Ayerdhal

Ayerdhal, L’homme aux semelles de foudre, collection quartz noir.

Pas enthousiasmé par ce livre qui trame sur les problèmes de l’énergie une intrigue policière avec une enquête, des scènes d’action, des piratages informatiques etc…

Je crois qu’i1 faudra juger Ayerdhal sur un des livres que conseille
le cafard cosmique

Etoiles mourantes, Ayerdhal et Dunyach

Parfois, il y a des livres que je suis soulagée d'avoir lus. Des pépites qui valent toutes les fausses pistes sur lesquelles je me suis égarée, reposée, distraite ou énervée. Bref, des ouvrages qui sont des rencontres éclairantes. Et Etoiles mourantes est l'un de ceux-là.

Alors voilà...

Dans un tout petit Univers, tout moche et tout froissé qui, par un effet d'optique, paraît immense, vivent des AnimauxVilles, et une humanité divisée en rameaux: les Mécanistes, les Originels, les Organiques, et les Coordonnés. Ce sont les AnimauxVilles qui ont souhaité et rendu possible la Diaspora, pour que chaque rameau puisse se développer. Et c'est ce que les Rameaux ont fait, chacun de son côté. Sans ignorer l'existence des autres, sans lutter contre eux, mais chacun replié sur son monde, ses valeurs, sa société poussée au bout de sa logique, à un point de sophistication incroyable. Quatre modèles politiques, sociétaux, culturels. Et quand une étoile meurt, la tradition veut que les AnimauxVilles invitent les Rameaux à venir assister à sa fin, pour les Retrouvailles. Au momnet où commence le roman, ce ne sont que les deuxièmes retrouvailles, depuis la diaspora - les étoiles ne meurent pas très souvent. L'occasion (théorique) de se confronter, d'échanger, de ne pas se perdre totalement de vue. Ou de s'affronter.

Des mondes complexes et fragiles, menacés par un bouleversement imminent et irréversible: la trame est classique, et habilement palpitante. Le suspense repose non seulement sur ce que la lectrice ne sait pas, mais aussi sur l'imprévisibilité des événements à venir: une réaction en chaîne est lancée, dont personne ne peut prédire le résultat.

De l'histoire, je n'en dis pas plus: je laisse les futurs lecteurs découvrir ce que sont exactement les AnimauxVilles, et les Rameaux. Dunyach et Ayerdhal n'aiment pas trop, apparement, les levers de rideau et les grands effets de manche: pas de description cinématographique donc, mais un Univers construit par petites touches, dans un roman où chaque page apporte son lot d'informations. Evidemment, on se sent un peu perdu au départ, mais le mystère né des non-dits sied bien à l'intrigue, bien mieux que ne l'aurait fait un rythme description/action plus traditionnel. Par ailleurs les auteurs ont développé à partir de leurs recherches scientifiques, notamment en astro-physique, un regard à la limite de la métaphysique, poétique et vertigineux: c'est doublement gratifiant pour la lectrice peu au point en sciences: intéressant et crédible sans être ennuyeux. Quant à l'écriture... c'est une collaboration parfaitement réussie. Je n'ai pas l'impression que les auteurs se soient clairement divisé le travail. Je ne les connais pas assez pour reconnaître leurs pattes respectives, mais il me semble qu'il y a une intertextualité très étroite, omniprésente et cohérente.

Sur le fond, ce roman met en scène une réflexion réellement profonde et travaillée sur quatre mondes, et leurs points de jonctions. Au départ, un double postulat:
- l'isolement, qui permet aux auteurs d'explorer le développement de quatre organisations sociales et politiques: ici, pas d'étude des moyens et des modalités d'une transition révolutionnaire, l'histoire commence longtemps après, au moment où chaque société se trouve, sinon au bout, du moins à un sommet (problématique) de sa logique utopique;
- les avancées scientifiques que permet la fiction (eh oui, c'est ça la science-fiction!), avancées qui servent pas de béquilles au récit, mais à pousser chaque logique dans ses derniers retranchements.

Au-delà, Ayerdhal et Dunyach s'interrogent sur la validité de telles expériences, réalisées dans de quasi-conditions de laboratoire: qu'advient-il de ces sociétés, de ces modèles, quand ils sont confrontés les uns aux autres, quand leurs logiques internes les poussent à s'affronter? que devient la plus ouverte des sociétés quand il lui faut intégrer des éléments qui remettent en question son équilibre? quelle est la validité de sa tolérance affichée quand elle répugne à admettre l'humanité d'hommes issus d'une culture différente?

Si les auteurs ne peuvent s'empêcher de laisser filtrer leurs préférences (faciles à partager, en ce qui me concerne), ils sont malgré tout assez lucides et exigeants pour pointer les incohérences - notamment l'isolationnisme et la xénophobie latente - qui, à terme, ne peuvent que ronger ces structures de l'intérieur et provoquer leur effondrement.

Sans didactisme, sans angélisme, Dunyach et Ayerdhal réfléchissent sur le papier, dans la meilleure tradition SF. Et moi je viens de dénicher un autre des livres de ma bibliothèque idéale.


Ce roman est un livre voyageur

J'ai été dèçu par l'homme aux semelles de foudre que je n'ai pas dû terminer.

l'as-tu lu ? Ayerdhal a une excellente reputation dans les milieux SF et c'est pourquoi je m'interroge sur ce livre - ou sur ma lecture !

Non, je n'ai pas lu L'homme aux semelles de foudre. Par contre, j'ai été totalement enthousiasmée par Chroniques d'un rêve enclavé, anciennement édité sous le titre de Parleur, je crois.

Ses livres sont, pour ce que j'en sais, assez inégaux. Moi j'ai eu de la chance, je suis particulièrement bien tombée. Ceci dit, j'ai pour habitude de faire confiance au CC. Je ne suis pas forcément d'accord avec eux, mais leurs chroniques sont toujours intéressantes et bien pensées.

Citation :

Ayerdhal et Dunyach s'interrogent sur la validité de telles expériences, réalisées dans de quasi-conditions de laboratoire

Je te cite ekwerkwe car je crois que tu tombes juste : la S.F. plus qu'aucun autre genre littéraire est un laboratoire, un lieu expérimental "sans complexe" permettant, plus ou moins pertinemment, d'explorer une hypothèse (je vais peut être créer un fil sur ce sujet).

D'Ayerdhal je connais Transparence. Voici comment le résume le site Le Cafard Cosmique : Ann X ne laisse aucune trace derrière elle. Pas d’objet, pas d’empreinte. Pas même un souvenir dans la mémoire de ceux qui l’ont croisée et sont encore vivants pour ne pas se le rappeler. D’ailleurs Ann X est bien capable, si l’envie lui en prend, de s’assoier à vos côtés à la terrasse d’un café sans même que vous remarquiez sa présence. Ann X - mais est-ce bien son nom ? - est transparente. Et le plus surprenant pour Stephen, le jeune psy d’Interpol lancé sur cette absence de traces, c’est qu’en réalité, elle existe.

Et d'ajouter ce qu'en dit Ayerdhal dans un interview sur le même site : "Naïs [Ann X] est capable de manipuler les signaux extérieurs qui font que les autres nous identifie, les signaux visuels, auditifs et olfactifs, les façons de se tenir, de marcher, tout ce qui fait que l’on nous reconnaît toujours".

Transparence serai plutôt un polar, réunissant enquête, complot (C.I.A, N.S.A, Interpole sont de la partie), triturage de neurones, référence aux conflits en cours (mais je le laisse en S.F. histoire de ne pas ballader l'auteur partout ). Très dense aussi bien dans l'intrigue que dans l'aspect psychologique, Ayerdhal nous conte (mélant action et pause réflexive) le monde actuel et les enfants qu'il ne veut assumer comme Michel le S.D.F., premier à faire référence à la transparence qui conduit les individus à ignorer ce qu'ils ne veulent voir ou Ann X, victime de multiples viols durant son enfance.

C'est fin, juste, complexe, et pour encore te citer ekwerwere : "Parfois, il y a des livres que je suis soulagé(e) d'avoir lus. Des pépites qui valent toutes les fausses pistes sur lesquelles je me suis égaré(e), reposé(e), distrait(e) ou énervé(e). Bref, des ouvrages qui sont des rencontres éclairantes."

L'idée de transparence vient de Roland C Wagner.
Ce lien renvoie à sa production et à la balle du néant sur GDS*

Voici son site perso

Citation :

Mon nom est Temple Sacré de l'Aube Radieuse, mais vous pouvez m'appeler Tem. Pour cent euros par jour plus les frais, vous pouvez aussi louer mes services. Je suis détective privé. Mon atout majeur ? Le Talent de transparence qui me permet de passer inaperçu. Mais qui m'oblige aussi à des efforts vestimentaires pour ne pas passer inaperçu.

Roland C. WAGNER, Les Ravisseurs quantiques, L'atalante.

A lire aussi absolument, Demain une Oasis, autre fabuleux roman d'Ayerhal.

Je vous recopie pas toute ma chronique hein, je me permets juste de vous filer le lien

Une bonne petite série que celle des Cybiones, variation d'une même héroïne sur quatre romans. Elyia est une cybione, sorte cyborg en plus humain (je ne retrouve plus exactement la terminaison). Elle est celle que l'on envoie pour liquider les affaires les plus foireuses de l'agrégat d'Ender, un empire politico-commercial dont on apprend au fur et à mesure des romans la nature bien crapuleuse.

chaque volume présente un monde, un thème, et Eliya qui retrace sa propre histoire et recherche un peu plus d'humanité au fond d'elle. Car à chaquie mission, retour au bercail, de gré ou de force, quitte à la ressusciter.

On quitte au fur et à mesure des romans le thriller cyberpunk pour se rapprocher des préoccupation du hippie Ayerdhal : spiritualité, auto-détermination, révolte contre le totalitarisme marchand, etc.

J'en trace un portrait bien rapide mais ces romans se lisent tout seul.

Je reviens sur Transparences d'Ayerdhal. Un commentaire a déjà été fait, je ne vais sans doute pas y apporter grand chose de plus. Ce roman a obtenu le Grand prix de l'imaginaire et le Prix polar Michel Lebrun.


Nous sommes en 1998 à Lyon dans les locaux d'Interpol où Stephen Bellanger criminologue québécois vient d'entrer en service. En compulsant d'anciens dossiers traitant d'assassinats multiples, il met à jour le cas Ann X ( ou Naîs ) Cette jeune

femme serait responsable de la mort de près de 1000 personnes à travers le monde. Tout a commencé alors qu'elle avait 12 ans par le meurtre de ses parents et de deux de leurs amis, meurtre au sabre. Ann X a subi pendant des années des sévices sexuels.

Naîs ne laisse aucune trace, nulle caméra ne peut restituer ses traits, elle ne laisse aucun souvenir dans la mémoire des gens...tout d'elle semble flou. Michel, l'ami SDF de Stephen parle alors de transparence.

Petit à petit Stephen comprend que le cas Ann X couvre des manigances politiques par agences interposées FBI, CIA, NSA.

De Naîs voilà ce que Bellanger dit : "Elle n'apprend pas à se fondre, elle apprend à disparaître. Plus précisément, et c'est ce que montrent les croquis de sa prof, elle apprend non pas à modifier mais à effacer l'image que les autres se font d'elle."

Finalement l'on s'attache ( ou presque ) à Naîs tout comme Bellanger et l'on se sent révulsé par les manigances politiques.

Il y a une suite à ce roman : " Résurgences"

[g]L'Histrion[/g] (J'ai lu[\i], 1993) et sa suite [g]Sexomorphose[\g] ([i]J'ai lu[\i], 1994)

Je reprend pour introduire cette présentation en quatrième de couv' de [g]L'Histrion[g] : "Dans cette galaxie grouillante d'Etats et de communautés aux intérêts si divergents, Genesis, la créature-monde, essaie de fédérer l'humanité sous la barrière du Daym. Pour seul outil, il dispose de l'Histrion, dont l'unique fonction est de jouer les trouble-fête. Et pour Histrion, il a choisi un/une sexomorphe, individualiste farouche, qui déteste le pouvoir et n'a pas été consulté(e) sur le rôle qu'on veut lui voir tenir."

Difficile de savoir par quoi commencer tant ces deux romans sont denses.

Nous sommes dans le space opera, mais il ne faut pas s'attendre à un match de ping pong laser mais plutôt à considérer cet espace (aux deux sens du terme) comme un moyen de confronter de manière synchronique des régimes politiques aussi divers qu'une tyrannie d'obédience moyenâgeuse, un "régime" anarchiste, une démocratie, un autre faisant penser à une fourmilière version techno-futuriste et ultra-rationnelles, et j'en passe.
Le mode de chaque régime y est décrit de manière plutôt complète, et ce d'autant plus à travers leurs frictions mutuelles au sein de l'espèce d'ONU intergalactique qu'est le Daym.

Au sein des cet univers se côtoient plusieurs espèces (humain, cyborg, robot, télépathe, et autres...) chacunes associées à tel ou tel régimes. De même que pour les régimes politiques, l'histoire de ces espèces y est narrées.

Et puis, il y a Aimlin ou Aimline, le/la protagoniste, hermaphrodite sexomorphe (pouvant changer de sexe à volonté), co-leader d'un groupe ayant défié le pouvoir pour un monde plus libre/juste sur Terre. Individualiste quand cela l'arrange... Chargé-e malgré elle/lui de mettre un brin de chaos au sein du Daym.

Voilà pour les grandes lignes.

A travers cette trame bien --trop ? -- complexe, sont interrogés pêle-mêle les systèmes politiques (force et faiblesse), l'identité (rapport d'espèce et rapport de genre via Aimlin-e), la technologie et la rationalité exacerbée, l'impossibilité (et le danger) d'un ordre stable, le rapport homme-machine, et j'en passe.
On pourrait peut-être penser à un [g]Dune[/g] [i]bis, d'autant plus qu'Ayerdhal fait clairement référence dans sa préface à [g]L'Histrion[/g] à l'héritage de Frank Herbert et sa volonté d'écrire un roman lui faisant hommage. Je ne m'avancerai pas à en donner un avis, n'ayant pas lu un seul roman du cycle de [g]Dune[/g].

Dans tous les cas, les réflexions multiples qu'on y croise jusqu'à plus soif font de ces deux romans un concentré d'intelligence, pour lesquels j'ai bataillé à tout saisir tellement ça foisonne à chaque page. Une histoire complexe donc (faisant régulièrement référence à des événements s'étant parfois déroulés plusieurs millliers d'années avec le temps du récit) donnant lieu à des interrogations tout aussi complexes. Et tout cela en deux romans de moins de 400 pages chacuns.

A déguster, y'en aura pour tout le monde