Edouard Levé

L'auteur d'« Autoportrait » chez P.o.L., n'ecrira plus. Il pratiquait "la phrase blanche" et "la photographie neutre"
Il laisse des titres et des photos, et des admirateurs.

Dans la lignée de je me souviens de Pérec, Autoportrait aligne des phrases comme autant de contours de lui-même et de son lecteur.

Edouard Levé, Oeuvres chez P.O.L
"Un livre décrit des oeuvres dont l'auteur a eu l'idée, mais qu'il n'a pas réalisées". c'est une invraisemblable accumulation de projets, d'idées qui recouvrent tous les domaines de l'art contemporain, de la littérature aux arts plastiques, à la vidéo et la photo.

Edouard Levé, Angoisse;, chez Phileas Fogg.

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Citation :

Dans les vues qu'il a prises d' Angoisse, petit village de la Creuse, ce sont les stéréotypes de l'univers quotidien qui sont capturés; panoramas, objet, morceaux d'architecture et qui constituent comme un catalogue du quelconque. Seul le nom du village, omniprésent, revêt l'ordinaire d'un humour grinçant.

Amérique chez Léo Scheer, photos de villes americaines homonymes de célébres cités : Florence, Berlin, Jericho, Oxford, Stockholm, Rio, Delhi, Amsterdam, Paris, Rome, Mexico, Lima, Versailles, Calcutta, Bagdad

Ici un entretien qui explique ses series photographiques et sa manière d'ecrire :

Citation :

En photographie, je prends un sujet concret, que je traite en le reconstituant de manière abstraite. C’est une abstraction descriptive : en simplifiant l’image, je la rends ultra lisible.

Dans l’écriture, c’est le contraire: je décris précisément des choses qui n’existent pas, des œuvres dont j’ai eu l’idée mais que je n’ai pas réalisées.

Pourtant, il y a une ressemblance: mon écriture est blanche, ma photographie est neutre. Je gomme tout ce qui dépasse, pour obtenir une forme aussi simple que possible. Je m’arrête de simplifier lorsque ajouter un coup de gomme ferait disparaître le trait minimum. Jusqu’à un certain point, je postule que moins l’auteur en dit, plus le lecteur imagine.

quelques photos




Édouard Levé reconstitue des scènes contemporaines inspirées d’un choix de chefs-d’œuvre du musée des Beaux Arts de Tours. Il choisit 7 œuvres du musée, déniche 7 lieux différents dans la ville, puis demande à des habitants de rejouer la situation décrite dans le tableau.

Résultat : des reconstitutions photographiques qui restituent l’essentiel de la composition, du geste... mais sont "transférées" dans un autre espace, dans un autre temps.

Edouard Levé, Suicide, chez P.O.L. -

Edouard Levé, écrivain, photographe, artiste, évoque dans ce livre le suicide d’un ami voici plus de vingt ans. Il s interroge l’acte avant de se suiider lui-même le 15 octobre 2007.

Citation :

« Cet égoïsme de ton suicide te déplaisait. Mais dans la balance, l’accalmie de ta mort l’emporta sur l’agitation douloureuse de
ta vie. »

Reconstitutions chez Philéas Fogg

Dans les vues qu'il a prises d'Angoisse, village de la Creuse, ce sont les stéréotypes de l'univers quotidien qui sont capturés ; panoramas, objet, morceaux d'architecture et qui constituent comme un catalogue du quelconque. Le nom du village, omniprésent, revêt l'ordinaire d'un humour grinçant.

la fin d'autoportrait chez POL /

Citation :

Quinze ans est le milieu de ma vie, quelle que soit la date de ma mort. Je crois qu'il y a une vie après la vie, mais pas une mort après la mort. Je ne demande pas si on m'aime. Je ne pourrai dire qu'une fois sans mentir :"je meurs". Le plus beau jour de ma vie est peut-être passé.

le début d'Autoportrait

Citation :

Adolescent, je croyais que La Vie mode d'emploi m'aiderait à vivre, et Suicide mode d'emploi à mourir.

Autoportrait d’Edouard levé, Chez POL


Il s’agit d’une suite de phrases où on reconnaît certains traits de caractère ou des confidences, ou des habitudes de l’auteur.

Mais il se garde bien d’y mettre de l’ordre, elles sont livrées en vrac, étonnantes, amusantes, cocasses, touchantes.

J’en ai relevé quelques unes, et je les ai groupées deux par deux, selon une logique que je ne dirai pas.

Citation :

Mes ongles poussent inutilement.

J’ai dit à cinq femmes que je les aimais, ce qui était vrai pour quatre d’entre elles.

Citation :

J’aimerais me faire hypnotiser par ma femme mais je ne suis pas marié.

J’aimerais voir des films accompagnés de musiques inappropriées, un film comique avec une musique gothique, un film pour enfants avec une musique d’enterrement, un film d’amour avec une marche militaire, un film politique avec une bande-son de comédie musicale, un film de guerre avec une musique psychédélique, un film pornographique avec une musique religieuse.

Citation :

La fille que j’aimais le plus m’a quitté.

Un de mes amis est mort.

Citation :

Enfant je regardais un tapis, comme, adulte, je regarde une peinture abstraite.

L’amour me donne d’immenses plaisirs mais me prend trop de temps.

J'ai lu "suicide" de cet auteur.
Certaines phrases sonnent très justes (et auraient leur place dans le fil sur la folie ...
pour expliquer qu'il ne s'agit pas toujours de l'entourage, égoiste, qui ne s'implique pas ...).
Mais.. j'ai eu beaucoup de mal avec l'emploi de la seconde personne.
J'avais l'impression qu'il surinterpretait les gestes, et pensées de son ami...
si bien que je ne savais plus où le placer : Fiction ? Fiction inspirée de faits réels ? Documentaire ?
Il est difficile de dissocier ce roman du propre suicide de l'auteur,
si bien qu'on ne sait plus qui parle...
sic !

C'est le problème même de l'auteur dont on sent bien qu'il est attiré par la mort, et qu'il s'identifie avec cet ami disparu.

Oui, mais j'ai l'impression qu'il a réecrit les sensations de cet ami
afin qu'il puisse d'identifier à lui...

paru chez Folio



Edouard Levé
Suicide
Folio Gallimard - 26 novembre 2009

Citation :

« Expliquer ton suicide ? Personne ne s'y est risqué. Tu ne craignais pas la mort. Tu l'as devancée, mais sans vraiment la désirer : comment désirer ce que l'on ne connaît pas ? Tu n'as pas nié la vie, mais affirmé ton goût pour l'inconnu en pariant que si, de l'autre côté, quelque chose existait, ce serait mieux qu'ici. »

Dans Suicide, le narrateur s'adresse à un ami qui s'est tué d'un coup de fusil. Apparaît peu à peu l'image d'un homme stoïque, délicat et sensible, qui ressemble à l'auteur. Édouard Levé s'est suicidé dix jours après avoir remis son manuscrit à son éditeur.
- 4e de couverture -