La réponse du chêne à Monsieur De La Fontaine

Certes, Monsieur, un jour viendra où je serai déraciné par la violence d’un vent extrême. Moi dont la cime perce insolemment les nuages et va saluer les étoiles, je serai étendu à terre. Moi chêne superbe que courtisent les dieux, je serai foulé par les pieds indifférents des mortels.
La foule de roseaux, qui viendra certainement contempler le spectacle, s’accordera à penser que je n’aurai jamais dû tenir tête au vent. Certains diront même que ce n’est que justice si je paye pour mon intransigeance et mon inflexibilité. La foule, se réfugiant dans l’amnésie, oubliera que, le temps d’un orage, j’ai toujours su protéger ceux que le malheur, le danger, ou un simple besoin de réconfort ont poussé vers moi. Elle ne saura retenir du temps de ma splendeur que mon arrogante stature et mes silences hautains.
Certes ma fin tragique et inéluctable interpelle. A quoi bon résister en solitaire à la terreur, quand on en connait la fatale issue? A quoi bon lutter si mes seules armes se résument à une conscience ? Il me suffirait pourtant de consentir un bout de principe ou troquer une parcelle de valeur contre un océan de quiétude. Pourquoi ne m’a-t-on pas appris à courber l’échine, me mettre à genoux et ramper le temps de la tempête ? Mon salut aurait pourtant été à la clé.
Ma réponse à toutes ces questions, Monsieur, se résume en une seule phrase : Il n’est pas plus tragique que d’avoir l’étoffe d’un chêne et de vivre en roseau. Je suis un repère et un rempart. Je suis le symbole de la conscience universelle, la bannière de ceux qui tremblent dans le noir et dont le seul péché est de chercher le jour, le cauchemar des sans scrupules et des soumis qui mangent dans la main de l’injustice en payant leur tribut en infidélités, trahisons et lâchetés. C’est pour ces raisons là, Monsieur, que je ne peux pas me permettre de me plier ou de négocier. Je lutterai et résisterai jusqu’au dernier souffle, sans jamais douter de la valeur et de l’extrême nécessité de mon action et sans jamais me soucier du venin des uns ou du miel des autres. Je me moque de la haine comme de l’amour qu’on peut me porter. Qu’on érige une statue à mon effigie ou qu’on me raye de la mémoire collective, peu m’importe.

C'est ma toute première contribution. Ne soyez pas pour autant indulgents. Je suis ici pour apprendre.

C'est bien ce que je pensais, tu es trop modeste, et inviter à te chercher des petites bêtes nous ferait passer pour quoi ? hein ! je te le demande ! tu joues l'élève docile, et on jouerait le rôle de personnes doctes et experimentées ?

Ton texte est travaillé, aussi bien dans la langue que dans sa morale (car j'ai compris que tu faisais la morale, une contre-morale, à celle de La Fontaine). Point de concession, c'est un principe qui vaut toutes les complaisances.

GDS* n'est pas specialisé dans l'écriture, mais si d'autres grains veulent donner leur avis, qu'ils le fassent, pour ne pas me laisser exposé tout nu sur la scène

- j'aurai, après que tu m'auras répondu, une remarque à faire, ceci pour te mettre à ton tour sur le gril. (belle expression, on devrait la classer parmi les expressions insolites !)

@ Rotko : merci pour ta réponse. La modestie n'est pas un trait de mon caractère. Je connais ma valeur et je pousse mes limites. Je suis un novice, un vrai, sans réel bagage littéraire. Je viens sur ce forum pour (1) les encouragements (2) les enseignements.

La meilleure réponse que je ferais à un chêne imbu de sa personne est une citation d'Eugène Ionesco : "Qui est le plus sage ? Celui qui accepte tout ou celui qui a décidé de ne rien accepter ? La résignation est-elle une sagesse ?"

je t'envoie un Mp pour ne pas couper l'élan d'autres grains et graines plus au fait que moi des usages de la langue.

J'espère aussi qu'ils te donneront, comme moi, les encouragments que tu mérites.