Stephen Baxter, Evolution

Il y a des films où je regrette plus que tout d'avoir vu la bande annonce (Truman Show par exemple) et des livres où c'est le quatrième de couverture que je maudis. C'est souvent le cas en SF où l'on vend beaucoup les livres sur leur "concept fatal" ; du coup on entre dans leur univers plus tout à fait innocent. Parfois ce n'est pas trop gênant, soit parce que le concept fatal en question n'est que le 1er maillon d'une longue série à se renverser la tête et ouvrir grand la bouche (en faisant bien attention d'avaler sa langue) soit parce que ce concept n'est qu'un prétexte pour l'auteur à exprimer des choses plus abstraites, plus psychologiques que philoludiques. Mais bon, d'autre fois c'est bien dommage.

Ainsi dans mon idéal j'aurais aimé lire "Evolution" de Stephen Baxter sans connaître son fichu 4ème de couverture. J'ai dû me battre pour apprécier le livre à sa juste valeur sans être sans cesse dans une position d'attente. Je vais donc essayer d'éviter de vous faire le même coup en vous le présentant. J'ai conscience que du coup je serai un peu moins percutant.

Tout commence avec l'un des tous premiers primates, un purgatorius, ici baptisé "Purga". Elle vit il y a 65 millions d'années, elle se balade à travers des excréments de dinosaures, la vie est dure pour elle. Et pour nous aussi car, en évitant de sombrer dans l'humanisation facile à la Bambi, Baxter rend ce personnage follement attachant. Il nous la présente comme notre plus vieille ancêtre, nous lie à elle, à ses actions, en faisant ressortir ce que nous avons de plus primitif. Nous allons vivre avec elle l'un des jours les plus traumatisants pour la Terre, celui où s'écrasa la comète...

Et puis nous quittons Purga, nous sautons 2 millions d'années pour retrouver Plesi et puis nous quittons Plesi, nous sautons... Ainsi de suite nous allons voyager à travers les ères pour faire un petit bout de chemin avec un membre de notre longue lignée, son corps, son quotidien, la Terre qu'il foule, les enjeux de son temps...

Et c'est beau. On en ressort avec un portrait renversant et émouvant de notre lignée d'espèces ; on peut aussi être amené à réfléchir sur notre place dans cette lignée ; ou pas.

Après, c'est de la "hard science" (je trouve ce terme débile, si Jules Verne est un pionnier de la science fiction ne faisait-il déjà pas de la hard science à son époque ?), il y a beaucoup d'explications scientifiques sur tout ce qui évolue, les termes sont parfois très complexes, surtout avec les dinos ; mais c'est toujours amené de sorte que l'on comprenne, que la fiction ne soit pas noyée par le savant.

Sincèrement, c'est l'une des meilleures machines à rêver, apprendre, penser que j'ai eu entre les mains.

Je n'ai pas encore lu d'autres livres de cet auteur, si vous avez des suggestions...

Evolution : 2 tomes, l'un chez presses de la cité, 750 pages; et l'autre chez pocket, 540 p.

A ce que je vois, il fait des séries, les enfants de la destinée 3 tomes presses de la cité.

De ce que je sais, pour Evolution ils ont scindé l'histoire en 2 tomes pour l'édition poche. Quant aux "enfants de la destinée", je crois que c'est sa première série et qu'il y creuse les thématiques présentes dans Evolution. Je vais sûrement lire ça. Ses oeuvres antérieures, plus dans le registre spatial, je n'ai par contre aucune idée de ce qu'elles donnent

Excellent résumé néélidjhä, ça file envie de le lire...
Et je pense immédiatement à un roman d'Olaf Stapledon (1886-1950) que j'ai lu il y a une bonne vingtaine d'années et qui m'a beaucoup marqué paru chez Denoël dans la collection Présence du Futur n°155 (aujourd'hui disparue):
Les derniers et les premiers. (1930/Olaf Stapledon - 1973/Denoël)
Un texte qui se perd dans les limbes de mon passé et que j'aurais du mal à vous résumer. Mais que j'ai toujours, je vous livre la 4° de couverture (à mon avis intelligemment rédigée!):

Deux mille millions d'années!
Tel est l'âge de l'humanité qui va bientôt disparaître.
Mais avant cet anéantissement, un homme de ce lointain avenir transmet à un homme de la génération d'Einstein l'histoire de son espèce aujourd'hui moribonde. Guerres monstrueuses, invasions, cataclysmes, tantôt naturels, tantôt suicidaires, jusqu'à la catastrophe finale, l'explosion du Soleil en nova, qui, paradoxalement, peut donner une nouvelle chance aux hommes.
Fresque immense que seule pouvait offrir une imagination aussi riche et aussi puissante que celle d'Olaf Stapledon.

Et deux de plus sur ma liste des à lire ou à relire...

Sincèrement, cela a l'air d'être très si tentant que je vais me laisser tenter, merci beaucoup !

Pour ma part, je trouve Stapledon illisible.

Belle critique, constructive. On avance...

un extrait:
Les Premiers Hommes honorèrent alors la science par-dessus tout. Non pas tant parce que longtemps auparavant, quand l'espèce humaine était à son apogée, ç'avait été en ce domaine qu'elle avait pensé avec le plus de rigueur, ni parce que les hommes avaient pu acquérir quelques connaissance de la nature du monde grâce à elle, mais plutôt parce que l'application des principes scientifiques avait révolutionné leur vie matérielle. Les doctrines autrefois fluides de la science commencèrent à se cristalliser en un dogme fixe et complexe, mais l'inventive intelligence scientifique s'appliquait encore brillamment à l'amélioration des techniques industrielles et subjuguait ainsi complètement une race en laquelle avait décru la pure curiosité intellectuelle.
Les derniers et les premiers - Chapitre 4: Une planète américanisée, partie II:prédominance de la science (p99)

bon ! évitons les condamnations absolues quand le jugement est relatif.
j'ecoute, je ne connais ni stapledon ni Baxter

Citation :

il y a beaucoup d'explications scientifiques sur tout ce qui évolue, les termes sont parfois très complexes, surtout avec les dinos

Ce que je craindrais chez Baxter, d'après cette citation, c'esteffectivement lepoids ou l'importance relative des explications dites "scientifiques". En général ça plombe les récits et les lecteurs ne sont pas demandeurs. Mais c'est une parenthèse.