Iain Levison

myriam2199 a écrit:

Mais, sincerement vous croyez vraiment que c’est possible un roman amoral ? C’est ce que je me demande. Et une personne amorale ? C’est possible ?

Jette un coup d'oeil sur la fille aux ciseaux et tu me diras si c'est une bonne couturière

Ayant offert, Un petit boulot, une réaction qui est du même ton que le mot de Tchipette :

Tchipette a écrit:

Une absence complète de morale.

Une critique caustique et perfide de la société.
[...]
Vous secouez le tout vigoureusement, à consommer immédiatement, petit cocktail drôle et impertinent.

Dans un grand rire, le lecteur l'a trouvé complètement amoral et impertinent ! Bon, je regarde mon planning et essaye de le lire rapidement

Iain Levinson, Arrêtez-moi là ! Chez Liana Levi.

1/2

Le titre prête au calembour puisqu’il s’agit d’un chauffeur de taxi, qui, après quelques courses tout à fait banales, se voit mis en état d’arrestation. Pourquoi ? Il ne le sait pas, on ne répond pas à ses questions, tout le monde a un air entendu et lui un air tout - sauf détendu.

Ce récit se lit fort bien, il est linéaire et en temps direct, tout pour plaire à qui recherche un moment de détente.

Vous pourriez même déclarer que vous le lisez pour mieux connaître la justice américaine !

Toute ressemblance avec de personnes ou des situations etc.

Sous le coup d’une accusation infâmante, le chauffeur a des réflexions ingénues :

Citation :

« En face du centre de détention, j’ai la surprise de trouver davantage de journalistes. Il ne se passe donc rien d’autre aujourd’hui en Amérique que mon entrée dans un fourgon dont je sors ensuite ? Tous ces adultes ont un emploi et sont pourtant debout dans des parkings et devant des grilles surmontées de barbelés pour m’apercevoir, moi ? »

Citation :

- « Jeffrey Stutton, vous êtes accusé de ***. Que plaidez-vous ?

Je ne réponds pas puisque Randall [ l’avocat] m’a demandé de le laisser parler, mais il me pousse du coude et murmure « vous devez parler. »

Je réponds « Non coupable » et je suis surpris de la faiblesse de ma voix. C’est celle d’un homme honteux, d’un coupable qui espère qu’un procès, une tentative auprès du système judiciaire le sauvera.

Je me râcle la gorge pour parler à nouveau, mais le juge me précède

- « Placé en détention provisoire » déclare-t-il;

Bientôt la suite, à suivre.

Iain Levinson, Arrêtez-moi là ! Chez Liana Levi.

2/2

On se situe au-delà d’une quelconque affaire pour découvrir la justice aux USA, essentiellement une affaire de gros sous. Si vous apparaissez pauvre et/donc présumé coupable, vous aurez un avocat qui fera le minimum syndical, et encore !

Par contre si vous êtes victime d’une erreur judiciaire , les meilleurs avocats accourent pour faire monter les enchères des « réparations » qui vous sont dues, et partager avec vous le pactole.

La vérité importe peu, seule compte la négociation. Tout le monde se satisfait de cette situation et les medias comme les séances du tribunal vous donnent un rôle à jouer. Qui le joue bien conquiert le jury et le public.

J’ai toujours été sceptique sur le motif de la rédemption, type « j’ai rencontré Dieu dans la prison », mais aux Etats-Unis, ça paie.

Au passage, Levinson évoque la justice rapide qui, sur ordre des banques, vous exproprie illico de votre maison, forcément au-dessus de vos moyens, puisque vous n’en payez plus les traites !

Je recommande ce livre : il évite le mélo, le couplet kafkaîen, et la surcharge polémique pour trouver le ton juste :

On s’amuse de certains raisonnements criminels à « décharge »;

Citation :

« Je n’ai tué personne jusqu’à trente et un ans. J’ai tout gardé à l’intérieur pendant trente et une années. Ça été dur. Pour quelqu’un comme moi, c’est un exploit. Personne n’en a fait état au procès »

On note les dysfonctionnements les plus flagrants : pressions de la police sur des « témoins » douteux et vulnérables (en échange « d’allègements de peine »), l’acharnement d’un procureur élu qui veut rester populaire avec un coupable sur mesure. Rien de tel qu’un fait divers juteux, aux « States » comme ici, ils servent à faire des lois, sans que l’équité y trouve son compte.

De plus, l’histoire, dont je n’ai rien dit, vous plaira.

Arrêtez-moi là !

rotko en ayant déjà très bien parlé je mets juste ce petit mot pour dire " heureusement qu'il y a l'humour " parce que tout de même tout ça fait froid dans le dos. Du jour au lendemain se retrouver sans rien, paria de la société, présumé coupable d'entrée de jeu et n'y rien comprendre, il y a de quoi se sentir comme un vulgaire pion.

J'ai passé un chouette moment et me laisserai probablement de nouveau tenter par cet auteur.

Iain Levison sera à mauves-sur-loire les samedi-dimanche 13 et 14 avril, avec bien d'autres "polardeux" de talent, comme le rappelle ]Fondu au noir à qui je dois ce petit extrait :

Quelqu'un a raflé tout l'argent, c'est sûr. Il y en avait tellement qu'il doit bien se trouver quelque part. La propagation de la prospérité du haut vers le bas s'est sans doute inversée. Les Américains ont perdu leur richesse goutte à goutte pendant qu'une succession de décisions inconsidérées permettait aux millionnaires de se tailler une part de plus en plus grosse. Les riches philanthropes, les Carnegie d'autrefois qui déploraient les difficultés des pauvres, ont été remplacés par une nouvelle race de millionnaire, le millionnaire-né qui ignore que la pauvreté existe. C'est chaque millionnaire pour soi.

(Iain Levison, Tribulations d'un précaire, récit, Liana Levi)