Asma Guenifi

Citation :

J'ai terminé le récit autobiographique de l'Algérienne Asma Guenifi. Je posterai un commentaire sur ce livre qui ne manque pas d'intérêt.

Merci beaucoup pour ta réponse Nicyrle..
 
Je suis intéressée par cette biographie d'Asma Guenifi et serais contente d'en savoir plus, quand tu pourras...
 
Belles lectures..
 
Bonne journée!  
 
 
 

Voilà voilà, j'arrive !

L’auteur, Asma Guenifi est née en Algérie en 1975. Arrivée en France avec ses parents et son petit frère en 1994, après l’assassinat de son frère aîné, elle vit aujourd’hui à Saint-Ouen. Elle est devenue psychologue clinicienne et psychanalyste. Elle a fondé l’Association des femmes euroméditerranéennes contre les intégrismes et elle est depuis 2011 la présidente de Ni Putes Ni Soumises.

Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère est son premier livre, un récit autobiographique, publié en 2011 par Riveneuve éditions, sélectionné pour le Prix Méditerranée 2013 des lycéens (attribué à La liste de mes envies de Grégoire Delacourt).

Ce livre d’un peu plus de 200 pages offre deux parties : « Algérie : terre de joie et de souffrance » et « France, terre d’accueil, terre d’exil ». Le moment charnière est évidemment la mort brutale du frère de l’auteur, Hichem, assassiné froidement par le FIS, à vingt ans, le 6 juin 1994, alors qu’Asma en avait dix-neuf.
La première partie remonte dans le temps et traite d’abord de ce qu’ont vécu son grand-père crucifié contre un mur par les Français, son père, rescapé de la guerre, devenu cinéaste engagé, sa mère, qui a lutté pour l’abolition du Code de la famille, inspiré de la loi coranique. Puis Asma Guenifi raconte comment dès l’âge de 14 ans, alors que sa famille s’était installée dans une cité paisible à Bachdjarah, elle a vu apparaître « des femmes voilées et des barbus 
qui voulaient nous enseigner le “véritable islam” par la séduction et la manipulation psychologique puis par la terreur »… L’auteur fait vivre cette emprise de plus en plus grande des Islamistes, la peur qui s’insinue partout, les changements soudains de tels ou tels voisins, les violences physiques et psychologiques contre les femmes, les menaces permanentes, les assassinats qui paraissaient uniquement destinés à terroriser.

Après la mort tragique du frère, des menaces planent sur toute la famille, le départ est inévitable, provisoire en principe. En fait, ce sera définitif. La vie en France fait l’objet de la seconde partie. L’auteur insiste sur la solidarité et l’aide de militants de gauche dont elle et sa famille ont bénéficié, en particulier à Saint-Denis où tous vivront plusieurs années. Elle peut reprendre des études et fait son chemin tout en se lançant à son tour dans une action de militante. Car elle montre aussi son immense désarroi quand elle découvre qu’en France également les intégristes tant redoutés sont présents et poursuivent la même entreprise d’endoctrinement et de terreur. Elle fait état en outre, et certains passages sont poignants, du racisme dont elle a souffert.

Tout le récit est clairement écrit en mémoire de son frère dont elle était très proche et de tous ceux qui sont morts injustement. Il n’est pas question de mettre en doute sa sincérité quand elle dénonce le terrorisme en action en Algérie puis en France ou ce qu’elle appelle l’aveuglement des pays occidentaux et des médias. Elle raconte une anecdote saisissante à propos de la désinformation concernant l’histoire de l’Algérie telle qu’elle lui a été enseignée à l’école en France, son indignation frémissante est perceptible.
Cependant, il me semble que la manière dont elle essaie d’analyser la situation en Algérie durant les années 80 a quelque chose d’un peu naïf, voire de manichéen. Je sais qu’elle était complexe et sans doute aujourd’hui encore ne savons-nous pas tout. Elle non plus, je crois.

Pour conclure, je dirai que, malgré des maladresses, ce petit livre m’a intéressée  comme témoignage de quelqu’un qui a vécu au cœur même du drame et milite pour qu'on n'oublie pas, pour qu'on respecte les femmes sans les considérer comme des êtres inférieurs. Mais il me laisse aussi sur ma faim...

-> Je l'ai déjà dit ailleurs et je le répète : la très mauvaise qualité de l'édition m'a franchement dérangée ; je crois bien être la première à emprunter ce livre à la bibliothèque, or, dès que je l'ai ouvert, les pages se sont détachées les unes après les autres ! Je vais rapporter une collection de feuillets et il faudra donc reconstituer l'ouvrage, c'est vraiment surprenant...  

L’auteur fait vivre cette emprise de plus en plus grande des Islamistes, la peur qui s’insinue partout, les changements soudains de tels ou tels voisins, les violences physiques et psychologiques contre les femmes, les menaces permanentes, les assassinats qui paraissaient uniquement destinés à terroriser. a écrit:

Nicyrle
j'arrête de lire des livres sur l'islam, momentanément. Cela me terrorise, on ne parle plus que de ça. Les gens inventent des scénarios catastrophes, il règne dans la presse et partout une ambiance délétère, étouffante. On ne peut plus discuter avec les gens sans qu'il soit question de : "ces communautés qui ne veulent pas s'intégrer", "ces arabes qui nous envahissent", "la France islamisée", j'en passe et des meilleures !
Il y a peu de personnes d'origine maghrébine à Bayonne, mais des africains bien intégrés, eux ne semblent pas avoir de problèmes, ici ils travaillent et accèdent aux logements sociaux neufs que le maire à faire construire depuis 3 ou 4 ans, ils se mélangent à la population landaise.
Depuis que j'habite ici, j'ai entendu plusieurs fois cette réflexion : "Il n'y a pas beaucoup d'arabes à Bayonne et autour, parce que les Basques ne sont pas faciles ! ils n'aiment pas que l'on vienne faire la loi chez eux ! alors ceux qui viennent en éclaireurs pour s'installer comprennent que ce n'est pas l'endroit ! ils le disent aux autres. Ceux qui sont intégrés viennent et pas les autres".

Ysandre, dans la phrase que j'ai écrite et que tu cites, il est question de ce qui se passait en Algérie, pendant ce qu'on a appelé la décennie noire, i.e. les années 80 et surtout 90, guerre civile qui fit des milliers de morts, de disparus, de personnes déplacées et d'exilés. Elle fait partie de l'Histoire avec un grand H et à ce titre, nous concerne tous.
L'intérêt du livre d'Asma Guenifi tient en partie au vécu de l'auteur, même si, à mon sens, il faut, comme pour n'importe quel témoignage d'ailleurs, prendre avec précautions le sien pourtant sincère et souvent poignant.
Ainsi, le titre Je ne pardonne pas aux assassins de mon frère est une réponse à la loi algérienne dite de "réconciliation nationale" (Bouteflika - 1999), dénoncée par l'auteur - et on peut la comprendre -
parce qu'elle "empêche une réparation psychologique par la justice".
On trouve sur Wikipédia un résumé de ce qui s'est passé, avec les hypothèses et les obscurités mais là encore, sans doute faut-il l'aborder avec circonspection. Personnellement, je lis, je cherche à m'informer et je m'abstiens de tout jugement, bref... je doute en permanence !

je doute en permanence ! a écrit:

Nicyrle
moi aussi !
J'avais bien compris, ma Nic, mais cela m'a ramenée à ce qui se passe dans le monde et ici.