu'aux nuages. Il faut que tu me le dises, parce que je me réjouirais de savoir l'enfer si près de l'homme. Je veux que celle-ci soit la dernière strophe de mon invocation. Par conséquent, une seule fois encore, je veux te saluer et te faire mes adieux ! Vieil océan, aux vagues de cristal... Mes yeux se mouillent de larmes abondantes, et je n'ai pas la force de poursuivre; car, je sens que le moment venu de revenir parmi les hommes, à l'aspect brutal; mais... courage! Faisons un grand effort, et accomplissons, avec le sentiment du devoir, notre destinée sur cette terre. Je te salue, vieil océan!
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| | | Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mar 10 Fév 2009, 20:33 | |
| Ah oui et j'oubliais ce qui m'a définitivement convertie à cet auteur : une adaptation de quelques strophes par Matthias Langhoff au théâtre des Abbesses en janvier dernier. C'est pour le coup un Maldoror tricéphale, partagé entre un ange, un ivrogne et une prostituée, qui erre dans des décors gigantesques à la Langhoff (dont un navire immense pour le vieil océan à la fin, un délice...). Il a d'ailleurs été plus loin encore, ouvrant une comparaison nette entre les récits des Chants avec ceux qu'il entendait la nuit de la voix des SDF sous sa fenêtre, ainsi que l'association de certains avec le vécu historique d'Isidor Ducasse, à savoir la Commune.
Article de Rue89 | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mer 11 Fév 2009, 12:39 | |
| j'ai comme l'impression, Firenze que tu n'as pas fini de nous surprendre..
je dois avoir les chants de Maldoror, mais où ? j'ai tenté d'y mettre mon nez, mais j'avais vite renoncé.
Dans quelle version l'as-tu ?
car je me souviens qu'un ami avait dénigré mon édition, ce qui n'a pas aiguisé mon appétit (excuse facile, je le reconnais.) | |
| | | Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mer 11 Fév 2009, 12:55 | |
| Je n'ai qu'une édition, celle des Pocket Classiques, dont le dossier et la préface sont assez intéressants. Je n'ai pas connaissance des autres mais je me fie assez régulièrement à celle-ci... | |
| | | Lîlâ pilier
Nombre de messages : 1598 Date d'inscription : 08/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mer 11 Fév 2009, 20:50 | |
| Lautréamont me pose problème. Dès que je lis un extrait, j'adore. Ses idées, ses images me fascinent. J'aime aussi le concept de son oeuvre. Il me fait penser à Baudelaire, à Sade aussi, parfois. Néanmoins, j'ai tenté deux fois de lire les Chants de Maldoror et je n'ai jamais réussi à les achever. L'écriture est très dense, et le style très "chargé", ce qui rend la lecture peu fluide et évidente, au long terme. Une citation toutefois qui m'a fait sourire : - Citation :
- Toi, jeune homme, ne te désespère point, car tu as un ami dans le vampire, malgré ton opinion contraire. En comptant l'acarus sarcopte qui produit la gale, tu auras deux amis!
Sans parler de sa description de la jouissance qu'il y a à torturer un enfant, à faire couler son sang et à boire conjointement ses larmes et son sang. Lautréamont serait-il lui-même un vampire ? | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 12 Fév 2009, 05:41 | |
| j'ai le souvenir d'un texte compact avec des phrases qui n'en finissent pas, et de délires ! bref, je ne devais pas être réceptif, c'était une édition du livre de poche, faut que j'en voie une autre. | |
| | | Lîlâ pilier
Nombre de messages : 1598 Date d'inscription : 08/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 12 Fév 2009, 10:40 | |
| Voilà, c'est un peu le problème que j'ai aussi eu. Pourtant, j'ai la même édition que Firenze. | |
| | | Firenze pilier
Nombre de messages : 346 Date d'inscription : 19/01/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 12 Fév 2009, 16:55 | |
| Oui oui c'est un texte compact, c'est certain. Mais bon, la forme explique le contenu, et inversement. | |
| | | Ghaast habitué(e)
Nombre de messages : 15 Age : 34 Localisation : Région parrisienne Date d'inscription : 18/07/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Ven 21 Aoû 2009, 23:03 | |
| Tiens voir cette discussion me donne envie de relire les Chants, bon certainement pas en entier mais c'est un des livres que j'ai lu l'an dernier que j'ai le plus apprécié. Il y a un passage que j'ai retenu : "J'ai reçu la vie comme une blessure et je défends au suicide de guérir la cicatrice. Je veux que le créateur en contemple à chaque heure de son éternité la crevasse béante. C'est le châtiment que je lui inflige." Il ne l'aura pas fait contempler longtemps (il est mort à 23/ 24 ans je crois) mais ça aura été bien le temps que ça aura duré. | |
| | | L'émane pilier
Nombre de messages : 506 Age : 31 Localisation : Angers Date d'inscription : 20/05/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Sam 22 Aoû 2009, 09:41 | |
| Je lis en ce moment "Les chants de Maldoror" aussi. Sur les conseil de Lîlâ (à qui je signale en passant que j'ai repris du poil de la bète, par rapport à l'autre soir ) J'admire beaucoup son style, et prends beaucoup de plaisir à lire son oeuvre. Lautréamont, c'est peut-être l'auteur culte que je cherchais. | |
| | | fulcanelli pilier
Nombre de messages : 136 Age : 47 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 15/08/2009
| Sujet: Lautréamont Sam 22 Aoû 2009, 20:35 | |
| J'ai lu quelque part que les éditions les plus généralistes ne reprennent pas le texte exact des Chants. En effet dans l'écrit original l'auteur aurait volontairement introduit des fautes d'orthographe. Moi j'ai une édition à 10 francs (et c'est pas une blague), pas très lisible, mais j'ai quand même adoré. Je pose une colle. Quelqu'un connait-il une édition fidèle à l'original? | |
| | | Ghaast habitué(e)
Nombre de messages : 15 Age : 34 Localisation : Région parrisienne Date d'inscription : 18/07/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Sam 22 Aoû 2009, 21:49 | |
| Dans l'édition que j'ai (qui est celle qui est au début de ce sujet) il y a 2 versions pour certains Chants, au premier abord ils avaient l'air identique donc j'en ai lu qu'une version de chaque mais c'est peut-être ça. | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Dim 23 Aoû 2009, 08:35 | |
| Il est parfois possible de trouver en bibliothèque les volumes de la Pléiade, qui sont complets au possible. | |
| | | fulcanelli pilier
Nombre de messages : 136 Age : 47 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 15/08/2009
| Sujet: Lautréamont Dim 23 Aoû 2009, 14:50 | |
| Merci du renseignement, je n'y avais pas pensé. C'est vrai que la Pléiade, on hésite avant d'acheter, il vaut souvent mieux emprunter si on le peut. Mais là j'ai un peu honte, je n'ai jamais foutu les pieds dans ma bibliothèque municipale. (Il faut dire qu'elle n'ouvre que 4 heures par semaine) | |
| | | Prince d'Aquitaine Animation
Nombre de messages : 2948 Age : 34 Localisation : Maromme, Seine-Maritime Date d'inscription : 29/05/2009
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Dim 23 Aoû 2009, 15:47 | |
| Tout dépend de la taille de ta bibliothèque. J'habite à côté de Rouen et la bibliothèque Villon est une mine d'or. Si tu as une (très) grande ville pas loin de chez toi, tu peux peut-être le trouver. J'ai regardé sur internet, mais même en occasion il est très cher, car non réédité | |
| | | fulcanelli pilier
Nombre de messages : 136 Age : 47 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 15/08/2009
| Sujet: Lautréamont Dim 23 Aoû 2009, 18:45 | |
| J'habite un village à une trentaine de kilomètres de Bordeaux (j'ai mis Brest sur mon profil, Bordeaux c'est seulement temporaire), mais je n'y vais pas souvent. Je m'y rends de temps en temps puisque je suis en licence d'histoire (enseignement à distance) et leur bibliothèque est une mine d'or (ou de mots, plutôt). Et une collec de Pléiade à me rendre jaloux... | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Mar 23 Fév 2010, 07:29 | |
| « Œuvres complètes», par Lautréamont, édition établie par Jean-Luc Steinmetz, Gallimard, La Pléiade.
Sollers commente cette édition sur cette page et donne les avis différents - de critiques reconnus, portés sur l'auteur. | |
| | | ignatius pilier
Nombre de messages : 416 Localisation : Sud est Date d'inscription : 18/12/2010
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 23 Déc 2010, 22:19 | |
| Lautréamont ne marque pas, il opère, il griffe, il pénètre. Quelqu'un sur ce fil remarque qu'il est peut-être "l'auteur culte qu'il attendait", pour moi il est LE POETE que j'avais toujours voulu lire. Je ne connais pas d'autre poète bouleversant après lui (je ne dis pas qu'il n'y en a pas eu d'autres après, seulement pas un à ma connaissance qui ait autant modifier l'écriture poétique: d'une certaine manière il devance même "une saison en enfer", voire, mais je vais me faire haïr, le supplante), Artaud me semble bien taper à la porte, j'adore Artaud mais je ne pense pas qu'il ait pris le même "risque" que Lautréamont, et je ne pense pas qu'il laisse son lecteur dans la même sauvage perpléxité que celui qui s'avance pour la première fois dans "Les chants de Maldoror". Je recommande tout particulièrement, à ceux qui veulent s'en faire une idée de lire dans le chant 2 le poème commençant par " je cherchais une âme qui me ressemblât..." (je le mets en spoiler en espérant que le texte ne soit pas trop long...) ps: Rotko: c'est ce passage, entre autres, que je vais peut-être travailler pour le festival de théâtre d'Avignon. - Spoiler:
Je cherchais une âme qui me ressemblât, et je ne pouvais pas la trouver. Je fouillais tous les recoins de la terre; ma persévérance était inutile. Cependant, je ne pouvais pas rester seul. Il fallait quelqu'un qui approuvât mon caractère; il fallait quelqu'un qui eût les mêmes idées que moi. C'était le matin; le soleil se leva à l'horizon, dans toute sa magnificence, et voilà qu'à mes yeux se lève aussi un jeune homme, dont la présence engendrait des fleurs sur son passage. Il s'approcha de moi, et, me tendant la main: "Je suis venu vers toi, toi, qui me cherches. Bénissons ce jour heureux. » Mais, moi: "Va-t'en; je ne t'ai pas appelé; je n'ai pas besoin de ton amitié... » C'était le soir; la nuit commençait à étendre la noirceur de son voile sur la nature. Une belle femme, que je ne faisais que distinguer, étendait aussi sur moi son influence enchanteresse, et me regardait avec compassion; cependant, elle n'osait me parler. Je dis: "Approche-toi de moi, afin que je distingue nettement les traits de ton visage; car, la lumière des étoiles n'est pas assez forte, pour les éclairer à cette distance. » Alors, avec une démarche modeste, et les yeux baissés, elle foula l'herbe du gazon, en se dirigeant de mon côté. Dès que je la vis: « Je vois que la bonté et la justice ont fait résidence dans ton coeur: nous ne pourrions pas vivre ensemble. Maintenant, tu admires ma beauté, qui a bouleversé plus d'une; mais, tôt ou tard, tu te repentirais de m'avoir consacré ton amour; car, tu ne connais pas mon âme. Non que je te sois jamais infidèle: celle qui se livre à moi avec tant d'abandon et de confiance, avec autant de confiance et d'abandon, je me livre à elle; mais, mets-te le dans la tête, pour ne jamais l'oublier: les loups et les agneaux ne se regardent pas avec des yeux doux. » Que me fallait-il donc, à moi, qui rejetais, avec tant de dégoût, ce qu'il y avait de plus beau dans l'humanité! ce qu'il me fallait, je n'aurais pas su le dire. Je n'étais pas encore habitué à me rendre un compte rigoureux des phénomènes de mon esprit, au moyen des méthodes que recommande la philosophie. Je m'assis sur un roc, près de la mer. Un navire venait de mettre toutes voiles pour s'éloigner de ce parage: un point imperceptible venait de paraître à l'horizon, et s'approchait peu à peu, poussé par la rafale, en grandissant avec rapidité. La tempête allait commencer ses attaques, et déjà le ciel s'obscurcissait, en devenant d'un noir presque aussi hideux que le coeur de l'homme. Le navire, qui était un grand vaisseau de guerre, venait de jeter toutes ses ancres, pour ne pas être balayé sur les rochers de la côte. Le vent sifflait avec fureur des quatre points cardinaux, et mettait les voiles en charpie. Les coups de tonnerre éclataient au milieu des éclairs, et ne pouvaient surpasser le bruit des lamentations qui s'entendaient sur la maison sans bases, sépulcre mouvant. Le roulis de ces masses aqueuses n'était pas parvenu à rompre les chaînes des ancres; mais, leurs secousses avaient entr'ouvert une voie d'eau, sur les flancs du navire. Brèche énorme; car, les pompes ne suffisent pas à rejeter les paquets d'eau salée qui viennent, en écumant, s'abattre sur le pont, comme des montagnes. Le navire en détresse tire des coups de canon d'alarme; mais, il sombre avec lenteur... avec majesté. Celui qui n'a pas vu un vaisseau sombrer au milieu de l'ouragan, de l'intermittence des éclairs et de l'obscurité la plus profonde, pendant que ceux qu'il contient sont accablés de ce désespoir que vous savez, celui-là ne connaît pas les accidents de la vie. Enfin, il s'échappe un cri universel de douleur immense d'entre les flancs du vaisseau, tandis que la mer redouble ses attaques redoutables. C'est le cri qu'a fait pousser l'abandon des forces humaines. Chacun s'enveloppe dans le manteau de la résignation, et remet son sort entre les mains de Dieu. On s'accule comme un troupeau de moutons. Le navire en détresse tire des coups de canon d'alarme; mais, il sombre avec lenteur... avec majesté. Ils ont fait jouer les pompes pendant tout le jour. Efforts inutiles. La nuit est venue, épaisse, implacable, pour mettre le comble à ce spectacle gracieux. Chacun se dit qu'une fois dans l'eau, il ne pourra plus respirer; car, d'aussi loin qu'il fait revenir sa mémoire, il ne se reconnaît aucun poisson pour ancêtre; mais, il s'exhorte à retenir son souffle le plus longtemps possible, afin de prolonger sa vie de deux ou trois secondes; c'est là l'ironie vengeresse qu'il veut adresser à la mort... Le navire en détresse tire des coups de canon d'alarme; mais, il sombre avec lenteur... avec majesté. Il ne sait pas que le vaisseau, en s'enfonçant, occasionne une puissante circonvolution des houles autour d'elles-mêmes; que le limon bourbeux s'est mêlé aux eaux troublées, et qu'une force qui vient de dessous, contre-coup de la tempête qui exerce ses ravages en haut, imprime à l'élément des mouvements saccadés et nerveux. Ainsi, malgré la provision de sang-froid qu'il ramasse d'avance, le futur noyé, après réflexion plus ample, devra se sentir heureux, s'il prolonge sa vie, dans les tourbillons de l'abîme, de la moitié d'une respiration ordinaire, afin de faire bonne mesure. Il lui sera donc impossible de narguer la mort, son suprême voeu. Le navire en détresse tire des coups de canon d'alarme; mais, il sombre avec lenteur... avec majesté. C'est une erreur. Il ne tire plus des coups de canon, il ne sombre pas. La coquille de noix s'est engouffrée complètement. O ciel! comment peut-on vivre, après avoir éprouvé tant de voluptés! Il venait de m'être donné d'être témoin des agonies de mort de plusieurs de mes semblables. Minute par minute, je suivais les péripéties de leurs angoisses. Tantôt, le beuglement de quelque vieille, devenue folle de peur, faisait prime sur le marché. Tantôt, le seul glapissement d'un enfant en mamelles empêchait d'entendre le commandement des manoeuvres. Le vaisseau était trop loin pour percevoir distinctement les gémissements que m'apportait la rafale; mais, je le rapprochais par la volonté, et l'illusion d'optique était complète. Chaque quart d'heure, quand un coup de vent, plus fort que les autres, rendant ses accents lugubres à travers le cri des pétrels effarés, disloquait le navire dans un craquement longitudinal, et augmentait les plaintes de ceux qui allaient être offerts en holocauste à la mort, je m'enfonçais dans la joue la pointe aiguë d'un fer, et je pensais secrètement: "Ils souffrent davantage! » J'avais, au moins, ainsi, un terme de comparaison. Du rivage, je les apostrophais, en leur lançant des imprécations et des menaces. Il me semblait qu'ils devaient m'entendre! Il me semblait que ma haine et mes paroles, franchissant la distance, anéantissaient les lois physiques du son, et parvenaient, distinctes, à leurs oreilles, assourdies par les mugissements de l'océan en courroux! Il me semblait qu'ils devaient penser à moi, et exhaler leur vengeance en impuissante rage! De temps à autre, je jetais les yeux vers les cités, endormies sur la terre ferme; et, voyant que personne ne se doutait qu'un vaisseau allait sombrer, à quelques milles du rivage, avec une couronne d'oiseaux de proie et un piédestal de géants aquatiques, au ventre vide, je reprenais courage, et l'espérance me revenait: j'étais donc sûr de leur perte! Ils ne pouvaient échapper! Par surcroît de précaution, j'avais été chercher mon fusil à deux coups, afin que, si quelque naufragé était tenté d'aborder les rochers à la nage, pour échapper à une mort imminente, une balle sur l'épaule lui fracassât le bras, et l'empêchât d'accomplir son dessein. Au moment le plus furieux de la tempête, je vis, surnageant sur les eaux, avec des efforts désespérés, une tête énergique, aux cheveux hérissés. Il avalait des litres d'eau, et s'enfonçait dans l'abîme, ballotté comme un liége. Mais, bientôt, il apparaissait de nouveau, les cheveux ruisselants; et, fixant l'oeil sur le rivage, il semblait défier la mort. Il était admirable de sang-froid. Une large blessure sanglante, occasionnée par quelque pointe d'écueil caché, balafrait son visage intrépide et noble. Il ne devait pas avoir plus de seize ans; car, à peine, à travers les éclairs qui illuminaient la nuit, le duvet de la pêche s'apercevait sur sa lèvre. Et, maintenant, il n'était plus qu'à deux cents mètres de la falaise; et je le dévisageais facilement. Quel courage! Quel esprit indomptable! Comme la fixité de sa tête semblait narguer le destin, tout en fendant avec vigueur l'onde, dont les sillons s'ouvraient difficilement devant lui!... Je l'avais décidé d'avance. Je me devais à moi-même de tenir ma promesse: l'heure dernière avait sonné pour tous, aucun ne devait en échapper. Voilà ma résolution; rien ne le changerait... Un son sec s'entendit, et la tête aussitôt s'enfonça, pour ne plus reparaître. Je ne pris pas à ce meurtre autant de plaisir qu'on pourrait le croire; et, c'était, précisément, parce que j'étais rassasié de toujours tuer, que je le faisais dorénavant par simple habitude, dont on ne peut se passer, mais, qui ne procure qu'une jouissance légère. Le sens est émoussé, endurci. Quelle volupté ressentir à la mort de cet être humain, quand il y en avait plus d'une centaine, qui allaient s'offrir à moi, en spectacle, dans leur lutte dernière contre les flots, une fois le navire submergé? A cette mort, je n'avais même pas l'attrait du danger; car, la justice humaine, bercée par l'ouragan de cette nuit affreuse, sommeillait dans les maisons, à quelques pas de moi. Aujourd'hui que les années pèsent sur mon corps, je le dis avec sincérité, comme une vérité suprême et solennelle: je n'étais pas aussi cruel qu'on l'a raconté ensuite, parmi les hommes; mais, des fois, leur méchanceté exerçait ses ravages persévérants pendant des années entières. Alors, je ne connaissais plus de borne à ma fureur; il me prenait des accès de cruauté, et je devenais terrible pour celui qui s'approchait de mes yeux hagards, si toutefois il appartenait à ma race. Si c'était un cheval ou un chien, je le laissais passer: avez-vous entendu ce que je viens de dire? Malheureusement, la nuit de cette tempête, j'étais dans un de ces accès, ma raison s'était envolée (car, ordinairement, j'étais aussi cruel, mais, plus prudent); et tout ce qui tomberait, cette fois-là, entre mes mains, devait périr; je ne prétends pas m'excuser de mes torts. La faute n'en est pas toute à mes semblables. Je ne fais que constater ce qui est, en attendant le jugement dernier qui me fait gratter la nuque d'avance... Que m'importe le jugement dernier! Ma raison ne s'envole jamais, comme je le disais pour vous tromper. Et, quand je commets un crime, je sais ce que je fais: je ne voulais pas faire autre chose! Debout sur le rocher, pendant que l'ouragan fouettait mes cheveux et mon manteau, j'épiais dans l'extase cette force de la tempête, s'acharnant sur un navire, sous un ciel sans étoiles. Je suivis, dans un attitude triomphante, toutes les péripéties de ce drame, depuis l'instant où le vaisseau jeta ses ancres, jusqu'au moment où il s'engloutit, habit fatal qui entraîna, dans les boyaux de la mer, ceux qui s'en étaient revêtus comme d'un manteau. Mais, l'instant s'approchait, où j'allais, moi-même, me mêler comme acteur à ces scènes de la nature bouleversée. Quand la place où le vaisseau avait soutenu le combat montra clairement que celui-ci avait été passer le reste de ses jours au rez-de-chaussée de la mer, alors, ceux qui avaient été emportés avec les flots reparurent en partie à la surface. Il se prirent à bras-le-corps, deux par deux, trois par trois; c'était le moyen de ne pas sauver leur vie; car, leurs mouvements devenaient embarrassés, et ils coulaient bas comme des cruches percées... Quelle est cette armée de monstres marins qui fend les flots avec vitesse? Ils sont six; leurs nageoires sont vigoureuses, et s'ouvrent un passage, à travers les vagues soulevées. De tous ces êtres humains, qui remuent les quatre membres dans ce continent peu ferme, les requins ne font bientôt qu'une omelette sans oeufs, et se la partagent d'après la loi du plus fort. Le sang se mêle aux eaux, et les eaux se mêlent au sang. Leurs yeux féroces éclairent suffisamment la scène du carnage... Mais, quel est encore ce tumulte des eaux, là-bas, à l'horizon? On dirait une trombe qui s'approche. Quels coups de rame! J'aperçois ce que c'est. Une énorme femelle de requin vient prendre part au pâté de foie de canard, et manger du bouilli froid. Elle est furieuse; car, elle arrive affamée. Une lutte s'engage entre elle et les requins, pour se disputer les quelques membres palpitants qui flottent par-ci, par-là, sans rien dire, sur la surface de la crême rouge. A droite, à gauche, elle lance des coups de dent qui engendrent des blessures mortelles. Mais, trois requins vivants l'entourent encore, et elle est obligée de tourner en tous sens, pour déjouer leurs manoeuvres. Avec une émotion croissante, inconnue jusqu'alors, le spectateur, placé sur le rivage, suit cette bataille navale d'un nouveau genre. Il a les yeux fixés sur cette courageuse femelle de requin, aux dents si fortes. Il n'hésite plus, il épaule son fusil, et, avec son adresse habituelle, il loge sa deuxième balle dans l'ouïe d'un des requins, au moment où il se montrait au-dessus d'une vague. Restent deux requins qui n'en témoignent qu'un acharnement plus grand. Du haut du rocher, l'homme à la salive saumâtre, se jette à la mer, et nage vers le tapis agréablement coloré, en tenant à la main ce couteau d'acier qui ne l'abandonne jamais. Désormais, chaque requin a affaire à un ennemi. Il s'avance vers son adversaire fatigué, et, prenant son temps, lui enfonce dans le ventre sa lame aiguë. La citadelle mobile se débarrasse facilement du dernier adversaire... Se trouvent en présence le nageur et la femelle de requin, sauvée par lui. Ils se regardèrent entre les yeux pendant quelques minutes; et chacun s'étonna de trouver tant de férocité dans les regards de l'autre. Ils tournent en rond en nageant, ne se perdent pas de vue, et se disent à part soi: "Je me suis trompé jusqu'ici; en voilà un qui est plus méchant." Alors, d'un commun accord, entre deux eaux, ils glissèrent l'un vers l'autre, avec une admiration mutuelle, la femelle de requin écartant l'eau de ses nageoires, Maldoror battant l'onde avec ses bras; et retinrent leur souffle, dans une vénération profonde, chacun désireux de contempler, pour la première fois, son portrait vivant. Arrivés à trois mètres de distance, sans faire aucun effort, ils tombèrent brusquement l'un contre l'autre, comme deux aimants, et s'embrassèrent avec dignité et reconnaissance, dans une étreinte aussi tendre que celle d'un frère ou d'une soeur. Les désirs charnels suivirent de près cette démonstration d'amitié. Deux cuisses nerveuses se collèrent étroitement à la peau visqueuse du monstre, comme deux sangsues; et, les bras et les nageoires entrelacés autour du corps de l'objet aimé qu'ils entouraient avec amour, tandis que leurs gorges et leurs poitrines ne faisaient bientôt plus qu'une masse glauque aux exhalaisons de goëmon; au milieu de la tempête qui continuait de sévir; à la lueur des éclairs; ayant pour lit d'hyménée la vague écumeuse, emportés par un courant sous-marin comme dans un berceau, et roulant, sur eux-mêmes, vers les profondeurs inconnues de l'abîme, ils se réunirent dans un accouplement long, chaste et hideux!... Enfin, je venais de trouver quelqu'un qui me ressemblât!... Désormais, je n'étais plus seul dans la vie!... Elle avait les mêmes idées que moi!... J'étais en face de mon premier amour!
Dernière édition par ignatius le Jeu 30 Déc 2010, 10:57, édité 1 fois | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Ven 24 Déc 2010, 17:24 | |
| - ignatius a écrit:
- ce passage, entre autres, que je vais peut-être travailler pour le festival de théâtre d'Avignon
Tu veux dire que tu comptes les réciter ou les mettre en scène ? | |
| | | ignatius pilier
Nombre de messages : 416 Localisation : Sud est Date d'inscription : 18/12/2010
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Ven 24 Déc 2010, 18:00 | |
| Ce serait un mélange des deux. Mais je ne pense pas toucher un mot du texte (évidemment) ni en ajouter entre deux strophes. J'aimerais une mise en scène minimaliste car ce serait pour le présenter dans la rue. En fait je ne veux surtout pas dénaturer le texte, et je souhaite parvenir à quelque chose qui respecte l'état d'esprit de Ducasse (ex: son introduction: "plût au ciel que le lecteur etc etc", c'est à dire surprendre, gêner, faire naître des mimiques de dégoût puis des sourires complices).
Je te tiendrai au courant si tu veux des développements, mais je commence à me dire que l'entreprise risque de prendre de l'ampleur et pourrait n'aboutir que l'année suivante. Mais à vouloir trop bien faire, on sait ce que c'est,parfois on ne fait rien, ou pire, on fait mal. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 30 Déc 2010, 07:20 | |
| - ignatius a écrit:
- Je te tiendrai au courant si tu veux des développements.
Bien sûr, oui, je veux ! le respect du texte, certes, mais comment faire passer à l'oral les longs developpements sur vieil ocean ? il y a des parenthèses, des redites, (la profondeur de l'océan comparée à celle du coeur humain), des tirades si longues qu'il faut une sacrée respiration, unissant la fin de la tirade précédente et le debut de la suivante : reprises scandées. d'ailleurs choisir des textes, n'est-ce pas "toucher au texte" ? j'ai l'édition du livre de poche. | |
| | | ignatius pilier
Nombre de messages : 416 Localisation : Sud est Date d'inscription : 18/12/2010
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 30 Déc 2010, 11:04 | |
| De toutes façons Rotko jene compte pas mettre la totalité des six Chants en scène, du moins pas pour ce projet-ci (qui doit se passer pour l'instant dans la rue), ce serait trop long.
Quand je disais "ne pas toucher au texte", je voulais dire -mais je n'ai pas précisé- que je n'aime pas les insertions dans un texte, après on peut faire des coupes (c'est le travail de l'adaptation), ne choisir que certains passages. La mise en scène permet des ellipses.
Je te dirai donc si la chose se profile bien pour cette année ou non. Par contre on vient de me proposer de monter sur scène en février pour un travail autour de la poésie (mes textes et ceux d'un ami), si jamais tu n'es pas loin d'Avignon à cette date, je t'en reparlerai.
Bonnes fêtes! | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Le Comte de Lautréamont Jeu 30 Déc 2010, 15:09 | |
| Ignatius :, Ce serait bien que tu nous inities à Lautréamont (je parle en ce qui me concerne, d'autres sont plus avertis). Par ailleurs je découvre que certains textes de théâtre sont "évolutifs" : ce fut le cas de la vie de Galilée de Bertolt Brecht : l'autur remaniait son texte à chaque interprétation, en gros, et de pièces de dario Fo où il vise actuellement la politique de Berlusconi, et ne voit pas d'inconvénients à ce que des metteurs en scènes français, y greffent des banderilles contre Sarkozy et sa "politique sociale". je dois voir deux représentations de ces deux auteurs en début 2011. Pour Lautréamont, indique précisément les références : chant et incipit, c'est ainsi que j'ai le texte en Ldp. | |
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