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 André Malraux

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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyMer 09 Mar 2011, 05:58

Citation :
j'en suis à la moitié de la Condition Humaine de Malraux ( je me souvenais pas que c'était aussi pénible à lire...je ne lancerai pas le sujet lol )

C'est donc moi qui le fais Wink

A la condition humaine, je préfère l'Espoir, mais je vais relire la condition humaine où la première scène est particulièrement bien réussie à mes yeux. J'avais eu la même impression pour une scène centrale de la voie royale, ce qui me fait dire que Malraux, comme Hugo, excelle dans les scènes visuelles, l'usage des lignes et des plans.

notice empruntée à Wikipedia

Essentiellement autodidacte et tenté par l'aventure, André Malraux gagne l'Indochine où il participe à un journal anticolonialiste et est emprisonné en 1923-1924 pour trafic d'antiquités khmères. Revenu en France il transpose cette aventure dans son roman La Voie royale publié en 1930 et atteint la célébrité avec la parution en 1933 de La Condition humaine un roman d'aventure et d'engagement qui s'inspire des soubresauts de la Chine et obtient le Prix Goncourt.

Militant antifasciste, André Malraux combat en 1936-1937 aux côtés des Républicains espagnols. Son engagement le conduit à écrire son roman L'Espoir, publié en décembre 1937, et à en tourner une adaptation filmée Espoir, sierra de Teruel en 1938.
Spoiler:
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 10 Mar 2011, 17:11


En mars 1927,

l'Armée révolutionnaire du Kuomintang sous le commandement de Tchang Kaï-Chek est en marche vers Shanghai. Afin de faciliter la prise de la ville, dont le port représente un important point stratégique, les cellules communistes de la ville préparent le soulèvement des ouvriers locaux.

Mais inquiet de la puissance de ces derniers et gêné dans sa quête de pouvoir personnelle, Tchang Kaï-Chek se retourne contre les communistes.


Comme souvent chez Malraux (Cf. L’ Espoir) on est dès le début plongé dans l’action qu’on vit en temps direct, avec des dialogues opérationnels qui donnent les indications voulues. Avec les dates, 22 mars 1927, c’est une sorte de reportage vécu, concis, aussi déterminé et prémédité que le soulèvement de Shangaï.

Je retrouve les scènes visuelles et l‘amour des lignes,

Citation :
« la seule lumière venait du building voisin : un grand rectangle d’électricité pâle, coupé par les barreaux de la fenêtre dont l’un rayait le lit juste au dessous du pied comme pour en accentuer le volume et la vie »

on relèverait aussi les sons qui témoignent de la vie extérieure.


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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyMer 16 Mar 2011, 16:52

Quelques mots sur Malraux et La Condition humaine, en écho aux premiers commentaires de Rotko :
Je voudrais d’abord rappeler que ce roman a valu à Malraux le prix Goncourt à l’unanimité, ce qui est rare (j’ai en tête Barbusse pour Le feu et Tournier pour Le Roi des Aulnes).
Ensuite, je voudrais souligner que si le contexte historique est complexe, il est pourtant moins important qu’on ne pourrait le croire : ce qui compte avant tout c’est la fiction et ce qu’elle symbolise aux yeux de Malraux. Pour lui, la révolution ouvrière de Shangai (où se déroule presque tout le roman) annonce une révolution beaucoup plus importante, peut-être destinée à s’étendre au monde entier. En 1933, Malraux, politiquement très engagé, est proche des positions du Parti Communiste et il correspond depuis 31 avec Trotsky qu’il rencontrera en 34, un an après la publication de ce roman

Je suppose que nous aurons l’occasion de revenir sur l’épisode historique qui sert de toile de fond au récit mais il me semble qu’on passe à côté du livre si on n’est pas conscient que Malraux entendait avant tout mettre en scène le tragique de la « condition humaine » en menant une réflexion sur l’homme quand il est placé dans des conditions extrêmes. D’où l’allure de tragédie antique plus ou moins perceptible que prend le roman avec un poids de la fatalité très sensible dans certains passages, parmi les plus beaux : Rotko évoque la scène d’ouverture mais je pense aussi à la marche de nuit de Kyo et Katow dans Shangai endormie, à la mort de Tchen et à celle de Gisors ; il faudrait revenir également sur la dernière conversation de May et Gisors… mais ne déflorons pas le livre pour ceux qui sont en cours de lecture !
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyMer 16 Mar 2011, 23:24

bon soir, moi aussi je trouve le livre compliqué, mais très interessant, et la
personnalité de Malraux charismatique, je me suis renseignée et je vous envoie quelques mots de Vargas Llosa, que je viens de traduire, quelques mots qui en disent beaucoup.

Vargas Llosa
La vie de Malraux
Dès que je l’ai lue, d’un seul trait, d’après un livre de Pierre de Boisdeffre, j’ai connu quelque peu de l’auteur et j’ai su que la vie que j’aurais voulu avoir était celle de Malraux. J’ai continué à le penser dans les années soixante en France, quand j’ai du aborder comme journaliste ,les engagements polémiques et les discours du Ministre de la Culture de la cinquième République.

Et je le pense toujours quand je lis ses témoignages autobiographiques ou les biographies qui après celle de Jean Lacouture, ont vu la lumière dans ces dernières années, avec des données nouvelles sur sa vie, une vie féconde et dramatique comme celle des grands aventuriers qu’il a forgée

Je suis aussi un fétichiste littéraire, et des écrivains que j’admire
j’aime savoir tout :ce qu’ils ont fait, ce qu’ils n’ont pas fait, ce que les amis et les ennemis leur ont attribué, et ce que eux même se sont inventé, dans le but de ne pas décevoir la postérité

Je suis donc comblé de l’effusion publique de révélations, délations, et commérages, qui en ce moment renforcent la richissime mythologie de André Malraux , comme si être un remarquable écrivain n’aurait pas suffi. Il a réussi dans ses75 ans de vie( 1901-1976) à être présent, souvent dans des rôles prééminents ,dans les grands événements de son siècle : La Révolution Chinoise, les luttes anticolonialistes de l’Asie, le mouvement anti-fasciste Européen, la guerre d’Espagne, la décolonisation et la Réforme de la France, sous DE Gaulle et laisser une trace sur la face de son temps.
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 17 Mar 2011, 16:19

En cherchant j'ai trouvé un intéressant article dans Le figaro, je le copie
Malraux, un rêveur en action
Charles-Louis Foulon
Par Paul-François Paoli

André Malraux, ministre de l'irrationnel de Charles-Louis Foulon - L'auteur de L'Espoir, autrefois idole de l'intelligentsia de gauche s'est ensuite engagé au service du gaullisme.
Il y a des coups de foudre en amitié comme en amour. Ainsi entre Malraux et de Gaulle, qui se rencontrèrent, en 1944, pour ne plus se quitter.

Devenu l'homme du général, en qui il voit une synthèse grandiose de Jeanne d'Arc, Saint-Just et Clemenceau, Malraux va se mettre à dos l'intelligentsia de gauche dont il avait été une des idoles, en devenant le chef du Rassemblement du peuple français, en 1947. Puis, après la traversée du désert de De Gaulle, le plus fameux ministre de la ­Culture de la Ve République.

Ce face-à-face entre les deux hommes est au cœur du livre de Charles-Henri Foulon, qui retrace l'action de Malraux en tant que poète engagé au service du gaullisme, et dont le titre dit l'essentiel : ministre de l'irrationnel. Irrationnel:le mot va comme un gant à Malraux qui n'était pas un imposteur, mais un rêveur en action chez qui l'imaginaire et le réel étaient inextricables. «Ce qui pèse en l'homme c'est le rêve», écrira Bernanos. Malraux rêve la France à travers de Gaulle, qui rêve Malraux en Chateaubriand. Agnostique, voire athée, Malraux est hanté par le néant, comme l'auteur des Mémoires d'outre-tombe. Mais, contrairement à lui, il croit en l'Histoire et qu'à travers l'action les hommes peuvent se tenir un peu au-dessus d'eux-mêmes. La querelle sur le fait de savoir s'il est devenu «de droite» avec de Gaulle, alors qu'il était «de gauche» en Espagne n'a pas de sens, nous rappelle ­Foulon, qui met en évidence la mesquinerie d'une certaine gauche à l'égard de Malraux. Car ce livre est aussi celui d'un autre face-à-face qu'entre de Gaulle et Malraux : le duel entre un solitaire de génie et le couple Sartre-Beauvoir.

«L'anti-Sartre»

Il faut lire les textes de Sartre contre celui qui s'est lui-même proclamé «l'anti-Sartre» pour comprendre de quel côté était la haine. En 1963, Sartre, dont les faits de résistance à l'occupant furent minimes, déchaîne son «antifascisme» contre de Gaulle. «Je veux être au Brésil l'anti-Malraux pour effacer ce que celui-ci a fait en mettant la culture française au service de la guerre d'Algérie », écrit Sartre. Au-delà de la joute idéologique, Foulon retrace l'action parfois brouillonne, mais toujours généreuse, de Malraux comme ministre. Depuis les maisons de la culture à ses voyages à l'étranger, en Inde, au Mexique, ou en Chine, périples au cours desquels Malraux imagine qu'il transporte la France avec lui. Le grand reproche qu'on peut faire à Malraux et que Foulon ne lui adresse pas assez, c'est quand même d'avoir largement sous-estimé les caractères criminels des régimes chinois et soviétique et d'avoir enjolivé Mao. Comme tous les voyants, Malraux ne voyait que ce qu'il voulait voir. Pourtant comme l'écrira l'écrivain Louis Guilloux : «On pardonne tout à Malraux.» Pourquoi ? Parce que c'était lui. Et que sans ses folies et ses extravagances, il n'aurait pas été Malraux.

André Malraux, ministre de l'irrationnel de Charles-Louis Foulon, Gallimard,
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptySam 19 Mar 2011, 16:32

La condition humaine

je ne suis pas arrivé aussi loin que Nicyrle : elle a une vision complète de l'oeuvre et c'est bien agréable pour une lecture accompagnée. Je viens de finir la deuxième partie, très sensible à l'art du récit par les sensations, et j'annonçais l'importance des sons :

« Le silence revint, mais il semblait qu’il ne fût plus le même. Un bruit de sabots de chevaux l’emplit, précipité de plus en plus proche Et comme après un tonnerre prolongé le déchirement vertical de la foudre toujours sans qu’ils vissent rien, un tumulte emplit d’un coup a rue, fait de cris emmêlés, de coups de fusil, de hennissements furieux, de chutes : puis pendant que les clameurs retombées s’étouffaient lourdement sous l’indestructible silence monta un cri de chien qui hurle à la mort coupé net : un homme égorgé » p.79 Folio.

Ainsi est-on au courant de l'action comme p.112 : Les bruits traduisent l'avancée puis le recul des soldats, à cause du train blindé.

Oui, l'importance du contexte historique, des alliances opportunistes entre des ennemis objectifs (Chang-Kai-chek et les communistes) dont on prévoit les ruptures. Pour l'instant, sans doute voit-on le dessein politique, mais la question sociale me paraît primordiale :

« Cachés par ces murs, un demi-million d’hommes : ceux des filatures, ceux qui travaillent seize heures par jour depuis l’enfance, le peuple de l’ulcère, de la scoliose, de la famine. »

Elle nourrit bien des discussions (plus intéressantes que les rapports de Ferral et de Valérie !), est l'enjeu des objectifs politiques. Par ailleurs, on débat pour chacun du sens de la vie, de la vérité de chacun...

je relève la notion de dignité : elle me parait relier Malraux à alaa-el aswany dans l'immeuble Yacoubian par exemple où Taha doit (impératif moral personnel), par l'assassinat de son tortionnaire, retrouver sa dignité. Voila une notion que l'on comprend, même si elle ne justifie pas tout.

dans la condition, la dignité est mentionnée fréquemment, dont p. 228 " ma dignité, c'est de les tuer tous".
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 31 Mar 2011, 08:12

Citation :
p. 228 " ma dignité, c'est de les tuer tous".

En fait, cette dernière citation de König est une caricature puisque ce chef de la police veut se venger d’une humiliation due à sa propre conduite. Il en devient un bourreau sanguinaire inexcusable.

Dans la condition humaine, l’éventail des personnages est large pour devenir représentatif et illustrer une conception de la vie.

A ce que j’ai compris, la vie ne vaut rien, elle déçoit, si les actes accomplis qui en font la valeur ne sont pas dignes et intenses. C’est pourquoi donner un sens à sa mort devient le problème crucial qui change la donne et transforme une vie en destin.

La plupart des personnages ressentent la solitude, le repli tragique sur eux-mêmes, l’impossibilité de communiquer avec autrui, à moins de se livrer corps et âme à une cause ou à une passion.

- Certains optent pour l’ « irréalité », que ce soit le jeu pour Clappique ou l’opium pour Gisors,

- ou le champ du possible avec l’action politique pour Katow, Kyo, Hemmelrich, Tchen. Dans ce cas, le terrorisme devient une sorte de mystique à laquelle on se sacrifie totalement.

Une citation m’a paru révélatrice du romancier sous le visage de Gisors :

Citation :
« La pénétration de Gisors venait de ce qu'il reconnaissait en ses interlocuteurs des fragments de sa propre personne, et qu’on eût fait son portrait le plus subtil en réunissant ses exemples de perspicacité. »

Ainsi les personnages de la condition humaine, par leur besoin de parler, d’écrire, d’imaginer (la mythomanie de Clappique) - et d’agir, renverraient à Malraux lui-même.
(à suivre)
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 31 Mar 2011, 17:11

je dois retouner les pages, j'ai des notes, mais c'est difficile de répondre à la question de la
condition humaine, très complexe. Chacun peut l'interpreter à son gré. Peut-être la condition humaine est d'accepter la solitude absolue, de se savoir responsable de ses décisions, de faire face tout seul à la redoutable liberté de choisir.

Tout ce qui fait partie de l'être humain, les convictions, l'héroïsme, la crainte, la douleur, les banalités, la lâcheté, la dignité, Malraux en fait une description qui correspond bien à la réalité historique de l'époque.
(à suivre)
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MessageSujet: andré Malraux   André Malraux EmptyJeu 31 Mar 2011, 21:51

Les personnages sont dévoués à leur besoin de justice, à délivrer le pays de la famine et la corruption, Tchen ancien croyant, athée maintenant, une fois qu’il a tué n’a plus horreur du sang,il est prêt à jouer sa vie pour la « cause » . Toutes ses déceptions le poussaient à l’action, l’espoir d’un monde meilleur donnait un sens à sa solitude.
La solitude pour Gisors, frustré de sa carrière de professeur, se délivrait par l’opium

une citation à la page229:

Citation :
"un homme est la somme de ses actes, de ce qu'il a fait, de ce qu'il peut faire"
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 31 Mar 2011, 22:39

A propos de « l’importance des sons » comme le signale Rotko, elle me paraît en effet essentielle dans ce roman. Cela va jusqu’à la caricature avec Clappique, vrai personnage de théâtre, identifié par sa voix « bouffonnante, nasillarde, amère ». La surabondance verbale et gesticulatoire (mais il parle pour ne rien dire !) est ce qui le caractérise. Le ton qu’il adopte est précisé (confidentiel, sanglotant, éploré…) et même ses tics de langage (clas-sique, p’petit… ).
On peut aussi remarquer que de nombreuses scènes (vocabulaire théâtral que j’emploie à dessein) se déroulent la nuit ; du coup, la voix des personnages prend une importance capitale avec, en contrepoint, leurs silences ; je pense en particulier à deux dialogues entre Kyo et Katow puis entre Kyo et Tchen. On entend la voix intérieure de Kyo et quand il y a dialogue, il ne s’agit en fait que d’un double soliloque qui met en valeur la solitude de chaque personnage.
Autre passage très révélateur, celui où Kyo ne reconnaît pas sa voix enregistrée (de façon symétrique, Gisors confie qu’il lui est arrivé de ne pas reconnaître son visage vu à l’improviste dans une glace), façon d’exprimer qu’on ne connaît pas ce qu’on offre de soi à autrui et, par conséquent, qu’on est d’une certaine façon dépossédé de sa propre personne.

A propos de la dignité, il en est en effet beaucoup question dans ce roman. Elle est fondamentale pour Kyo, lui qui voue sa vie à donner à chacun de ses hommes « la possession de sa propre dignité ». C’est lui encore qui dit : « Il n’y a pas de dignité possible, pas de vie réelle, pour un homme qui travaille douze heures par jour sans savoir pour quoi il travaille ». Sa mort est une forme d’apothéose, une mort assumée puisqu’il en choisit le moment : « Il écrasa le poison entre ses dents comme il eût commandé. » Clappique disait de lui qu’il était communiste « par volonté de dignité » à un König qui considèrait qu’après l’humiliation que lui avaient infligée les Russes rouges en Sibérie, aucun communiste n’avait le droit de lui parler de « dignité ». König avait d’ailleurs demandé à Kyo ce qu’était la dignité et ce dernier s’en était étonné : «Pourquoi m’avoir posé cette question puisque vous n’écoutez pas ma réponse ? » ; le sadisme de König incapable de surmonter son humiliation passée fait de lui un bourreau.
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyVen 01 Avr 2011, 18:05

De nombreuses scèns, sont frappantes, j'ai dans mon esprit le moment où le Belge trouve sa femme et son petit, massacrés.Il passe de l'angoisse à une effroyable. ivresse de libération, maintenant,il peut agir, tuer.à la page254

Citation :
"On peut tuer avec amour.Avec amour, nom de Dieu!!"

Citation :
Une réponse de Kyo à son bourreau sur la dignité à la page288

Köning lui demande-Qu'appelez-vous la dignité? Ça ne veut rien dire!
- Le contraire de l'humiliation, dit Kyo.
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyDim 03 Avr 2011, 15:53


Excellente citation, Amadak, qui corrobore les remarques de Nicyrle pilotant notre lecture accompagnée.

Le thème de la dignité (le contraire de l’humiliation) implique la Révolution pour les personnages -Tchen, Kyo, Katow, avides d’action. Ainsi ils échappent à la solitude et réussissent leur propre mort.

Citation :
« Chacun de ces hommes avait rageusement saisi au passage la seule grandeur qui pût être la sienne ».

Les autres personnages - Ferral, Clappique, et Gisors, optent pour être les jouets (parfois non dupes en ce qui concerne Gisors) d’une évasion hors du monde réel. Si Ferral et Clappique échappent à la mort, ils n’en ont pas moins échoué dans une existence terne et solitaire, même si parcourue des frémissements inassouvis et porteurs de déboires que sont, pour eux, respectivement le jeu et l‘érotisme.

Gisors assume la condition humaine, ie la solitude et la souffrance, qu’il tâchera de supporter avec l’opium.

Les trois figures dominantes sont, à mon sens, les trois hommes d’action :

si le but initialement fixé (la Révolution) n‘est pas atteint, ils échappent à la solitude par une mort réussie qui les unit aux autres.

De plus, leur échec stratégique ponctuel laisse place à un espoir, puisque les survivants, Hemmelrich et May, décident de reprendre la lutte entreprise.

La condition humaine 1933
Camus la peste 1947.

Je trouve que Camus a hérité dans la peste de la leçon de Malraux,

- en présentant plusieurs personnages dont il accepte les différents itinéraires,

- et par des scènes de débat d’idées ou intenses par l’émotion qu’elles suscitent.(notamment sur le thème de la mort.)
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyDim 03 Avr 2011, 17:43

Pour ma part, je distinguerais Tchen des autres personnages en ce qui concerne le thème de la solitude. Il est, si j’ose dire, le plus seul de tous et revendique cet état. Dans le roman, l’expression « Il n’était pas des leurs » revient plusieurs fois à son sujet. Certes, c’est un révolutionnaire, mais il se différencie du groupe. Dès la scène du meurtre qui ouvre le roman on comprend qu’ il n’accomplit pas un acte révolutionnaire en vue de servir une cause mais un sacrifice : sa lucidité lui en a fait prendre conscience :
Citation :
Tchen découvait en lui, jusqu’à la nausée, non le combattant qu’il attendait mais un sacrificateur.
Quand il passe à l’acte tout s’enchaîne comme s’il tuait pour tuer et non pour accomplir une mission à laquelle il ne pense pas un instant. Il n’entend même plus les bruits de la ville, comme déconnecté de la réalité et des autres.
Après le meurtre, il se sent totalement différent d’autrui :
Citation :
Il pouvait renseigner ces hommes mais il ne pourrait jamais s’expliquer.
Son retour parmi eux (quand il va dans le magasin d’Hemmelrich) est significatif :
Citation :
Leur présence arrachait Tchen à sa terrible solitude, doucement, comme une plante que l’on tire de la terre où ses racines les plus fines la retiennent encore.
Il est question d’arrachement, geste violent, et la belle métaphore de la plante encore enracinée assimile sa solitude à une terre nourricière.
Dans toute la suite du roman, il est clair que Tchen n’aura plus jamais sa place nulle part :
Citation :
Le monde qu’ils préparaient ensemble le condamnait, lui, Tchen, autant que celui de leurs ennemis.
Au moment de son attentat-suicide, sa solitude est si totale qu’elle touche à une forme d’absolu :
Citation :
Jamais il n’eût cru qu’on pût être aussi seul.
Pour Malraux, tout acte quel qu’il soit ramène l’homme à sa solitude fondamentale d’être éternellement séparé des autres comme de lui-même, c’est une des dimensions de l’absurde et l’on pense à Camus, bien sûr.
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyLun 04 Avr 2011, 05:16

tu possèdes bien ton sujet et tes citations sont imparables. cheers

Quelques remarques :

- Tchen est le premier qui se livre à l’acte de tuer. Il n’ a personne avec qui partager cette expérience. Ce n’est pas un homme de discours ou de parti. Il hait les bourgeois ,

P 87. 
Citation :
« il était mal avec ces bourgeois »

Il se revendique/ou se sent du prolétariat, mais inorganisé (en tout cas pas sous les ordres de l’internationale)

Citation :
« Aucun des ordres ne satisfaisait la passion profonde qui l’avait fait révolutionnaire ».

- C’est un homme d’action, et même de destruction. La scène avec Gisors « à 4 h du matin » sert au romancier à éclairer le personnage. p 51 sq

Citation :
« la destruction seule le mettait d’accord avec lui-même »
p.123

Kyo voit chez lui « la fascination de la mort » . p.129

« il fallait que le terrorisme devint une mystique »p.200 et détruire Tchang-Kai-chek équivaut aussi à se détruire lui-même. Oui, on est bien d’accord là-dessus, c’est écrit noir sur blanc.

Au moins choisit-il cette destruction utile, révolutionnaire, plutôt que le suicide. Je reviendrai sur ce point.
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyLun 04 Avr 2011, 15:58

Tchen dans la condition humaine

Quittons un peu la lettre du texte pour l’interprétation qui, comme chacun sait, met en cause le lecteur lui-même.

La première scène du livre est un choc à la fois pour le lecteur et le protagoniste.

- Tuer un homme endormi paraît plus difficile qu’affronter un adversaire. Sans être un tueur, je crois que le coup de poignard de haut en bas n’est pas indiqué. J’aurais choisi autre chose.

Pas étonnant donc que Tchen en éprouve un traumatisme. Le prétexte est mince, vol d’un papier. D’autres solutions pouvaient être envisagées. J’ai eu l’impression que Tchen avait été instrumentalisé dans cette affaire.

- Second point : un homme « fasciné par la mort », y compris la sienne, pourrait être tenté par le suicide. Or son choix fait de lui un révolutionnaire à l’action décisive. Le calcul est simple : tuer un dictateur sanguinaire, n’est-ce pas trancher le mal à la racine, et donc sauver des vies ? On serait porté à le croire actuellement quand on voit des dictateurs faire tirer sur leurs peuples.

Tchen est, en 1933, l’auteur de ce qu’on appelle les « attentats-suicides »; On ne sait rien des auteurs du 11 septembre, sauf le cas d’un candidat au suicide arrêté avant d’avoir actionné sa bombe :

« Il s’agissait d’un jeune homme, père d’un bébé de six mois et qui avait eu un travail et une famille. La perte récente de son travail l’avait désespéré et il présentait un syndrome dépressif sévère. Ayant perdu goût à la vie et désirant mourir, il souhaitait au moins que sa mort serve un combat politique. Ce récit qui est appuyé sur des expertises crédibles laisse penser qu’au moins une partie des candidats au suicide de ce type à de problèmes de santé mentale sévères comme des troubles dépressifs avec idées suicidaires ».

Les cauchemars récurrents de Tchen en font un individu fortement perturbé.

Vivianne Kovess-Masfety parle aussi (op.cit) de « symptômes délirants qui peuvent prendre la forme d’idées religieuses et politiques » chez des individus que le milieu familial ne prédisposait pas à de telles actions ».

Elle ajoute aussi que tous les cas ne sont pas pathologiques,

Citation :
« il y a des militants sincères qui croient à la nécessité de donner leur vie pour obtenir une rédemption parce que cette croyance est véhiculée par leur culture, leur famille, et leur environnement et que le suicide paraît la seule issue à une situation sans avenir ».

J’ajouterai que le terrorisme est aussi un épouvantail brandi régulièrement par des régimes qui veulent établir une politique sécuritaire qui leur convient.



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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyJeu 07 Avr 2011, 14:19

Je viens apporter un petit grain de sel à vos commentaires et morceaux choisis. Tout d'abord merci à nicyrle pour cet accompagnement agréable.

Le personnage qui m'a le plus frappée est Hemmerlich qui entre en action lorsque sa femme et l'enfant sont tués. En fait, il agit parce qu'il est délié de sa responsabilité dès lors le combat devient aussi son combat. ( Je m'en suis sentie proche parce que souvent je me suis entendue dire que je devais mettre de "l'eau dans mon vin" de par mes responsabilités familiales.)

Il choisit de prendre le risque de mourir mais les "mains libres ". Il m'a émue.

Et puis page 97 il y a aussi cette allusion à mourir les mains libres lorsque Tchen prend le risque de libérer un ennemi qui a pourtant la jambe arrachée :

" cet homme qui hurlait, la jambe arrachée, ne pouvait rester ficelé, c'était impossible.Pourtant une nouvelle grenade n'allait-elle pas éclater d'un instant à l'autre ? " ça ne me regarde pas , pensa Tchen, c'est un ennemi" Mais avec un trou de chair au lieu de jambe, mais ficelé. Le sentiment qu'il éprouvait était beaucoup plus fort que la pitié : il était lui-même cet homme ligoté."

Katow face à ces deux jeunes hommes pleurant sans bruit qui décide de sacrifier sa chance de mourir à moindre souffrance...un "héros" en quelque sorte.

Je ne reviens pas sur Tchen le révolutionnaire jusqu'au boutiste dont vous avez déjà très bien parlé. La scène de l'attentat est difficile à lire.

Une scène que j'ai trouvé très bien décrite aussi ( comme celle qui débute le livre ainsi que celle du train ) c'est l'attaque du poste à la grenade ( que beaucoup ne savent même pas utiliser) (page 105) Tchen va au bout de ses limites physiques totalement habité ( hanté, obsédé )par le combat .

Et puis il y a May au sujet de laquelle Kyo s'inquiète et qui pourtant fera face au contraire de Gisors. May la part féminine de l'engagement politique, bien plus solide qu'on ne le penserait.


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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyVen 08 Avr 2011, 02:50

Très intelligents vos commentaires, Nicyrle, Natalia , Rotko. Un livre difficile à digérer, comme tout livre où la guerre est présente , accompagnée, de malheurs, d’échecs et d’espoir. Malraux place son roman dans un contexte véridique, qu’il connaît bien, et ses protagonistes, sont tous incontournables.
Hemmerlich, sa vie malheureuse, qui lui arrache cette pensée « il existait plus de douleur au monde que d’étoiles au ciel » page181.
Kyo le personnage le plus important du livre, chef, organisateur, dans la vie réelle il sera premier ministre de la Chine,(Chou En Lai) Il voit le monde à travers ses rêves et ses actions.
Amoureux de May, une histoire d’amour et de jalousie.
Gisors ,père de Kyo, philosophe,qui s’évadait de l’angoisse du réel par l’opium ; à la page229 il manifeste que « tout homme rêve d’être Dieu. C’est la recherche de l’absolu pour échapper à la condition humaine, être tout puissant, une voie chimérique qui ne peut s’achever que dans l’échec.
Tchen le terroriste, le kamikaze avant la lettre, luttant pour ses convictions, il va mourir d’une mort violente, Son attentat manqué est bouleversant.
A suivre
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyVen 08 Avr 2011, 04:34

Amadak a écrit:
Kyo le personnage le plus important du livre, chef, organisateur, dans la vie réelle il sera premier ministre de la Chine,(Chou En Lai)

je vois Amadak que tu t'es documentée. Je ne connaissais pas cette identification. Merci à toi.
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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyVen 08 Avr 2011, 22:05

Amadak a écrit:
Kyo le personnage le plus important du livre, chef, organisateur, dans la vie réelle il sera premier ministre de la Chine,(Chou En Lai) Il voit le monde à travers ses rêves et ses actions.
Amoureux de May, une histoire d’amour et de jalousie.
Gisors ,père de Kyo, philosophe,qui s’évadait de l’angoisse du réel par l’opium ; à la page229 il manifeste que « tout homme rêve d’être Dieu. C’est la recherche de l’absolu pour échapper à la condition humaine, être tout puissant, une voie chimérique qui ne peut s’achever que dans l’échec.
Kyo fait évidemment penser à Chou-En-Laï mais il n’est pas Chou-En-Laï, d’abord parce que Kyo meurt alors que le personnage historique reste en vie et poursuit aux côtés de Mao Tsé-Toung la révolution. On dit que Malraux le rencontra en 1965 et fut très déçu. Pour moi, ce personnage romanesque est une construction subtile de l’auteur : il incarne la générosité, le courage, la fraternité, le dépassement de soi, tout en restant lui aussi profondément humain jusqu’au bout, ce qui le rend encore plus pathétique.
Par la drogue, Gisors va bien au-delà de la fuite de l’angoisse ; grâce à elle, il connaît « un accablement sans amertume amené par l’opium à une pureté suprême » ; il atteint l’infini dans la solitude et dans la sérénité. Il incarne le désir profond d’universalité, d’éternité. A mon avis, on ne peut pas parler d’échec à son sujet, d’autant qu’il reste fondamentalement un homme ; je trouve également significatif qu’à la fin du roman, après la mort de Kyo, il trouve un remède à sa douleur dans la musique.
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptySam 09 Avr 2011, 13:55

Ce que je voulais dire c'est que Malraux s'est inspiré de la personnalité de Chou-en-Lai pour Kyo, au moins c'est ce que j'ai lu. et brèvement prétendre d'être puissant,tout puissant, échapper à la condition humaine,et devenir un Dieu, cette prétention ne peut aboutir qu'à l'echec.
Sur les personnages:

Je reviendrai plus tard sur Tchen et Gisors, ils méritent qu’on en parle davantage.
Je m’arrête sur Katow :
Personnage attachant, ancien révolutionnaire, exilé en Sibérie, homme judicieux, ni aventurier ni fanatique, il est le plus équilibré des révolutionnaires, cosmopolite et polyglotte, une générosité, sans bornes l’accompagne. Curieuse manie de dire « ab’olument » dans presque toutes les phrases.
Son action de secourir deux malheureux pris de panique fait de lui un héros, montant à la chaudière.

Clappique :
Le anti-héros, mythomane, caricaturesque, ne voulant s’attacher à rien, cynique et effronté il peut perdre tout sauf le goût pour la vie.
Incapable de dominer les autres et de se dominer lui-même, il trouve son refuge dans le jeu.
Le jeu est le plaisir qui empêche l’homme de penser à sa misère. Le jeu est un suicide sans mort. Le jeu procure au joueur l’intensité de sensations qu’il ne sait pas trouver dans sa vie.
A suivre.

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MessageSujet: Re: André Malraux   André Malraux EmptyDim 10 Avr 2011, 15:37

Natalia a écrit:
Le personnage qui m'a le plus frappée est Hemmerlich qui entre en action lorsque sa femme et l'enfant sont tués. En fait, il agit parce qu'il est délié de sa responsabilité dès lors le combat devient aussi son combat. ( Je m'en suis sentie proche parce que souvent je me suis entendue dire que je devais mettre de "l'eau dans mon vin" de par mes responsabilités familiales.)

Il choisit de prendre le risque de mourir mais les "mains libres ". Il m'a émue.

Et puis il y a May au sujet de laquelle Kyo s'inquiète et qui pourtant fera face au contraire de Gisors. May la part féminine de l'engagement politique, bien plus solide qu'on ne le penserait.

Hemmerlich a quelque chose de déchirant : il a longtemps été l’éternel humilié, l’échec a jalonné sa vie depuis le début (mauvais élève, simple manœuvre, gazé pendant la Grande Guerre, responsable d’une femme fragile et d’un enfant malade) ; son malheur atteint son apogée quand il trouve sa femme et on fils déchiquetés ; il se retrouve alors dans un tel état qu’il ne peut même pas expliquer à Katow ce qui s’est passé. Etrangement, il se déclare enfin « libre » d’agir, terrible liberté acquise à un prix exorbitant. Mais il veut vivre et y parvient en se déguisant avec les vêtements de l’homme qu’il vient de tuer sauvagement pour « effacer » le sang des êtres chers qu’il a perdus. Dans la lettre qu’il écrit à May, Peï explique que pour la première fois de sa vie, Hemmerlich, qui se trouve en Union Soviétique avec lui, travaille en connaissance de cause ; il donne enfin un sens à sa vie.
Natalia, tu as raison, il faudrait revenir sur May (Allemande comme la première femme de Malraux), personnage très important dans le roman pas seulement comme révolutionnaire en lutte mais aussi comme femme intelligente et cultivée (elle est médecin) qui n’a besoin de personne, éprise de liberté d’abord dans sa propre vie, ce qui ne l’empêche pas d’être une amoureuse sincère. Le couple qu’elle forme avec Kyo est une grande réussite : ils se font souffrir mais il passe entre eux une tendresse émouvante, un respect mutuel qui va très loin. A la fin du roman, elle représente la vie et l’espoir, Gisors le sent et en témoigne symboliquement en prenant son visage entre ses mains et en l’embrassant, « exactement » de la même façon que Kyo « le dernier jour ».
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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyMer 13 Avr 2011, 01:45

Tchen

Elevé à la chinoise, il a une haine solide contre la Chine traditionnelle. Instruit par un pasteur chinois, il a l’horreur de la chair et la passion du Christ jusqu’à ce que Gisors substitue en lui la passion politique à la passion religieuse.

Ses traits favorables sont: l’amitié pour Kyo et l’affection pour Gisors. Il risque sa vie pour la Révolution.

En décidant de tuer Chang Kaï-Shek, il réveille les pulsions de mort qui gisaient en lui. Il devient possédé par son meurtre, il est fasciné par le terrorisme.

Il veut transformer le terrorisme en acte exemplaire.

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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyMer 13 Avr 2011, 01:51

Gisors

“Masque d’abbé ascétique dont une robe de chambre en poil de chameau accentuait le caractère.”

Plusieurs personnages se mêlent en Gisors: le père, le maître, l’intellectuel, l’artiste, l’opiomane.

Il aime profondément son fils, Kyo.

A moitié marxiste, esthète et intellectuel.

Il forme des êtres. Sa passion est celle de comprendre. Il cherche la vérité des êtres, leur originalité.

Gisors est le plus intelligent des personnages trop intelligents de Malraux. Son intelligence est souveraine, son pessimisme – lucide.


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MessageSujet: andré Malraux   André Malraux EmptyMer 13 Avr 2011, 02:42

Ferral

Caractérisé par la volonté de puissance. Personnification du capitalisme et de l’impérialisme. Son rêve: des affaires politiques par l’intermédiaire de la presse qu’il rêve d’asservir.
Il veut la toute-puissance, non la puissance.

Il estime l’intelligence, mais elle est avant tout pour lui la possession des moyens de contraindre les choses ou les hommes.
Sa volonté de domination lui ouvre la voie vers l’érotisme, mais non pas vers l’amour.
Il veut la soumission de la femme et il est rancunier
avec sa maîtresse : l’épisode des perroquets page220 montre à quel point il l’est.

Grand brasseur d’affaires, moins intéressé par le succès matériel que par le risque et le goût du triomphe.


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MessageSujet: André Malraux   André Malraux EmptyMer 13 Avr 2011, 04:25







^
A Kobé

Gisors chez le peintre Kama, trouve un refuge dans la musique et la peinture, May est avec lui prête à continuer la lutte. Gisors ,nonobstant, reste pessimiste, il réfléchit .sur les souffrances de l’homme, parce qu’il pense : « que de souffrances éparses dans cette lumière disparaîtraient,si disparaissait la pensée »

L’Art donne un sens à la vie.
L’Art oriental délivre l’homme parce qu’il est un système de signes et qu’il traduit l’accord du peintre avec le monde.

Le peintre japonais Kama dit: « Quand je suis allé en Europe, j’ai vu les musées. Plus vos peintres font des pommes, et même des lignes qui ne représentent pas des choses, plus ils parlent d’eux. »
Gisors aime une Japonaise parce que « l’amour, à ses yeux, n’était pas un conflit mais la contemplation confiante d’un visage aimé. »
Toujours blessé par la mort de Kyo, s’adressant â May il lui dit « Il faut neuf mois pour faire un homme, et un seul jour pour le tuer »
Pour Malraux, comme plus tard Sartre, l’homme est la somme totale de ses actes.

Malraux a dit: « Il n’est pas difficile de voir où est le mythe de La Condition humaine: c’est la vulnérabilité de la grandeur, la dégradation des grandes formes de l’espoir, toujours renaissant, des hommes par leur incarnation. »

Dans le roman, le monde, l’action et les problèmes de la condition humaine sont vus par les yeux des personnages.

La solitude, la fatalité, le hasard, la recherche de l’absolu, sujets chers à Malraux planent dans le livre, recherche de la dignité, sentiment prioritaire .




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