Allez grand seigneur je viens à ton secours
« Miami blues"de Charles WILLEFORD Rivages/noir
Frederick Frenger Junior arrive à Miami en provenance de San Francisco où il a purgé une peine de prison de trois ans à St Quentin. Avant de s'envoler pour la Floride, le joyeux psychopathe a trouvé le temps d'agresser trois hommes et de leur voler leurs cartes de crédit. Dès qu'il arrive à l'aéroport de Miami, il casse le doigt d'un Hare Krishna qui avait eu la malencontreuse idée de l'importuner.
Ainsi commence les "aventures" de ce personnage taillé dans le roc et aussi sympathique qu'une migale. Sans scrupule, violent et ne pensant qu'à dévaliser son prochain, Junior est bien décidé de se faire une petite place au soleil avant d'être repris par la police et envoyé dans un autre pénitencier pour le reste de sa vie.
Seulement il va croiser la route du sergent Hoke Moseley qui est taillé pour l'affronter. L'officier de police a des problèmes avec son poids, son appartement minable, sa femme qui lui pompe la moitié de son salaire, le sexe, l'alcool...et surtout ses fausses dents.
Willeford ne fait pas dans la dentelle. On peut dire qu'il est a l'opposé d'un James Lee Burke qui aime ciseler son texte. Willeford est cru et direct. Même s'il aime à nous faire découvrir sa ville, l'écrivain en a une vision cauchemardesque où les clochards et autres bandits se déplacent en pleine chaleur moite et suffocante. On sent le soleil dans ses pages, la crasse et la fracture entre les "Latins" et les "WASP" (White Anglo-Saxon Protestant).
Un livre qui est un coup de poing et on suit à la trace cet affrontement entre les deux hommes.
« Une seconde chance pour les morts » de Charles Willeford Rivages/noir
Dans les vieux dossiers de la police de Miami, il y a cinquante homicides non résolus. Tous remontent a quelques années, certains beaucoup plus anciens que d’autres. Ils n’ont pas été résolus à cause du manque de temps. Il n’y a jamais assez de temps. Une affaire se résout presque toujours dans les premières 24 heures. Après trois ou quatre jours, quelque chose d’autre intervient, et après deux semaines, a moins d’un coup de chance, il y a un nouveau crime. Après six mois, l’homicide en question se retrouve si loin sur la liste d’attente que les pistes sont plus froides que la victime.
Le chef du sergent Hoke Moseley lance pourtant ses hommes sur ces « pistes froides », seul moyen pour lui d’obtenir une promotion. L’ennui, c’est que Moseley est aussi sur une « piste chaude », née de la mort suspecte, par overdose, d’un gamin.
Une seconde chance pour les morts est la seconde enquête du sergent Moseley que l’on a pu rencontrer dans Mimai blues . Le sergent est toujours aussi complexé face aux femmes, aux hommes et à la vie en général. Il habite toujours un minable appartement dans un hôtel pourri de Miami Beach, sa femme lui pompe toujours la moitié de son salaire et ses fausses dents sont toujours aussi fausses. Bref la vie de Hoke est toujours un beau désert aride dans lequel on trouverait en vain une source d’eau. Est-ce pour cela que le personnage de Moseley est toujours aussi buriné, mal embouché, se levant tous les jours du pied gauche, machiste et à la limite raciste ? On est loin des policiers policés qui pullulent dans le paysage du polar. C’est un homme massif, repoussant qui ferait peur à un crotale. Même la fin ressemble au personnage. C’est aussi un style à lui tout seul, plein d’un humour âpre, parfois très lourd, cynique . Willeford ne fait pas dans la dentelle et c’est ce qui fait son charme et son intérêt. Un intérêt que je partage avec Donald Westlake et Tony Hillerman ; excusez du peu. Au final un roman qui semble avoir été écrit dans un four à pizza chauffé à blanc.