Nicolas Bouvier

Nicolas Bouvier, Chronique japonaise, Payot.

"esquisses ou estampes".

La première partie retrace les différentes étapes de l'incomprehension de l'Occident pour le Japon. Les protagonistes en font foi, et certains jésuites, interessés à convertir à leur cause les classes dirigeantes, malgré leur souplesse d'esprit bien connue, accumulent les gaffes. Pas facile de "pénètrer l'âme japonaise", comme se le promettent naïvement en 15 jours des touristes americaines ! le récit est parsemé de textes anciens ou modernes, tel ce recit d'un Japonais à la recherche de sa famille, au lendemain des bombes de 1945.

Le voyageur note ensuite ses impressions de route, sans rechercher le pittoresque. D'un style dénué d'apprêt, il livre des facettes du quotidien, ce qu'il voit ou suppose, sans oublier des temps morts dans les gares, ou des nuits tristes dans des auberges de "l'île sans memoire".

On suit ce voyageur, on s'interroge, on s'étonne ou on s'ennuie, retenant quelques pages par-ci par-là, sans être déçu ni pleinement convaincu.

Bien sûr.... Nicolas Bouvier ne se résume pas à son voyage au Japon et à ce qu'il en a écrit. Je n'ai d'ailleurs pas aimé Chronique Japonaise.

Et comme je le disais dans un de nos jeux, il n'est pas un romancier, j'aurais peut-être dû préciser : encore moins un auteur ?
Tout simplement, un homme, vivant, dans un siècle complexe (ou compliqué ?) qui a écrit, et qui m'a simplement aidée à comprendre (un peu) le monde dans lequel je vis. Souvent, et ce soir tout particulièrement, cela me suffit !

Oui Chronique japonaise a de bons moments - et d'autres. Que conseillerais-tu pour connaître et apprecier Nicolas Bouvier ?

Nicolas Bouvier. L'Œil qui écrit, de François Laut, chez Payot



une autobiographie de l'homme et de l'écrivain.

Citation :

«C'est quelqu'un qui écrivait lentement, qui travaillait beaucoup, qui était extrêmement exigeant, explique le biographe. Il avait aussi une certaine tendance à l'autodestruction. Dans ses voyages aussi, il manifeste un engagement physique violent. Il va au bout de lui-même.»

L'Usure du monde textes et photos de Frédéric Lecloux - préfacé par Eliane Bouvier - éd. Le Bec en l'air.

L'usure du monde, c'est une variante photographique de l'usage du monde de Nicolas Bouvier.

En 2004-2005, le photographe Frédéric Lecloux refait la route de l'écrivain, en direction de l'Afghanistan : Croatie, Serbie, Turquie, Iran, Pakistan etc...

le monde n'est plus ce qu'il était, pour Nicolas B.

autre ouvrage sur des photos de l'itineraire de nicolas Bouvier :

Eric Rechsteiner, Photographe, auteur d'Indigo street, sur les routes de Nicolas Bouvier, ed de la Boussole, 2005.

pour la presentation d ces deux ouvrages de Lecloux, et de Reichsteiner voir ici.

L'usage du monde.

Années 50.
Traversée de la Yougoslavie, Turquie, Iran...

Et ce qui me frappe en lisant ce roman, c'est que dès cette époque, Nicolas Bouvier faisait échos des problèmes politiques et ethniques de notre époque.

Sa traversée de la yougoslavie sera pour lui l'occasion de voir le fort nationalisme qui existe entre les yougoslaves, les serbes et les croates. Des prémices du nationalisme aboutissant à la guerre que l'on connait maintenant et au déchirement de ce pays qui à l'époque était en pleine construction après la guerre mondiale...

Sa traversée de la Turquie et de l'Iran pose le problème des kurdes qui n'ont pas de pays défini et qui se partagent entre les différentes frontières sans être réellement acceptés quelque part...

Chronique japonaise

Dans la première partie de son ouvrage, Nicolas Bouvier retrace à grandes lignes une histoire du Japon. Le style est délié et alerte; humour et drôlerie mettent une certaine distanciation par rapport aux faits et donnent une image vivante mais peut-être un peu superficielle. Les parties suivantes du livre relatent les impressions qu’a retirées l’auteur de ses divers séjours et années passées dans ce pays entre 1956 et 1970 : Tokyo ; Kyoto ; une fête villageoise ; l’île de Hokkaïdo. On y retrouve le Japon vu de l’intérieur et Bouvier nous en restitue des morceaux épars, quelquefois avec malice mais aussi avec ironie, pas toujours partial mais à d’autres moments complice, souvent insolites. Il est intéressant de connaître ces « vues » d’un Japon loin des clichés touristiques. Cependant ces instantanés m’ont laissée un peu sur ma faim et je ne suis pas certaine que notre voyageur ait été toujours en osmose avec ce pays.

Quant à moi, je lis L'usage du monde.

Et je me faisais une réflexion globale sur le charme de ce livre. L'auteur semble découvrir, explorer et se frotter à la véritable altérité.

Sauf que cette vision date un peu.

En d'autres termes, pouvons-nous ressentir, aujourd'hui, lors d'un voyage, les mêmes sentiments de dépaysement, de nouveauté, de différence alors que notre mondialisation nivelle tout, uniformise tout, aseptise tout.

Bon, certes, si vous partez dans les zones désertes ou montagneuses, vous serez propulsés vers cet "ailleurs" qui laisse rêveur.

Mais l'humanité ne tend-elle pas à perdre ses particularismes ?


Je suis un peu jalouse de Bouvier, car si je suivais la même route que lui, je n'y verrais plus la même chose.


A part cela, j'apprécie ses réflexions générales sur la vie...

J'ai beaucoup apprécié la première partie des chroniques japonaises.

Je suis en cours de lecture de son second séjour, mais il se pourrait bien que je ne lise pas la suite.

Pour sa première partie en tout cas il s'agit là d'une introduction assez bien documentée, avec quelques références historiques, pour approcher l'histoire du Japon, ses mythes fondateurs (Amaterasu, déesse du soleil, le shintoïsme), la place de l'écriture, l'arrivée tardive de la religion bouddhiste, les grandes guerres avec la Chine et la Corée, l'organisation sociale, économique et la psychologie de ses habitants si particuliers.

Au travers toute cette chronologie et ce panorama assez complet, Bouvier nous permet de comprendre mieux pourquoi, aujourd'hui, leur culture et leur puissance économique rayonne aussi vastement dans le monde.

Dans la seconde partie, je trouve qu'il restitue bien sa condition d'étranger dans sa description du quotidien "frugal" qu'il traverse lors de son premier séjour d'un an, même en se pliant aux coutumes locales (les bains !), ce qu'il développe dans la première partie à propos de la grande fermeture des japonais (enfants du soleil, donc divins) aux autres peuples.