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| | Baudelaire | |
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Auteur | Message |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Baudelaire Sam 07 Jan 2006, 09:29 | |
| ELEVATION Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées, Des montagnes, des bois, des nuages, des mers, Par delà le soleil, par delà les éthers, Par delà les confins des sphères étoilées, Mon esprit, tu te meus avec agilité, Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde, Tu sillonnes gaiement l'immensité profonde Avec une indicible et mâle volupté. Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides; Va te purifier dans l'air supérieur, Et bois, comme une pure et divine liqueur, Le feu clair qui remplit les espaces limpides. Derrière les ennuis et les vastes chagrins Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse, Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse S'élancer vers les champs lumineux et sereins; Celui dont les pensers, comme des alouettes, Vers les cieux le matin prennent un libre essor, - Qui plane sur la vie, et comprend sans effort Le langage des fleurs et des choses muettes! | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Jeu 12 Jan 2006, 20:04 | |
| Le vin de l'assassin
Ma femme est morte, je suis libre ! Je puis donc boire tout mon soûl. Lorsque je rentrais sans un sou, Ses cris me déchiraient la fibre.
Autant qu'un roi je suis heureux ; L'air est pur, le ciel admirable... Nous avions un été semblable Lorsque j'en devins amoureux !
L'horrible soif qui me déchire Aurait besoin pour s'assouvir D'autant de vin qu'en peut tenir Son tombeau ; - ce n'est pas peu dire :
Je l'ai jetée au fond d'un puits, Et j'ai même poussé sur elle Tous les pavés de la margelle. - Je l'oublierai si je le puis !
Au nom des serments de tendresse, Dont rien ne peut nous délier, Et pour nous réconcilier Comme au beau temps de notre ivresse,
J'implorai d'elle un rendez-vous, Le soir, sur une route obscure. Elle y vint ! - folle créature ! Nous sommes tous plus ou moins fous !
Elle était encore jolie, Quoique bien fatiguée ! et moi, Je l'aimais trop ! voilà pourquoi Je lui dis : Sors de cette vie !
Nul ne peut me comprendre. Un seul Parmi ces ivrognes stupides Songea-t-il dans ses nuits morbides A faire du vin un linceul ?
Cette crapule invulnérable Comme les machines de fer Jamais, ni l'été ni l'hiver, N'a connu l'amour véritable,
Avec ses noirs enchantements Son cortège infernal d'alarmes, Ses fioles de poison, ses larmes, Ses bruits de chaîne et d'ossements !
- Me voilà libre et solitaire ! Je serai ce soir ivre mort ; Alors, sans peur et sans remord, Je me coucherai sur la terre,
Et je dormirai comme un chien ! Le chariot aux lourdes roues Chargé de pierres et de boues, Le wagon enragé peut bien
Ecraser ma tête coupable Ou me couper par le milieu, Je m'en moque comme de Dieu, Du Diable ou de la Sainte Table ! | |
| | | Vincimil Invité
| Sujet: La beauté Jeu 21 Sep 2006, 14:46 | |
| Les fleurs du Mal -Spleen et idéal
XVII - LA BEAUTE
Je suis belle, ô mortels! comme un rêve de pierre, Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour, Est fait pour inspirer au poète un amour Eternel et muet ainsi que la matière.
Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris; J'unis un coeur de neige à la blancheur des signes; Je hais le mouvement qui déplace les lignes, Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.
Les poètes, devant mes grandes attitudes, Que j'ai l'air d'emprunter aux plus fiers monuments, Consumeront leurs jours en d'austères études;
Car j'ai, pour fasciner ces dociles amants, De purs miroirs qui font toutes choses plus belles : Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles! |
| | | Seuguh pilier
Nombre de messages : 2575 Age : 47 Localisation : Bruxelles Date d'inscription : 17/05/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 08:20 | |
| Une charogne
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme, Ce beau matin d'été si doux : Au détour d'un sentier une charogne infâme Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l'air, comme une femme lubrique, Brûlante et suant les poisons, Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique Son ventre plein d'exhalaisons.
Le soleil rayonnait sur cette pourriture, Comme afin de la cuire à point, Et de rendre au centuple à la grande nature Tout ce qu'ensemble elle avait joint ;
Et le ciel regardait la carcasse superbe Comme une fleur s'épanouir. La puanteur était si forte, que sur l'herbe Vous crûtes vous évanouir.
Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride, D'où sortaient de noirs bataillons De larves, qui coulaient comme un épais liquide Le long de ces vivants haillons.
Tout cela descendait, montait comme une vague, Ou s'élançait en pétillant ; On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague, Vivait en se multipliant.
Et ce monde rendait une étrange musique, Comme l'eau courante et le vent, Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique Agite et tourne dans son van.
Les formes s'effaçaient et n'étaient plus qu'un rêve, Une ébauche lente à venir, Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève Seulement par le souvenir.
Derrière les rochers une chienne inquiète Nous regardait d'un oeil fâché, Épiant le moment de reprendre au squelette Le morceau qu'elle avait lâché.
Et pourtant vous serez semblable à cette ordure, A cette horrible infection, Étoile de mes yeux, soleil de ma nature, Vous, mon ange et ma passion !
Oui ! telle vous serez, ô reine des grâces, Après les derniers sacrements, Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses. Moisir parmi les ossements.
Alors, ô ma beauté ! dites à la vermine Qui vous mangera de baisers, Que j'ai gardé la forme et l'essence divine De mes amours décomposés ! | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 13:22 | |
| Excusez-moi...mes petits Seuguh et Oxymorron mais...Houellebecq peut toujours s'accrocher... Tristesse de luneCe soir, la lune rêve avec plus de paresse ; Ainsi qu'une beauté, sur de nombreux coussins, Qui d'une main distraite et légère caresse Avant de s'endormir le contour de ses seins, Sur le dos satiné des molles avalanches, Mourante, elle se livre aux longues pâmoisons, Et promène ses yeux sur les visions blanches Qui montent dans l'azur comme des floraisons. Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive, Elle laisse filer une larme furtive Un poète pieux, ennemi du sommeil, Dans le creux de sa main prend cette larme pâle, Aux reflets irisés comme un fragment d'opale, Et la met dans son cœur loin des yeux du soleil. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 13:24 | |
| Invitation au voyage
Mon enfant, ma soeur, Songe à la douceur D'aller là-bas vivre ensemble! Aimer à loisir, Aimer et mourir Au pays qui te ressemble! Les soleils mouillés De ces ciels brouillés Pour mon esprit ont les charmes Si mystérieux De tes traîtres yeux, Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté.
Des meubles luisants, Polis par les ans, Décoreraient notre chambre; Les plus rares fleurs Mêlant leurs odeurs Aux vagues senteurs de l'ambre, Les riches plafonds, Les miroirs profonds, La splendeur orientale, Tout y parlerait À l'âme en secret Sa douce langue natale.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté.
Vois sur ces canaux Dormir ces vaisseaux Dont l'humeur est vagabonde; C'est pour assouvir Ton moindre désir Qu'ils viennent du bout du monde - Les soleils couchants Revêtent les champs, Les canaux, la ville entière, D'hyacinthe et d'or; Le monde s'endort Dans une chaude lumière.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 13:30 | |
| L'Albatros
Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers.
A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à côté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait!
Le Poëte est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 13:33 | |
| Parfum exotique
Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne, Je respire l'odeur de ton sein chaleureux, Je vois se dérouler des rivages heureux Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone ; Une île paresseuse où la nature donne Des arbres singuliers et des fruits savoureux ; Des hommes dont le corps est mince et vigoureux, Et des femmes dont l'œil par sa franchise étonne. Guidé par ton odeur vers de charmants climats, Je vois un port rempli de voiles et de mâts Encor tout fatigués par la vague marine. Pendant que le parfum des verts tamariniers, Qui circule dans l'air et m'enfle la narine, Se mêle dans mon âme au chant des mariniers | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 13:58 | |
| Le chat
Dans ma cervelle se promène, Ainsi qu'en son appartement, Un beau chat, fort, doux et charmant. Quand il miaule, on l'entend à peine,
Tant son timbre est tendre et discret; Mais que sa voix s'apaise ou gronde, Elle est toujours riche et profonde. C'est là son charme et son secret.
Cette voix, qui perle et qui filtre Dans mon fonds le plus ténébreux, Me remplit comme un vers nombreux Et me réjouit comme un philtre.
Elle endort les plus cruels maux Et contient toutes les extases; Pour dire les plus longues phrases, Elle n'a plus besoin de mots. Non, il n'est pas d'archet qui morde Sur mon coeur, parfait instrument, Et fasse plus royalement Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux, Chat séraphique, chat étrange, En qui tout est, comme en un ange, Aussi subtil qu'harmonieux !
II
De sa fourrure blonde et brune Sort un parfum si doux, qu'un soir J'en fus embaumé, pour l'avoir Caressée une fois, rien qu'une.
C'est l'esprit familier du lieu ; Il juge, il préside, il inspire Toutes choses dans son empire ; Peut-être est-il fée, est-il dieu ?
Quand mes yeux, vers ce chat que j'aime Tirés comme par un aimant, Se retournent docilement Et que je regarde en moi-même,
Je vois avec étonnement Le feu de ses prunelles pâles, Clairs fanaux, vivantes opales, Qui me contemplent fixement. | |
| | | Seuguh pilier
Nombre de messages : 2575 Age : 47 Localisation : Bruxelles Date d'inscription : 17/05/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 14:04 | |
| - coline a écrit:
- Excusez-moi...mes petits Seuguh et Oxymorron mais...Houellebecq peut toujours s'accrocher...
Zioup, entièrement d'accord avec toi, perso c'est mon poète préféré (!) | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 14:06 | |
| Enivrez-vous
Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps Qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. Mais de quoi? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise, Mais enivrez-vous, Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé , dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : "Il est l'heure de s'enivrer! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous; Enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise." | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 14:07 | |
| - Seuguh a écrit:
- coline a écrit:
- Excusez-moi...mes petits Seuguh et Oxymorron mais...Houellebecq peut toujours s'accrocher...
Zioup, entièrement d'accord avec toi, perso c'est mon poète préféré (!) Ah! Tu m'as fait peur!...Je croyais que tu trouvais que MH pouvait se comparer à lui! | |
| | | Seuguh pilier
Nombre de messages : 2575 Age : 47 Localisation : Bruxelles Date d'inscription : 17/05/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 14:45 | |
| Un autre miaou :
Le Chat
Viens, mon beau chat, sur mon coeur amoureux ; Retiens les griffes de ta patte, Et laisse moi plonger dans tes beaux yeux, Mêlés de métal et d'agate.
Lorsque mes doigts caressent à loisir Ta tête et ton dos élastique, Et que ma main s'enivre du plaisir De palper ton corps électrique,
Je vois ma femme en esprit. Son regard, Comme le tien, aimable bête, Profond et froid, coupe et fend comme un dard,
Et, des pieds jusques à la tête, Un air subtil, un dangereux parfum, Nagent autour de son corps brun. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 21 Nov 2006, 16:31 | |
| Mais qu'est-ce que vous avez tous avec les chats? (Je les crains vraiment et j'ai l'impression d'être la seule dans ce cas.) Même Baudelaire! | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Baudelaire Mer 22 Nov 2006, 06:22 | |
| Baudelaire parlait d' - Citation :
- Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Nancy huston dans son pavé ("est un pavé tout ce qui par son épaisseur ou une lecture difficile me fait penser à tout le temps que je devrais passer à le lire") les professeurs de désespoir voit les débuts d'une littérature "néantiste" et noire dans le gouffre; Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant. - Hélas ! tout est abîme, - action, désir, rêve, Parole ! et sur mon poil qui tout droit se relève Maintes fois de la Peur je sens passer le vent. En haut, en bas, partout, la profondeur, la grève, Le silence, l'espace affreux et captivant... Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant Dessine un cauchemar multiforme et sans trêve. J'ai peur du sommeil comme on a peur d'un grand trou, Tout plein de vague horreur, menant on ne sait où ; Je ne vois qu'infini par toutes les fenêtres, Et mon esprit, toujours du vertige hanté, Jalouse du néant l'insensibilité. Ah ! ne jamais sortir des Nombres et des Etres ! | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 10 Avr 2007, 05:21 | |
| Les fleurs du mal : illustrées par la peinture symboliste et décadente / Baudelaire, Charles D. de Selliers, 2007 Collection : La petite collection Cet ouvrage réunit l’intégralité des poèmes des Fleurs du Mal de Charles Baudelaire illustrés par cent quatre-vingt-cinq oeuvres peintes, dessinées, lithographiées, aquarellées, essentiellement de la seconde moitié du XIXe siècle. | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mer 11 Avr 2007, 18:55 | |
| La mort des amants Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères, Des divans profonds comme des tombeaux, Et d'étranges fleurs sur des étagères, Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.
Usant à l'envi leurs chaleurs dernières, Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux, Qui réfléchiront leurs doubles lumières Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
Un soir fait de rose et de bleu mystique, Nous échangerons un éclair unique, Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux ;
Et plus tard un Ange, entr'ouvrant les portes, Viendra ranimer, fidèle et joyeux, Les miroirs ternis et les flammes mortes.
c'est un de mes poèmes préférés des "fleurs du mal" | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 26 Juin 2007, 04:03 | |
| le 25 juin 1857 était condamné le recueil des fleurs du mal.
Il figure maintenant au programmes de lectures "incontournables", encore que certaines éditions oublient ou mettent à part les pièces condamnées comme "les bijoux" ou "Lesbos".
A Alençon on rend hommage à l'éditeur Auguste Poulet-Malassis, (surnommé par Baudelaire Coco-mal-perché) et une exposition lui est consacrée en l'Eglise des Jésuites !
A Paris la Société des gens de lettres a organisé une table ronde intitulée "Du procès des 'Fleurs du Mal' aux nouvelles formes de censure".
le comédien Jean-François Balmer a lu plusieurs textes de Baudelaire etc... | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Mar 26 Juin 2007, 19:15 | |
| - rotko a écrit:
- le comédien Jean-François Balmer a lu plusieurs textes de Baudelaire etc...
qui pouvait mieux le "réciter" !!! | |
| | | Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:36 | |
| La Chevelure
Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure ! Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir ! Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure Des souvenirs dormant dans cette chevelure, Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !
La langoureuse Asie et la brûlante Afrique, Tout un monde lointain, absent, presque défunt, Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique ! Comme d'autres esprits voguent sur la musique, Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.
J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève, Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ; Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève ! Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :
Un port retentissant où mon âme peut boire A grands flots le parfum, le son et la couleur ; Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire, Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.
Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ; Et mon esprit subtil que le roulis caresse Saura vous retrouver, ô féconde paresse, Infinis bercements du loisir embaumé !
Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues, Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ; Sur les bords duvetés de vos mèches tordues Je m'enivre ardemment des senteurs confondues De l'huile de coco, du musc et du goudron.
Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde Sèmera le rubis, la perle et le saphir, Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde ! N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde Où je hume à longs traits le vin du souvenir ? | |
| | | Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:39 | |
| Un hémisphère dans une chevelure
Laisse-moi respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage, comme un homme altéré dans l'eau d'une source, et les agiter avec ma main comme un mouchoir odorant, pour secouer des souvenirs dans l'air.
Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que j'entends dans tes cheveux ! Mon âme voyage sur le parfum comme l'âme des autres hommes sur la musique.
Tes cheveux contiennent tout un rêve, plein de voilures et de mâtures ; ils contiennent de grandes mers dont les moussons me portent vers de charmants climats, où l'espace est plus bleu et plus profond, où l'atmosphère est parfumée par les fruits, par les feuilles et par la peau humaine.
Dans l'océan de ta chevelure, j'entrevois un port fourmillant de chants mélancoliques, d'hommes vigoureux de toutes nations et de navires de toutes formes découpant leurs architectures fines et compliquées sur un ciel immense où se prélasse l'éternelle chaleur.
Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan, dans la chambre d'un beau navire, bercées par le roulis imperceptible du port, entre les pots de fleurs et les gargoulettes rafraîchissantes.
Dans l'ardent foyer de ta chevelure, je respire l'odeur du tabac mêlé à l'opium et au sucre; dans la nuit de ta chevelure, je vois resplendir l'infini de l'azur tropical; sur les rivages duvetés de ta chevelure je m'enivre des odeurs combinées du goudron, du musc et de l'huile de coco.
Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des souvenirs. | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:43 | |
| Laisse-moi mordre longtemps tes tresses lourdes et noires. Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles, il me semble que je mange des souvenirs._________________
je ne sais pas si maintenant nous avons des poètes qui écrivent cela, en tout cas, c'est magnifique: | |
| | | Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:45 | |
| C'est ce passage qui m'a le plus marqué dans ce deuxième poème (étudié pour le bac, comme quoi...) | |
| | | marie chevalier pilier
Nombre de messages : 6350 Age : 123 Date d'inscription : 11/01/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:46 | |
| A celle qui est trop gaie
Ta tête, ton geste, ton air Sont beaux comme un beau paysage ; Le rire joue en ton visage Comme un vent frais dans un ciel clair.
Le passant chagrin que tu frôles Est ébloui par la santé Qui jaillit comme une clarté De tes bras et de tes épaules.
Les retentissantes couleurs Dont tu parsèmes tes toilettes Jettent dans l'esprit des poètes L'image d'un ballet de fleurs.
Ces robes folles sont l'emblème De ton esprit bariolé ; Folle dont je suis affolé, Je te hais autant que je t'aime !
Quelquefois dans un beau jardin Où je traînais mon atonie, J'ai senti, comme une ironie, Le soleil déchirer mon sein ;
Et le printemps et la verdure Ont tant humilié mon coeur, Que j'ai puni sur une fleur L'insolence de la Nature.
Ainsi je voudrais, une nuit, Quand l'heure des voluptés sonne, Vers les trésors de ta personne, Comme un lâche, ramper sans bruit,
Pour châtier ta chair joyeuse, Pour meurtrir ton sein pardonné, Et faire à ton flanc étonné Une blessure large et creuse,
Et, vertigineuse douceur ! A travers ces lèvres nouvelles, Plus éclatantes et plus belles, T'infuser mon venin, ma soeur ! | |
| | | Moon Animation
Nombre de messages : 8306 Age : 34 Localisation : Seattle Date d'inscription : 16/12/2006
| Sujet: Re: Baudelaire Dim 15 Juil 2007, 15:48 | |
| A une mendiante rousse
Blanche fille aux cheveux roux, Dont la robe par ses trous Laisse voir la pauvreté Et la beauté,
Pour moi, poète chétif, Ton jeune corps maladif, Plein de taches de rousseur, A sa douceur.
Tu portes plus galamment Qu'une reine de roman Ses cothurnes de velours Tes sabots lourds.
Au lieu d'un haillon trop court, Qu'un superbe habit de cour Traîne à plis bruyants et longs Sur tes talons ;
En place de bas troués, Que pour les yeux des roués Sur ta jambe un poignard d'or Reluise encor ;
Que des noeuds mal attachés Dévoilent pour nos péchés Tes deux beaux seins, radieux Comme des yeux ;
Que pour te déshabiller Tes bras se fassent prier Et chassent à coups mutins Les doigts lutins,
Perles de la plus belle eau, Sonnets de maître Belleau Par tes galants mis aux fers Sans cesse offerts,
Valetaille de rimeurs Te dédiant leurs primeurs Et contemplant ton soulier Sous l'escalier,
Maint page épris du hasard, Maint seigneur et maint Ronsard Épieraient pour le déduit Ton frais réduit !
Tu compterais dans tes lits Plus de baisers que de lis Et rangerais sous tes lois Plus d'un Valois !
- Cependant tu vas gueusant Quelque vieux débris gisant Au seuil de quelque Véfour De carrefour ;
Tu vas lorgnant en dessous Des bijoux de vingt-neuf sous Dont je ne puis, oh ! pardon ! Te faire don.
Va donc ! sans autre ornement, Parfum, perles, diamant, Que ta maigre nudité, Ô ma beauté ! | |
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