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| | Erri de Luca. | |
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Auteur | Message |
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rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Erri de Luca. Mar 15 Aoû 2006, 15:09 | |
| Erri de Luca, En haut à gauche, Rivage poche/bibliothèque étrangère « Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? » Au point de départ, un cri, (ouie : un cri) celui d’une femme criant Sal-va-to-re-ee sur le quai d’embarquement vers l’Amérique, ou une sonorité du violon du grand père ( le violon) : les associations d’idées déclenchent le récit, une nouvelle de trois ou quatre pages. Celle que je préfère : le panneau. Les jeunes lycéens ont voulu voir, à son insu, les jambes de la nouvelle prof. Le scandale éclate, la punition collective plane si les coupables ne se dénoncent pas. J’aime bien aussi Et la ville ne répondit pas, une nouvelle qui mène de front la vie réelle et une lecture du Voyage de Céline. Sans oublier ces moments de tendresse « La première nuit » du narrateur avec une compagne. Parfois çà se passe plus mal. Après m’avoir laissé le temps d’avaler ma salive, elle me prit la main et me dit : - Citation :
- « je suis impatiente que tu descendes par cette porte, de mon cœur, de ma voiture. Je t’en prie, ferme doucement »
12 nouvelles bien troussées. La traduction, par contre n’est pas sans défauts. Un site qui en apprend beaucoup sur Erri de Luca | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Erri de Luca. Ven 01 Sep 2006, 05:53 | |
| Erri de Luca, Trois chevaux, Folio Du Sud au Nord - Citation :
- « Une vie d’homme dure autant que celle de trois chevaux et tu as déjà enterré le premier »,
dit un de ses amis au narrateur. Ce dernier a eu une vie mouvementée, sans doute inspirée de celle de l’auteur puisque certains thèmes reviennent de « En haut à gauche », ce beau recueil de nouvelles, dans « Trois chevaux » : violences, traques, amours éphémères. Ce livre-ci peut décontenancer par les interférences du passé et du présent. On poursuit cependant la lecture pour comprendre la transformation d’un homme qui porte maintenant un livre dans sa poche revolver. Il venait du Sud et de ses turbulences, il rejoint un Nord plus paisible. Les confidences, comme l’émotion, sont retenues, et le récit terminé, on a du plaisir à le feuilleter et à retrouver certaines phrases et certains passages. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Erri de Luca. Ven 01 Sep 2006, 06:04 | |
| - AdL a écrit:
- Un de ces romans, Montedidio, n'a-t-il pas été adapté au cinéma? Sous un titre différent car je n'arrive pas à retrouver...
Apparemment ce serait l'isola,de Constanza Quatriglio, tourné en 2003 et qui raconte le passage de l'adolescence à l'âge adulte d'un jeune Sicilien. Erri de Luca lui-même, y joue le rôle d'un ouvrier. | |
| | | aérial pilier
Nombre de messages : 582 Date d'inscription : 11/10/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Ven 10 Nov 2006, 14:12 | |
| Montedidio - Editions Gallimard 2002- Je dois être dans une période "poésie" (après une "décalée" ) parcequ'après cette fameuse "Promesse " et suite au dernier post de Rotko sur ce film italien "Libéro" ,j'ai eu subitement envie de me replonger dans l'atmosphère de ce très beau livre qui raconte ,aux travers de courts chapîtres ,l'apprentissage de la vie d'adulte d'un jeune garçon ,livré à lui même ,avec beaucoup de fraîcheur et de sincérité . La aussi ,le lecteur est plongé dans l'ambiance napolitaine avec un sens aigu de vérité.On suit le quotidien de Raffaniello pas à pas ,dans ses épreuves et ses rêves ,dans ses espoirs ou ses tourments ,et c'est très beau ... La façon qu'a De Luca de nous "immerger "dans ce vécu très bruyant parfois ,avec ses mots simples mais justes ,me rappelle celle de Chalandon. Il y a beaucoup de chaleur ,de tendresse dans son langage , mais alors que celui-ci nous parle d'un crépuscule ,le premier veut nous transmettre toute la faculté de vie et d'espoir que peut ressentir ce garçon . Un superbe roman que je conseille pour ceux qui ne le connaissent pas encore ... | |
| | | bertrand-môgendre pilier
Nombre de messages : 435 Age : 68 Localisation : ici et là Date d'inscription : 30/07/2006
| Sujet: au grand galop, j'ai chevauché deux, puis [b]trois chevaux[/ Sam 11 Nov 2006, 09:40 | |
| Erri de Luca : trois chevaux
C'est l'histoire d'une vie de mort ; une mort de l'homme sans âme, où l'espoir a fuit devant la tyrannie des guerriers argentins. "le vent siffle à vous user les oreilles"
Les bruits de mer où grondent les abîmes, mugissent les lourds silences. L'homme prie face aux nuageuses grisailles amoncellées, envisageant le retour de l'acalmie entre les bras réconfortant de la belle Làila. Elle est toute à l'écoute de ce coeur malmené, fourbu : elle en oublierai presque sa vie fragile. Tout en cultivant ses jardins nourriciers, il déterre, grâce à sa muse, les démons et les anges qui le tenaillent. Le goût de la peur laisse en bouche un peu de déjà vu, un gout de reviens-y. Où trouver la sérénité ailleurs que sur un rocher, auquel vous racontez la parenthèse de votre parcours ? | |
| | | bertrand-môgendre pilier
Nombre de messages : 435 Age : 68 Localisation : ici et là Date d'inscription : 30/07/2006
| Sujet: erri de luca : le contraire de un Sam 11 Nov 2006, 09:43 | |
| erri de luca : le contraire de un à chaque situation opressante, Erri de Luca contre balance ses textes cousus de vide, bordés d'immensités désertes, avec des jeux d'espace ponctués d'aventures fugitives, passionnées. Même le regard hors du tableau, les personnages vivent, dociles, présents. Aphorismes récurrent, les nouvelles passent, s'écoulent seules sans l'ombre d'une projection, d'un à deux futur. Sans me permettre de comparaison, j'ai une petite préférence pour le chiffre trois. | |
| | | aérial pilier
Nombre de messages : 582 Date d'inscription : 11/10/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 11 Nov 2006, 14:31 | |
| - monilet a écrit:
- J'ai lu plusieurs livres de cet auteur ( dont Trois chevaux) et je me souviens que j'avais apprécié une sorte de sobriété et de profondeur. Je n'avais pas été étonné d'apprendre qu'il s'adonne à l'alpinisme : solitude, méditation etc
Je ne connaissais trop pas la vie de cet auteur ,mais grâce à ce fabuleux outil de connaissance qu'est le net ,je viens de l'apprendre; Effectivement son parcours est pour le moins atypique . Préférer le monde rude et difficile qu'a été le sien à une confortable carrière de diplomate ,voilà qui traduit une personnalité qui force le respect . Ceci explique celà et, en tout cas, nous révèle pourquoi son écriture est si sobre et si pure ,c'est vrai . Pétrie d'humanité surtout . | |
| | | aérial pilier
Nombre de messages : 582 Date d'inscription : 11/10/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 11 Nov 2006, 14:47 | |
| - bertrand-môgendre a écrit:
- Erri de Luca : trois chevaux
C'est l'histoire d'une vie de mort ; une mort de l'homme sans âme, où l'espoir a fuit devant la tyrannie des guerriers argentins. "le vent siffle à vous user les oreilles"
Les bruits de mer où grondent les abîmes, mugissent les lourds silences. L'homme prie face aux nuageuses grisailles amoncellées, envisageant le retour de l'acalmie entre les bras réconfortant de la belle Làila. J'avais commencé "Trois chevaux " ,mais ,à l'époque ,ne l'avais pas fini . Question de disponibilité d'esprit ,sans doute . C'est vrai aussi qu'il y a un problème d'interférences passé-présent ,je n'étais pas rentrée dedans ... ...Mais tes posts sont si beaux que j'en ai des regrets . Merci ! | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Jeu 21 Déc 2006, 22:32 | |
| Au nom de la mèreC'est de circonstance, j'ai choisi ce livre cet après-midi, mon premier Erri de Luca! L'histoire de la Nativité. par Daniel Rondeau (LIRE): Cet incroyant cherche dans la Bible des émotions neuvesLecteur assidu de l'Ecriture sainte, écrivant dans l'ombre d'un dieu auquel il ne croit pas, Erri De Luca tisonne le feu des mots, les plus simples et les plus sacrés. [...] Au nom de la mère, court récit sur la nuit de Noël, prolonge ce livre d'émotions et de rencontres. Il était long, le chemin de Nazareth à Bethléem. Erri De Luca le raconte en quelques stances. La visite de l'ange, le goût des mots qui vient à Marie, son calme («Me voici prête, argile avec une âme de fer, les pierres qu'on voulait me lancer se sont brisées»), l'enfant et sa mère enveloppés dans «une chaleur de bêtes», leur face-à-face de quelques heures, les paroles de Marie à son fils, auxquelles un vers de Joseph Brodsky fera écho, deux mille années plus tard: «Habitue-toi, fils, au désert». C'est le paradoxe d'Erri De Luca: chaque page de cet incroyant est une prière. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Ven 22 Déc 2006, 15:47 | |
| Mamm'Emilia En toi j'ai été album en, oeuf, poisson les ères sans limites de la terre j'ai traversé ton placenta hors de toi je suis compté en jours. en toi je suis passé de cellule en squelette un million de fois je me suis agrandi, hors de toi l'accroissement à été immensément mineur. Je suis éclos de ta plénitude sans te laisser vide parce que le vide je l'ai emporté avec moi. Je suis venu nu, tu m'as couvert ainsi j'ai appris nudité et pudeur le lait et son absence. Tu m'as mis en bouche tous les mots par cuillerées, sauf un: maman celui-là le fils s'invente en battant ses deux lèvres celui-là le fils l'enseigne. De toi j'ai pris les mots de mon lieu, les chansons, les injures, les blasphèmes, de toi j'ai écouté mon premier livre derrière la fièvre de la scarlatine. Je t'ai aidé à vomir, à cuire les pizzas à écrire une lettre, à allumer un feu, à finir tes mots croisés, je t'ai versé du vin et j'ai taché la table, je ne t'ai pas mis de petit-fils sur les genoux je ne t'ai pas fait frapper à une prison pas encore, de toi j'ai appris le deuil et l'heure où y mettre fin, je ressemble à ton père, à ton frère, je n'ai pas été ton fils. De toi j'ai pris les yeux clairs pas leur poids à toi j'ai tout caché. J'ai promis de brûler ton corps de ne pas le donner à la terre. Je te donnerai au feu frère du volcan qui orientait notre sommeil. Je te répandrai dans l'air après l'averse à l'heure de l'arc-en-ciel qui te faisait ouvrir grand les yeux "Le contraire de un". (Traduction de Danièle Valin) Pour vous, que veut dire pour vous album enau premier vers? J'aime beaucoup ce poème que je viens de trouver ...mais cette expression est pour moi un mystère. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Dim 24 Déc 2006, 00:22 | |
| Au nom de la mère
78 pages seulement, 78 belles pages.
L'originalité de ce texte, qui relate le moment bien connu de la Nativité, tient au fait que Marie( Miriam) et Joseph ( Iosef) apparaissent enfin comme doués de parole. Ce qui en fait deux êtres très humains. Très charnels . Ils expriment ce qu'ils ressentent, comment ils vivent l'événement, l'un et l'autre. Ils se disent leur amour si grand qui leur permet d'être seuls contre tous.
Miriam parle comme une fiancée puis une épouse amoureuse :
« Mon Iosef, beau et compact à en mourir, serrait ses bras contre son corps, essayait de rester calme, plié comme s’il avait mal au ventre. La nouvelle lui faisait l’effet d’une trombe arrachant les toits.[…] Ses cheveux aux mèches agitées se rabattaient sur son front clair, dansaient devant ses yeux, je les lui arrangeais par des caresses. Il était encore plus beau dans son bouleversement.
« Qu’a-t-il fit d’autre, quoi d’autre ? » demandait Iosef inquiet, la tête entre les mains, les yeux à terre. « Essaie de te souvenir Miriam, c’est important. »
Dans son cas, Miriam pouvait être lapidée.
« Tu connais la loi Miriam ? -Je connais la loi. -A fond ? -Pas aussi bien que toi, pas tous les mots. C’est à vous, hommes, de les savoir par cœur. Je connais les conséquences. »
« Miriam, je t’aime, je te demande ça parce que je te crois et que je veux te sauver. Miriam, ils te traîneront à la porte de Nazareth et te lapideront. Et ils me demanderont à moi de te lancer la première pierre. Tu le comprends, ça ? Tu le comprends ? Tu la connais notre loi. ». Et ses paroles s’étranglèrent pour ne pas finir dans un cri et les laisser sortir. »
Iosef apparaît comme un homme très fort et déterminé, sûr et amoureux de sa Miriam dont il prend le parti en s'opposant à tout Nazareth.
« Je souriais dans ma chambre à mon Iosef qui savait me dire oui à moi et dire non à tout le reste du monde. »
« Miriam, tu sais ce qu’est la grâce ? -Non, pas précisément répondis-je -Il ne s’agit pas d’une allure séduisante, ni de la belle démarche de certaines de nos femmes bien en vues. C’est la force surhumaine d’affronter le monde seul, sans effort, de le défier en duel tout entier sans même se décoiffer. Elle n’est pas féminine, c’est un talent de prophète. C’est un don et toi tu l’as reçu. Qui le possède est affranchi de toute crainte. Je l’ai vu sur toi le soir de la rencontre et depuis lors tu l’as sur toi. Tu es pleine de grâce. Autour de toi, il y a une barrière de grâce, une forteresse. Toi, tu la répands, Miriam : même sur moi. »
« D’où prends-tu la force de rester seul contre tous Iosef ? - De toi, répondit-il. »
Elle parle sans cesse à son enfant tandis qu'elle le porte.
La naissance de Ieshu a lieu dans une étable à Bethléem parce qu'ils ont été obligés de se déplacer jusque là pour le recensement ordonné par les Romains. Miriam part en confiance. Elle accouche seule, coupe le cordon. Elle parle à son enfant toute la nuit, tant qu’elle l'a encore pour elle. Dès le matin, elle sait qu'il n'en sera plus de même...Et juste avant l’aurore, elle prie pour le garder : « Seigneur du monde, écoute la prière de ta servante qui maintenant est mère.[…] Qu’il ne soit personne, ton Ieshu, qu’il soit pour toi un projet mis de côté, une des si nombreuses pensées sorties de ta mémoire. On te prie déjà tellement de te souvenir de ceci ou cela. Oublie Ieshu. » | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Erri de Luca. Dim 24 Déc 2006, 06:25 | |
| Voila une lecture qui tombe à pic - et pas par hasard.
Tant mieux si Erri de Luca parvient à donner du caractère et du relief à Joseph, bien pâlot - et pourtant présent, dans le recit traditionnel. A se demander pourquoi tant d'écoles confessionnelles, de patronages et d'associations, se sont mises sous son enseigne. Serait-ce par sa soumission ? mais c'est là une vertu passive. | |
| | | coline pilier
Nombre de messages : 3986 Date d'inscription : 04/01/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Ven 29 Déc 2006, 19:52 | |
| Montedidio
Montedidio, cela signifie le Mont de Dieu en italien. C’est le nom d’un quartier populaire de Naples. Et c’est là que vit le narrateur. Il a treize ans et consigne par écrit, en italien, "la langue muette des livres » (alors que tout le monde autour de lui ne parle que le dialecte napolitain) "les faits de sa nouvelle vie avec un crayon sur un rouleau de papier que lui a donné l'imprimeur de Montedidio, un reste de bobine".
Pour lui est venu le temps de quitter l’école pour aller travailler. La famille est modeste dans l’Italie d’Après Guerre. L'action se déroule autour des années 50, l’auteur donne quelques repères : les premiers " oulaop ", en Amérique un jeune homme a été fait président, les Russes ont envoyé un chien dans une fusée …. La mère est malade. Le père est docker. Et en une seule année, le jeune garçon se trouve projeté dans le monde des adultes.
Il apprend la menuiserie chez mast’Errico qui a fait une place dans son atelier à un personnage étrange, Don Rafaniello, un bossu aux cheveux roux qui "fait la charité aux pieds des pauvres" en réparant leurs chaussures sans le leur faire payer. Entre l’adolescent et le bossu naît l’amitié. Tous deux rêvent et se préparent, chacun à leur manière, à prendre leur envol. "Du haut de Montedidio, d’un saut vous êtes déjà au ciel."
Rafaniello, survivant de la Shoah échoué au Montedidio de Naples, est persuadé que sa bosse contient deux ailes qui un jour lui permettront de s'envoler pour rejoindre le Mont de Dieu de Jérusalem.
Et chaque soir, sur une terrasse qui domine toute la ville, le jeune garçon, le narrateur, s'entraîne à lancer un boomerang que son père lui a offert. Plus exactement, il s’entraîne à faire seulement le geste du lancer car " dans ce quartier de ruelles qui s'appelle Montedidio, si tu veux cracher par terre, tu ne trouves pas de place entre tes pieds ". Son corps se muscle, se métamorphose et cela n’échappe pas à Maria, une voisine de l’immeuble, 13 ans elle aussi, blessée par la vie et beaucoup plus mature. Tous deux se retrouvent et s’aiment.
« Maria surgit de l’obscurité des lavoirs. Ses treize ans ont plus vite poussé que les miens, elle est déjà dans un corps formé. »
"Elle prend ma tête entre ses mains, l'appuie contre sa poitrine, et sous le gonflement de sa chair qui dépasse, je sens sa respiration, puis le battement dur de son coeur : on dirait quelqu'un qui frappe et j'ai envie de répondre "entrez".
« Maria a de profondes respirations, ma tête monte et descend sur sa poitrine. Elle dit qu’à présent ça va, que maintenant elle fait cette chose, du plaisir des hommes, pour moi, comme ça c’est beau, et pas la saleté du vieux corps du propriétaire de la maison, ses gestes sur elle. »
« Le Père Eternel voit tout Maria », lui dis-je. « Oui, il voit tout, mais si c’est pas moi qui pense à arranger les choses, il reste à regarder le spectacle. »
« Aux lavoirs en décembre, le vent joue au dur, il balaie la poussière par terre, astique la nuit dans le ciel, retire la chaleur des maisons. Il n'y a pas de lune, Maria regarde émerveillée le couvercle de la nuit au-dessus de Montedidio. Tous les deux, sur le toit le plus haut du quartier, nous sommes les sentinelles de la ville. »
« Elle serre, donne libre cours à sa belle force sur mon corps, décharge la fraîcheur de ses mains aux endroits durcis des muscles qui sont tendus pour lui répondre. […] Et moi je me déchaîne en mouvements qui ne sont pas de moi. »
"Maria dit que je suis bien là moi et voilà que je m'aperçois moi aussi que j'existe. Je me pose la question : je ne pouvais pas m'en apercevoir tout seul que j'existais? Il semble que non. Il semble que ce doit être quelqu'un d'autre qui le signale."
La phrase est sobre. Les chapîtres courts. Erri de Luca restitue bien l'atmosphère du quartier et fait vivre des personnages très attachants. Mais son récit prend place entre réalisme et fantastique …voire même mysticisme. Je crois que je vais continuer à lire Erri de Luca! | |
| | | queenieinlove pilier
Nombre de messages : 682 Localisation : Black Hole Date d'inscription : 30/05/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 30 Déc 2006, 07:43 | |
| - coline a écrit:
- Montedidio
"Elle prend ma tête entre ses mains, l'appuie contre sa poitrine, et sous le gonflement de sa chair qui dépasse, je sens sa respiration, puis le battement dur de son coeur : on dirait quelqu'un qui frappe et j'ai envie de répondre "entrez".
« [i]Le Père Eternel voit tout Maria », lui dis-je. « Oui, il voit tout, mais si Rien qu'en lisant ça j'ai envie de découvrir cet auteur moi ! Merci pour ces beaux extraits coline, j'ai tendance à d'abord regarder ça avant de lire l'avis du lecteur. Et là, franchement, j'en ai l'eau à la bouche | |
| | | aérial pilier
Nombre de messages : 582 Date d'inscription : 11/10/2006
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 30 Déc 2006, 09:08 | |
| Merci pour ces extraits Coline de" Montedidio "qui nous transportent bien dans l'univers de De Luca :des mots simples , des sensations fortes , beaucoup de poésie baignée de réalisme . C'est ce qui me séduit ,ce mélange qui rend la vie parfois magique. Et c'est ce que j'ai retrouvé un peu dans " Karoo Boy ", ces descriptions des premiers émois de l'adolescence retranscrites dans toute leur fraîcheur et leur pureté , avec peu de mots ,sobrement mais qui semblent jaillir dans toute leur candeur ( avec un côté plus rugueux ,plus douloureux chez Troy Blacklaws ) Une poésie -réaliste qui touche direct ,mais comme le dit Pascal Garnier ("Comment va la douleur") "La poésie ,c'est la rencontre de deux mots pour la première fois"Je crois qu'elle peut venir de là ... | |
| | | baz habitué(e)
Nombre de messages : 17 Age : 51 Date d'inscription : 03/03/2007
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 17 Mar 2007, 16:23 | |
| Quelle force incroyable dans la description de cette course en montagne avec une jeune femme à peine rencontrée dans le contraire de Un. Quelle force également dans le récit du militantisme d'Erri de Luca (qui nous en apprend de l'intérieur sur la période de l'activisme communiste italien : cf les brigades rouges). et de ce fait quelle déception quand il s'égare à la métaphore des sens avec assez peu de subtilité. Mais c'est cela qui fait qu'Erri de Luca est génial, il est contrasté. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Erri de Luca. Dim 23 Mai 2010, 05:13 | |
| Le Jour avant le bonheur, d’Erri De Luca, traduction de Danièle Valin, chez Gallimard clic ! un regard autobiographique sur Naples. A Naples, dans l'immédiat après-guerre. Un jeune orphelin, qui deviendra plus tard le narrateur de ce livre, vit sous la protection du concierge, don Gaetano - Citation :
- « Naples s’était consumée de larmes de guerre, elle se défoulait avec les Américains, c’était carnaval tous les jours. C’est à ce moment-là que j’ai compris la ville : monarchie et anarchie. Elle voulait un roi, mais pas de gouvernement. C’était une ville espagnole. L’Espagne a toujours connu la monarchie, mais aussi le plus fort mouvement anarchiste. Naples est espagnole, elle se trouve en Italie par erreur. »
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| | | IzaBzh pilier
Nombre de messages : 1193 Age : 58 Localisation : Yonne Date d'inscription : 02/06/2010
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 22 Jan 2011, 12:48 | |
| - rotko a écrit:
- Le Jour avant le bonheur, d’Erri De Luca, traduction de Danièle Valin, chez Gallimard
Je viens de le terminer ce matin, j'ai été déçue. Avec un si beau titre, j'attendais mieux et plus passionnant, plus poétique ? En fait, je l'ai lu jusqu'au bout mais sans intérêt particulier et je ne m'en souviendrai probablement plus sous peu . | |
| | | mimi54 pilier
Nombre de messages : 550 Age : 55 Localisation : nancy Date d'inscription : 11/03/2010
| Sujet: Re: Erri de Luca. Mer 14 Sep 2011, 14:33 | |
| Tu,mio Folio n°5207-144 pages - Citation :
- Je comprenais mal pourquoi la virilité devait ignorer la douleur. Je la voyais appliquée aux hommes, j’essayais de la reproduire quand mon tour venait.
Lorsque j’arrivai sur la plage, mon effort pour me taire m’avait donné de la fièvre et Daniele montra à tout le monde la gloire de ma blessure. La curiosité d’une jeune fille jamais vue jusque-là, le contact de ses mains avec la mienne pleine de trous, chassèrent ma douleur de là aussi. Elle s’appelait Caia.»
Années cinquante, sur une île de pêcheurs. Un garçon de seize ans passe l’été dans la famille de son oncle. Il y côtoie un groupe de jeunes gens, dont Daniele, son cousin, et Caia, une mystérieuse jeune femme d’origine juive. Cette rencontre décisive va amorcer en lui une prise de conscience de la complexité de la condition humaine. Avec une écriture limpide et poétique, ce court roman se lit d’une traite. Il ne s’y passe pas grand-chose, le rythme n’y est pas fulgurant, et pourtant….il sait vous tenir. Le temps d’un été, le jeune garçon va passer sans rendre compte de l’enfance à l’âge adulte. Caia, est une jeune fille juive qu’il va rencontrer, avec qui il va découvrir l’amour, et la nature humaine, dans l’Italie de l’après guerre, où il reste des zones d’ombre. « C’est ainsi qu’on tombe amoureux, en cherchant dans la personne aimée le point qu’elle n’a jamais révélé, qu’elle offre en don uniquement à celui qui interroge qui écoute avec amour. » Il va y laisser l’insouciance et côtoyer les réalités d’un passé encore proche, mais pas encore tout à fait clair Une histoire solaire, qui donne très envie d’approfondir l’œuvre de cet auteur. « La morsure de la murène avait laissé un dessin de trous, une lettre claire sur ma peau foncée. Elle avait mis sa main juste là et c’était le geste le plus intime qu’une femme avait eu pour moi. Elle touchait la surface d’une douleur, une prise nette capable de la raviver comme de l’adoucir. Je suis là, disait sa main sur la blessure, je t’accompagne loin, le temps d’une chanson, et je tiens ta douleur dans ma main. » | |
| | | cleo pilier
Nombre de messages : 3890 Age : 40 Localisation : chez Jeanne........ Date d'inscription : 28/03/2009
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 03 Mar 2012, 18:42 | |
| J'ai lu Au nom de la mère, un récit sur le mystère de l'immaculée conception et de la nativité.
Le récit est centré sur Marie, en tant que jeune femme dont la vie est bouleversée. Joseph choisi de lui faire confiance et de l'épouser malgré la pression de "la Loi". C'est un très joli texte. Les personnage deviennent humains. Marie devient une sorte de fille-mère mariée qui accouche seule. Un récit court qui se lit en une bouchée. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 03 Mar 2012, 19:53 | |
| je crois erri de luca porté sur une recherche spirituelle, et ancré dans le catholicisme. | |
| | | Marilou habitué(e)
Nombre de messages : 14 Date d'inscription : 21/02/2012
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 23 Juin 2012, 15:05 | |
| - rotko a écrit:
- je crois erri de luca porté sur une recherche spirituelle, et ancré dans le catholicisme.
Qu'est-ce qui te fait dire ça ? Sur l'ensemble de l’œuvre ou un récit en particulier ? | |
| | | Luca pilier
Nombre de messages : 2880 Age : 112 Date d'inscription : 15/06/2011
| Sujet: Re: Erri de Luca. Sam 23 Juin 2012, 17:18 | |
| C'est mon Erri à moi ! | |
| | | Alessandro pilier
Nombre de messages : 167 Date d'inscription : 12/12/2009
| Sujet: Re: Erri de Luca. Dim 01 Juil 2012, 16:07 | |
| - rotko a écrit:
- je crois erri de luca porté sur une recherche spirituelle, et ancré dans le catholicisme.
Je ne l'ai pas ressenti comme ancré dans le catholicisme. Je pense que erri de luca est inclassable. Son univers est poétique, politique, mélancolique, spirituel. Il éprouve de toute évidence une poignante nostalgie envers le monde de l'enfance. Les lieux de son enfance ont aussi pour lui une importance extrême. On connait son attachement quasi-fusionnel à Naples mais aussi à la nature. Bref, erri de lucca me paraît plus à l'écoute de la vie qu'à l'écoute de dieu. | |
| | | Luca pilier
Nombre de messages : 2880 Age : 112 Date d'inscription : 15/06/2011
| Sujet: Re: Erri de Luca. Dim 12 Aoû 2012, 12:39 | |
| - Amadak a écrit:
- Une curiosité de femme: ce qui est écrit en bas, Erra Luca, c'est toi?
Oh non, c'est une citation de l'écrivain Erri de Luca. Il a peut-être compté inconsciemment dans le choix de mon pseudo. | |
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| Sujet: Re: Erri de Luca. | |
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| | | | Erri de Luca. | |
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