Dans la gorge du Dragon par Eliot Pattison 10/18 Grands Détectives
Shan Tao Yun était inspecteur de police à Pékin. Grâce à quelques enquêtes réussies, il a pu se forger une certaine notoriété. Mais pour avoir voulu poursuivre et réussir à mener à bien une affaire louche qui aurait pu éclabousser l'intégrité d'un dirigeant du Parti, il est accusé de déviationnisme et envoyé, sans jugement, dans un camp de travaux forcés, le 404ème, pour y purger une peine dont il ne connaît pas la durée. Il y sera condamné à construire des routes sur le hauts plateaux du Tibet; en compagnie de moines bouddhistes dissidents.
Il y endure la peur, la faim et l'épuisement. Il y apprend à admirer le stoïcisme de ses compagnons d'infortune. A s'imprégner de leur philosophie de détachement de soi pour trouver leur "nirvana"
Le corps d'un américain décapité est découvert aux abords du camp. Le sinistre colonel Tan, responsable politique, le seul à connaître les antécédents de Shan Tao, convoque ce dernier, et lui ordonne de mener une enquête et de découvrir le ou les meurtriers. Peu lui importe la victime. Mais il veut mettre tout en oeuvre pour se dédouaner de toute responsabilité. En échange il ne promet rien pour adoucir le sort de Tao, mais promet de sauver la vie des moines co-détenus qui refusent de reprendre le travail pour des raisons religieuses.
L'enquêteur se retrouve donc dans la situation d'un prisonnier, recherchant dans sa prison, sur l'ordre de ses geôliers, celui qui a commis un meurtre qui ne le concerne en rien. Avec la crainte en cas d'échec de disparaître sans laisser de traces. Avec en prime, l'obligation d'interroger ceux qui l'oppriment, qui le punissent, qui l'affament depuis trois ans. Singulière situation.......
Le récit est bien charpenté, le suspense soutenu de bout en bout. L'auteur que l'on présente comme un spécialiste de la Chine et du Tibet, fait étalage d'une solide connaissance de son sujet.
De l'Hillerman chez les sino-tibétains. L'atmosphère cruelle et pesante régnant dans les camps de travail à la manière chinoise est sinistre et angoissante. L’intrigue « policière » ne semble être qu’un prétexte pour fustiger la « colonisation » du Tibet par son puissant voisin.
C'est le premier roman de Pattison édité par 10/18. Deux autres titres de même mouture sont sur catalogue. Je vais surveiller leur parution pour ne pas les rater.
Nota: Ce roman déchirant, cri de révolte contre la barbarie et le sectarisme a obtenu le prix Edgar Arward. ( note de l'éditeur)