Des amis Baek Nam-Ryong, actes sud
Voilà le premier livre traduit en français, venant de Corée du Nord.
La littérature, comme le cinéma de Corée du Nord, sont très marqués par l'idéologie maoïste, mais depuis peu une ouverture se dessine: des livres paraissent, qui ne sont pas uniquement des éloges de dictateurs en place, même s'ils reflètent toujours une pensée politique dans la ligne des dirigeants.
Des amis, est donc une opportunité de découvrir une société qui est encore très fermée à l'Occident. La valeur littéraire du livre est discutable, selon nos critères d'élégance de style, d'originalité. Le style est lourd, rigide.La construction cependant est intéressante. Il est bien possible qu'une partie des conventions littéraires coréennes m'ait totalement échappé.
Il y parfois des phrases sur la pluie, la nature, qui semblent décalées par rapport au reste du texte, mais qui correspondent peut être à une symbolique inconnue d'un esprit occidental.
Un juge doit statuer sur une demande de divorce. Il va donc mener une enquête auprès de chaque époux, sur leur motivation, puis dans leur environnement de travail , puis dans le voisinage. Cette enquête est entrecoupée de flash-backs sur la propre évolution du couple du juge, ainsi que sur l'évolution d'un couple dont il a prononcé le divorce plusieurs années auparavant.
Le problème récurrent de chaque couple est la difficulté pour les hommes à assumer une vie solitaire, alors que leurs femmes partent travailler loin de la maison pendant des périodes assez longues. Ils doivent alors supporter non seulement la solitude, mais les tâches ménagères, ce qui est incompatible avec le statut traditionnel d'homme en Corée du Nord.
l'autre difficulté dans chaque couple, est la différence d'évolution sociale entre les époux. L'un des deux, tantôt l'homme, tantôt la femme, accède à une vie sociale, culturelle plus élevée grâce à ses talents propres et à son travail, l'autre reste ouvrier ou paysan, le dialogue devient impossible.
Une des caractéristiques de la littérature en Corée du Nord, est son obligation "pédagogique". Un livre doit former l'esprit, donner une leçon de vie.
un extrait p.216:
le juge s'interroge sur un homme qui a des fonctions d'autorité, et qui a détourné des biens à son profit.
- Citation :
"Ce genre d'homme qui ne respecte pas la vérité absolue selon laquelle la technique est d'une valeur aussi grande que la vie pour le développement de l'économie nationale, comment a-t-il pu se placer à un poste administratif de la section technique en arborant un air si vain?!est ce qu'il sait que ses conditions de travail et son salaire sont le résultat des efforts d’innombrables ingénieurs et techniciens?!..."
Cette façon de penser, en replaçant l'homme dans ses liens avec la société toute entière, et les implications de ses actes vis à vis de cette société, me semble assez loin de notre façon individualiste, mais pas inintéressante pour remettre en question nos propres perspectives.