Alain Damasio

La Horde du Contrevent, Alain Damasio

C'est le second roman de cet auteur, mais probablement celui qui va lui permettre de se faire connaître du "grand public", en-dehors de la sphère SF/fantasy - du moins je l'espère pour lui. Il a reçu le Grand Prix de l'Imaginaire 2006 du meilleur roman francophone.
Il est édité par La Volte (http://www.lavolte.net/), une maison d'édition toute jeune et plutôt courageuse, et est accompagné d'un CD, composé comme une "bande originale du livre".

Citation :

Imaginez une Terre poncée, avec en son centre une bande de cinq mille kilomètres de large et sur ses franges un miroir de glace à peine rayable, inhabité. Imaginez qu’un vent féroce en rince la surface. Que les villages qui s’y sont accrochés, avec leurs maisons en goutte d’eau, les chars à voile qui la strient, les airpailleurs debout en plein flot, tous résistent. Imaginez qu’en Extrême-Aval ait été formé un bloc d’élite d’une vingtaine d’enfants aptes à remonter au cran, rafale en gueule, leur vie durant, le vent jusqu’à sa source, à ce jour jamais atteinte : l’Extrême-Amont.

Les voix des Hordiers se mêlent pour raconter les années de contre, face au vent, jusqu'à la source. La remontée jusqu'en Extrême-Amont est une quête: comprendre, trouver son vrai visage, arrêter le vent, enfin.

Je ne veux pas raconter l'histoire: la trame en est celle, finalement très classique, du roman d'aventures, doublé d'une quête physique et métaphysique, et peu de choses raccrochent d'ailleurs ce roman à la fantasy.
Et puis je ne me sens pas capable de faire une bonne note de lecture sur un livre que j'ai autant aimé, mais je voudrais quand même vous inciter à le lire, pour sa créativité rare, proche de la perfection tant ses histoires mêlées ont du sens, tant sa narration est impeccablement maîtrisée, tant ses langues (car la langue change, pour chaque personnage qui prend la parole) sont riches et inventives.

Un site internet a été créé spécialement pour ce livre: http://www.lahordeducontrevent.org/index.html. On y trouve des illustrations de différents dessinateurs, des fiches sur les personnages, etc. Si vous avez l'intention de lire le roman, je vous conseille toutefois de n'aller y faire un tour qu'après!

ekwerkwe a écrit:

est accompagné d'un CD, composé comme une "bande originale du livre".

Citation :

Le CD audio :
Un disque est intégré sous pochette dans le roman. Construite autour de 12 titres originaux et de nombreuses plages de sound design, cette véritable Bande Originale du livre suit la chronologie du récit et propose au lecteur une variation musicale, une mise en sons poétique. Une musique tour à tour intimiste et contemplative lorsqu’elle se glisse dans les sentiments des personnages, organique ou emphatique quand elle illustre les éléments et évoque les paysages, les grands espaces. C’est la marche, le « Contre » qui agit comme fil conducteur, et le vent doux, violent, sifflant obsédant comme enveloppe.

Original, qu'en as-tu pensé, ekwerkwe ?

Vieille tête de mule que je suis, j'ai résisté à tous ceux qui m'ont dit que c'était fabuleux, bien fait, bien pensé (c'est-à-dire tous ceux qui l'ont écouté), et je ne l'ai pas écouté. Je ne veux rien qui vienne se surimprimer à ma Horde à moi...

ekwerke a écrit:

Et puis je ne me sens pas capable de faire une bonne note de lecture sur un livre que j'ai autant aimé, mais je voudrais quand même vous inciter à le lire, pour sa créativité rare, proche de la perfection tant ses histoires mêlées ont du sens, tant sa narration est impeccablement maîtrisée, tant ses langues (car la langue change, pour chaque personnage qui prend la parole) sont riches et inventives.

Pas capable, pas capable... Tu soulèves en tout cas ce qui fait la force de ce roman : l'originalité, à beaucoup de points de vue. Moi non plus, je ne peux en dire beaucoup plus, mais comme toi, j'encourage tout curieux à le lire. Je citerai un passage aguicheur à l'occasion. L'auteur a pris trois vraies années pour en accoucher, et ça se déguste.

un grain.

PS : merci de m'avoir fait découvrir La Horde, je suis sûr que je relirai ce roman un jour.

Je suis contente que tu aies aimé!
Et au fait, qu'as-tu pensé du CD?

Je l’ai un peu écouté, mais comme des passages du bouquin sont lus dedans, je n’osais pas trop. Du coup, j’ai juste écouté les versions instrumentales, et seules deux me plaisaient. Sinon, les autres bof, bof.
Je n’ai pas tellement envie d’aller sur le site non plus, mais comme je suis trop curieux, je suis sûr qu’un jour je cliquerai fatidiquement sur le lien

J’ai procédé à rebours du bon sens !

J’ai écouté le Cd sans avoir lu le livre ; on se dit que cette musique devrait accompagner des images, faute de quoi on est obligé d’ouvrir ses oreilles pour écouter les voix chuchotantes.

Citation :

« Nous sommes faits de l’étoffe dont sont tissés les vents ».

On perçoit les souffles extérieurs qui laissent bientôt place à des bruitages isolés de gouttes d’eau qui tombent régulièrement. Serait-on dans un univers vierge de toute trace humaine, livré aux seuls éléments de l’air et de l’eau, perceptibles seulement par l’oreille ?

Nulle mélodie pour guider, mais des rythmes qui vont crescendo puis decrescendo, sorte de respiration inédite.

Un itinéraire, une longue marche avec une petite voix comme intérieure qui accompagne et réconforte dans l’immensité :

Citation :

le cosmos est mon campement.

Je ne peux résister à vous présenter un passage où Caracole, le troubadour de la Horde, affronte en duel un spécialiste des joutes verbales, Sélème le Stylite.

Après divers jeux (dialogues en palindromes, discours où seul le "o" est admis comme voyelle, etc.), Caracole et Sélème se mesurent à l'escalettre, consistant à dire des phrases où chaque mot doit comporter une lettre de plus que le suivant.

Caracole a écrit:

J'
ai
cru
voir
buter
Sélème,
Stylite
invaincu
autrefois...
Nonobstant
compatissez
Messeigneurs
compréhensifs !
Surenchérissez
chaleureusement !
Réapprovisionnez
occasionnellement...
Institutionnalisez...
irrévérencieusement !

Alors avec ou sans le CD, car je viens de voir qu'il y en a d'occasion, enfin si c'est bien celui-là :

C'est bien celui-là.
Pour la question du CD... moi j'ai fait sans. Je suis frileuse...

La Zone du Dehors

Alain Damasio a commencé à écrire ce roman en 1992, à l’âge de 22 ans. Il a été publié en 1999 puis ressorti en 2007.

La terre, oubliée, pfuiit, guerre bactériologique ; on part peupler le cosmos.
Solution : Cerclon, ville parfaite à l’ombre de Saturne, idéale, l’être humain a enfin trouvé la solution à tous les maux qui rongeaient la société.
Mais un cercle, on fini par en faire le tour, et puis ça manque de brisures. Dans une ville aux routes désespérément plates et aux plantes artificielles, où la peine de mort est votée sur un boîtier par des téléspectateurs absorbant un procès télévisé, il n’y a que la Volte pour éveiller tout ça. Car, et Damasio le cite dans son roman, on a ici largement dépassé le système totalitaire du 1984 de George Orwell pour une démocratie plus subtile.

Parce que, comme le dit le Président A :
« - Mais c’est surtout que nous n’avons jamais été aussi proches de ce que j’estime être le summum du pouvoir : une aliénation optimum sous les apparences d’une liberté totale.
- C’est une définition de la démocratie ?
- C’est un constat. »


Qu’est ce que la démocratie ?
L’homme est-il bon par nature ?
Une lutte doit-elle être morale pour aboutir ?
Qu’est ce que l’individu, la masse et la société ? Quels liens les unissent ?
Qu’est ce que le pouvoir ?
Comment s’opère le contrôle de l’individu ?
La société se nourrit-elle de toute forme de résistance afin de mieux l’anéantir ?

En plus d’être une aventure palpitante, La Zone du Dehors propose une réflexion claire sur nos choix de société passés et à venir. Alain Damasio dépasse même la critique pour proposer, envisager les solutions, les formes alternatives avec leurs forces et leurs faiblesses. Pointant par là même la pauvreté actuelle de l’offre politique. Cet univers si éloigné de nous dans le temps et dans l’espace n’en devient que plus proche, ne serait-ce qu’à la lumière de l’orientation politique actuelle de notre pays.

J'ai été emballée aussi par La Horde du Contrevent, différent de La Zone du Dehors mais aussi bon. Je vous mets le lien vers ma chronique ici.

J'ai lu "La Horde du Contrevent" et je le tiens pour un chef d'oeuvre !

Ce n'est pas seulement de la haute voltige littéraire, c'est vraiment profond, sensible, imprévisible...

Tout simplement impérissable.

On a de la chance, l'auteur est encore tout jeune. :yes:

Arc a écrit:

J'ai lu "La Horde du Contrevent" et je le tiens pour un chef d'oeuvre !

se verrait-il accorder "un grain " ?

Je milite aussi pour accorder un grain à ce jeune homme exceptionnel.
Et le personnage du troubadour...

Je n'arrive pas à trouver en poche ses autres livres, ça m'agace !

Moi aussi je donne, très officiellement, un grain!

Arc a écrit:

Je n'arrive pas à trouver en poche ses autres livres, ça m'agace !

Je crois, Arc, que Damasio n'a écrit que 2 romans, seul La horde du Contrevent (paru en 2004) est sorti en poche. Il faudra attendre pour La zone du dehors (paru en 2001 réédition 2007).

"La horde du Contrevent" aurait elle des velléité de voyage

Quel voyage! Voilà plus d'un an que je l'ai lu et je ne m'en suis toujours pas remise, un véritable chef d'œuvre envoutant et poétique, voilà ce qui pour moi correspond le mieux à l'appellation "livre-univers".

Inoubliable.

Je pense souvent à cet auteur hors norme.

Et Français !

On est bon...

Non, on est TRES bon.

Citation :

Alain Damasio nous invite à la rencontre de grands « vivants », c'est-à-dire de grands claustrophobes, amoureux de l’air et de l’Ouvert. Champions de toutes les aérations, celles de l’espace, du son, des mots, du collectif, et de ce fait totalement libres, entrés en un jeu d’échos fou avec les mouvements du monde, ils tracent et suivent leurs lignes de fuite, tel le surfeur qui n’existe et ne consiste que dans la furtivité.

à lire chez La Volte

Ce qui m'a fasciné dans la horde du contrevent, au-delà de la très grande originalité déjà évoquée à plusieurs reprises, c'est la grande maitrise de la langue française. Les passages de Caracole sont savoureux, et le fait de changer de registre à chaque paragraphe correspondant à un personnage différent à chaque fois, c'est réussi avec brio ! Ca va rendre ce livre bien difficile à traduire cela dit.
En tout cas, c'est un très bon livre. Vivement que l'auteur nous offre un autre livre !

Merci pour ton post Ashjibe

si ça intéresse quelqu'un (e) David Calvo et Alain Damasio sont invités à l’émission MAUVAIS GENRES sur France culture à 22h le Samedi 7 juillet

Je vais voir avec ma bibliothèque s'il est possible d'avoir La horde du contrevent

Je savoure doucement La zone du dehors qui demande attention J'en parlerai lorsque je l'aurais fini

bon ben je n'ai pas parlé de La zone du dehors car j'aurais été incapable de trouver les mots pourtant je le recommande très vivement A lire

Une vidéo de 48 mns sur le thème Littérature, société et politique : Le point de vue de l'imaginaire avec Claude Ecken et Alain Damasio

La horde du contrevent en ebook à moins de 9€ sur ce site