Mon barman et son monstre par Robert Bloch Fiction n°55 de juin 1958
Dans le bar où Fast Mickey est barman, la clientèle est composée de gars vraiment distingués : des professeurs, des toubibs pour dingues et même des vendeurs de voitures d’occasion. Tout à coup, le speaker à la radio se met à hurler : « L’objet non identifié qui volait au dessus de la ville est maintenant identifié, il s’agit d’une véritable soucoupe volante…..Elle vient d’atterrir au coin de Central Park et un passager est en train d’en sortir…..la créature a trois mètres de haut, elle est couverte de poils verts et elle a de nombreuses tentacules… Un comité d’accueil et trois voitures de police armées vont à sa rencontre….Elle écarte le comité d’accueil avec un tentacule et les voitures de police avec un autre. La foule se sauve en hurlant »
Sigmund le Subconscient, un des toubibs pour dingues habitué du bar, décide que les autorités s’y prennent mal pour régler le problème du contact des races et décide d’apporter son aide. D’autant que l’atterrissage a eu lieu à deux rues de distance du bar….Et la porte s’ouvre, ce n’est pas le monstre mais Sigmund qui revient avec les vêtements déchirés, les lunettes cassées, et la moitié de son bouc. Il annonce que le monstre vient d’éventrer un immeuble de quatre étages, et qu’il est en train de le démolir !.Comme s’il cherchait quel que chose.
Et la porte s’ouvre. C’est la créature. Elle est bien comme l’a décrite le speaker à la radio. « Elle a aussi des yeux qui lui pendent de la tête, elle glisse, elle se tortille, elle ondule pour avancer. Elle est vraiment horrible. On dirait Elvis Presley avec des tentacules….Mais Fast Mickey, le barman, reste ferme comme un roc. Il n’a pas peur, il regarde le monstre et écoute les bruits qu’il fait. ».. Puis il remplit un verre et le lui tend ; refusé !..Il ouvre le tiroir-caisse, prend un poignée d’oseille et la pose à coté du verre : refusé !..Il va chercher l’entraîneuse et la pousse vers son horrible client : refusé !..Soudain Fast Mickey a un grand sourire, s’approche du monstre, le prend par un tentacule et l’entraîne vers une porte au fond de la salle par où ils disparaissent.
Quelques instants après le speaker annonce que le monstre est remonté dans sa soucoupe volante et est reparti. Dans le bar, c’est la liesse ; on félicite le barman pour avoir sauvé le monde ! Il s’explique : « Parce que je suis barman et pas psychiatre, dit-il, je sais que tous les gens qui entrent dans un bar, il y a seulement quatre choses dont ils peuvent avoir envie. Si ce n’est pas un verre, si ce n’est pas de l’argent, si ce n’est pas une femme, alors il faut bien que ce soit l’autre chose. Vous voyez, c’est simplement une question d’élimination…. »