Nadine Gordimer [Afrique du Sud]

Tous ses romans sont centrés sur son combat contre l’Apartheid, du moins jusqu’à l’abolition juridique de celui-ci, sa première nouvelle, elle l’écrit à l’âge de 9 ans suite à une « visite » de la police dans la chambre de sa domestique noire ; maintenant, elle se concentre sur le comment vivre ensemble. Elle fut proche de l'ANC de Nelson Mandela.

Parmi mes lectures :

Son meilleur roman d’avant, « un amant de fortune » : Quand la voiture de Julie tombe en panne à Johannesburg et que le jeune mécanicien Abdou émerge… pourtant ces deux-là n'étaient pas faits pour se rencontrer. Tellement de choses opposent les deux personnages principaux, plus que l'argent, la couleur ou la classe sociale ; pourtant… vraiment magnifique.

Son meilleur roman d’après, « L’Arme domestique » : Ducan est un blanc qui a tué. Ducan a des parents progressistes ? Ducan est homosexuel ? Mais Ducan est défendu par une étoile montante du barreau, un avocat noir.
Magistral !

J'ai sur ma table un caprice de la nature livre de poche 4342. L'as-tu lu ?
Nadine Gordimer a eu le prix nobel de littérature en 1991.

Son roman Un monde d'étrangers est très apprécié, selon mes sources.

« Un monde d'étrangers » est son quatrième roman (son premier traduit en français), il a été écrit en 1953. Il a ouvert la voie et à ce titre il mérite d’être lu, si l’on compte entamer une lecture approfondie de son œuvre…
Pour ma part, quand je découvre un auteur, je préfère « remonter » le temps de ses œuvres.

Je ne me souviens pas avoir lu « un caprice de la nature » qui est un recueil de nouvelles, je crois ?

tu as raison ! 19 nouvelles..
ce qui me rassure car je me voyais mal entreprendre à l'aveuglette la lecture d'un roman de 565 pages...

Un écrivain peut écrire des nouvelles ou des romans courts qui ne le reflètent pas mais je ne crois pas qu’il puisse le faire avec des romans longs ; s’il l’a écrit ainsi c’est que ce roman le caractérise profondément.
Je pense donc que plus un roman est long mieux il nous permettra de juger si un romancier nous plaira ; paradoxalement c’est un gain de temps.

J'ai lu Fille de Burger
Le roman raconte l'histoire de Rosemarie Burger, fille d'un leader communiste Afrikaner, mort en prison. Elle se rebelle contre le poids de l'héritage idéologique paternel. Elle trouvera sa propre identité, à travers diverses rencontres, dans un monde difficile mais réel.

rotko a écrit:

tu as raison ! 19 nouvelles..
ce qui me rassure car je me voyais mal entreprendre à l'aveuglette la lecture d'un roman de 565 pages...

Il ne s’agit pas de nouvelles comme je l’avais cru un instant enlisant Nadine Gordimer, un caprice de la nature livre de poche 4342.

Sans doute retrouve-t-on en fin de livre une table où sont répertoriés 19 titres : « une orangeade pour ma petite chérie », « ne mets pas ton bras qui pue sous la figure », « l’entraîneuse »…

Dans « une orangeade pour ma petite chérie », on voit que la discrimination raciale surgit inopinément à propos d’une anecdote d’adolescence. Toutefois à la fin de ma lecture, j’étais étonné de la complexité des relations entre des personnages secondaires.
Je me suis donc senti obligé de relire les dernières pages.
A ce moment je me suis aperçu que la deuxième nouvelle reprenait les mêmes personnages et poursuivait l’histoire.
un caprice de la nature serait donc un roman distribué en plusieurs épisodes successifs qui racontent la vie (ici l’adolescence) d‘Hillela - alias Kim, fillette d‘Afrique du Sud..


Cette méprise est intéressante car elle permet de comparer un chapitre et une nouvelle. Même si cette dernière laisse la fin sujette à interprétations diverses, on est habitué à ce qu’elle ait une unité et ne laisse pas planer des points d’interrogations annexes. Or c’est précisément ce qui m’avait étonné avec la bête nouvelle de Ludmila Oulitskaïa dans un si bel amour.

Un écrivain, je ne me souviens plus de son nom, a dit un jour…que les meilleurs livres sont ceux où les points d’interrogation sont les plus nombreux…

Provence, « Fille de Burger » date de 1979, je crois que ce roman marque la frontière entre la prise de position et l’implication par l’action…


Pour information, 2 ouvrages sur l’auteur :
Liliane Louvel, Nadine Gordimer, Presses Universitaires de Nancy, 1994
Denise Brahimi, Nadine Gordimer. La femme, la politique et le roman, préface de Claude Wauthier, IFAS / Karthala, 2000.

Nadine Gordimer, un caprice de la nature, livre de poche 4342

Hillela, fille de parents divorcés est élevée successivement par ses tantes en Afrique du Sud, avant de voler de ses propres ailes….

Nadine Gordimer ne donne pas dans le simplisme : elle montre à quel point l’apartheid fausse toutes les relations humaines, chez les aveugles volontaires comme chez les clairvoyants sur la situation du pays.

On suit donc l’enfance, et l’adolescence d’Hillela, avec des trous d’ombre, un récit qui essaie de retrouver le chemin d’une jeune fille ballottée de ci de là.

J’ai mis le doigt dans le récit, je suis fait ! Je veux savoir la suite, « c’est trop bon  ! ». J’y retourne.

Nadine Gordimer, un caprice de la nature.

je poursuis ma lecture de ce pavé

A la suite d'Hillela, qui sait bien mener sa barque, malgré les coups du sort, le lecteur parcourt les coulisses de la lutte contre l'apartheid menée par les opposants en exil.

On ne peut pas dire que tout soit idyllique et au-dessus de tout soupçon, mais comme pour les restaurants, un coup d'oeil dans les cuisines est salutaire.

Nadine Gordimer, Un caprice de la nature, livre de poche

A la fin de ce gros livre (564 pages), mon impression est mitigée. Les rappels politiques et historiques de l’Afrique du Sud et des pays frontaliers demandent une bonne connaissance du dossier. En revanche il fournit ample matière à réflexion.

Dans l’histoire elle-même, pour éviter sans doute l’ennui d’un récit linéaire, l’auteur use fréquemment des anticipations ponctuelles dans l’itinéraire des personnages, et de rappels du passé censés donner une unité à son livre.

J’ai mieux apprécié les interrogations en forme de zones d’ombre sur les activités du personnage principal, Hillela, fille de parents divorcés, confiée successivement à deux de ses tantes.

Là est à mes yeux le mérite du livre, : l’attitude des blancs face à l’apartheid, et la faillite de leur conduite.

La tante Olga, personne élégante et raffinée, généreuse et snob, veut tout ignorer du contexte raciste du pays. Le sujet est à éviter si on a une bonne éducation.

Sa sœur Pauline, engagée et lucide, comprend les contrariétés d’ Olga dans un contexte d’insécurité

Citation :

« On arrête les gens par centaines,mais bien sûr, ce sont des Noirs, et d’eux, elle ne connaît que son amour pour Jethro [le domestique] et son amour de cuisinière et son amour de jardinier. Les réunions sont interdites. On peut être détenu sans jugement. La ville grouille de policiers. Et Olga doit remettre son shopping à plus tard ».

Nadine Gordimer, un caprice de la nature.

Pauline et son mari Joe pensent donc la situation sur les plans politiques et professionnels , ce qui induit aussi des dysfonctionnements et des maladresses : risque de dogmatisme pour la mère à l’intérieur de la famille, ce que plus tard son fils juge assez sévèrement :

Citation :

« A la maison, les noirs de ma mère étaient comme les babioles de tante Olga, il fallait ne rien dire ou faire qui aurait risqué de fêler l’amitié dont-ils lui permettaient de se prévaloir -et il y en avait qui étaient d’affreux bons à rien, des pique-assiette. »

Pauline voit aussi l’échec d'une attitude philanthropique et charitable qui voulait éduquer les jeunes Noirs.

Citation :

« Les enfants chantaient des hymnes de liberté au lieu des chants de gratitude qu’ils avaient coutume d’offrir à Pauline et à ses collaboratrices ».

Pour son avocat de mari, quelle gageure de vouloir obtenir justice en un pays où le droit est injuste...

Nadine Gordimer, un caprice de la nature

Hillela, nièce adoptée, fera elle-même son chemin, aidée par ses atouts de jolie femme et une aisance à vivre toutes les situations.

Elle aussi commet des erreurs comme de rêver d’une abondante famille à l’Africaine. Elle comprend assez vite que la résistance des Noirs peut prendre la voie d’attentats contre des « Blancs innocents ».

Citation :

« La police utilise la violence contre nous tous les jours et les Blancs s’imaginent qu’ils peuvent rester en dehors, alors que que les flics tuent et tabassent en leur nom., ça fait tellement d’années qu’ils laissent faire. Un jour les Noirs seront obligés d’étendre la lutte aux zones blanches. C’est inévitable C’est de là qu’est partie la violence. Et elle frappera là d’où elle est venue [...] Est-ce qu’il y a vraiment des innocents dans notre pays ? ».

Liée à des leaders noirs, par son corps splendide et généreux, Hillela devient une icône de communication utile pour le travail de propagande.

Citation :

« La jeune veuve blanche avec sa petite Africaine [sa fille], icône de la libération et de la réconciliation entre le tiers monde et le monde occidental ».

Bouge-toi ! de Nadine Gordimer Chez Grasset.

Lemonde des livres du 29 juin 2007 rend compte de Bouge-toi ! livre dont le titre est une citation de WH Auden. Pour contrecarrer son cancer de la thyroïde, un jeune militant écologiste reçoit des radiations qui le rendent dangereux pour sa famille. Isolé à l’hôpital , puis chez ses parents, il fait l’examen de sa vie et des petits secrets de sa maisonnée.

Au cours de son entretien, Nadine Gordimer confirme son intérêt pour l’écologie.

Citation :

« mon vrai sujet n’est pas la nature, mais de savoir qui est un homme dans l’espèce humaine. C’est notre existence qui m’intéresse, et lamenta que représente pour elle notre pollution de l’environnement à l’échelle mondiale […] le bouleversement de l’eco-système rejaillit sur nous tous, qui en faisons partie. »

bouge-toi !

Nadine Gordimer précise que le but d’un roman n’est pas d’être un tract, mais de poser des questions, "faire prendre conscience à chacun de sa place dans le monde et de ce que signifie être en vie, à une époque particulière, et parfois dans un lieu particulier ".

En abordant cette problématique avec humour (un jeune écologiste devenu pour son bien radioactif) elle n’ oublie pas le contexte humain du post apartheid ni la problématique de la nature avec un fleuve à sauvegarder et le nécessaire développement d’un pays.

J'ai emprunté hier à la bibliothèque L'arme domestique.

Je suis enfin venue à bout de ce roman de Nadine Gordimer L' arme domestique.

Peut-être est-ce parce que ma lecture a été assez hachurée mais j'ai eu du mal à apprécier vraiment ce livre. L'écriture est surprenante et casse parfois le rythme de la narration. la deuxième partie du roman, qui narre le procès de Duncan et amène une reflexion sur la peine de mort, m'a réconciliée avec le livre.
Moi qui m'attendais à une réflexion sur l'apartheid, j'ai trouvé que ce point était à peine esquissé lors des rencontres entre les parents de Duncan et l'avocat noir qui défend leur fils.
J'ai plutôt été déçue finalement.

Citation :

Moi qui m'attendais à une réflexion sur l'apartheid, j'ai trouvé que ce point était à peine esquissé lors des rencontres entre les parents de Duncan et l'avocat noir qui défend leur fils.

C'est un peu le danger - et la rançon, des étiquettes qui collent à la peau des auteurs.

Histoire de mon fils

Un ouvrage complexe, à plusieurs tiroirs.

Il y a comme deux trames :

- une trame proprement historique et parfois un brin théorique sur la lutte pour la liberté, contre l'apartheid, que mène le héros de ce livre, un père de famille noire, ancien instituteur, féru de Shakespeare et orateur enflammé;

- une trame strictement psychologique sur les rapports entre un fils et son père quand le fils surprend un jour à la sortie d'un cinéma le père en compagnie de son amante, une révolutionnaire engagée dans la cause, loin du modèle sage et appliqué de la mère. Haine du père, dégoût, sensation d'abandon et de complicité forcée fondent les sentiments virulents du jeune homme.

Ces deux aspects du livre sont superposés, on alterne de l'un à l'autre et c'est une gymnastique curieuse pour le lecteur mais entraînante.

La langue retient évidemment, par une structure plutôt personnelle, sophistiquée et les nombreuses idées suggérées.

Un livre dense, appliqué et qui n'est pas seulement un plaisir de littérature mais un vrai support de réflexion sur la subversion, l'injustice et la nature humaine.