François Rabelais

On parle souvent de lui, sans lui avoir pourtant dédié un fil specifique.

Pourtant le livre de poche classique présente par exemple un Gargantua qui aide à la lecture : la page de droite comprend le texte avec des notes, et selon les cas on a droit à des éclaircissements utiles sur un mot et son histoire, par exemple dans le chapitre XXXIII "stratagème", ou des rapprochements entre Pichrochole et Charles-Quint.

ce n'est pas une lecture aride, d'autant que - toujours Gargantua, chapitre XXXIII) on a droit à des récréations : quand pisse la jument de G, ses adversaires sont emportés dans la crue urinale du fleuve...

ch XXXIII

on a droit ensuite à des gags qui annoncent Charlot :

- Précision du geste salvateur,

Citation :

« Le cheval enfonça le pied droit jusqu’au genou dedans la panse d’un gros et gras vilain, qui était là noyé à l’envers, et ne pouvait le tirer hors : ainsi demeurait empêtré, jusques à ce que Gargantua, du bout de son bâton, enfondra le reste des tripes du vilain en eau, cependant que la jument levait le pied.

- et guérison miraculeuse

Citation :

Et (qui est chose merveilleuse en Hippiatrie) le dit cheval guérit d’un surot qu’il avait en celui pied, par l’attouchement des boyaux de ce gros maroufle »

Je me souviens avoir été émerveillée par ma lecture de Rabelais...cela dit, il mériterait sûrement une relecture, car il est certainement difficile de tout percevoir! On peut le lire de façon totalement ludique et puis de façon plus "attentive", c'est ça qui me plaît ... J'aime beaucoup son système de listes, je me rappelle celle évoquant tous les objets avec lesquels se torche Gargantua (il me semble)

Marie kiss la joue a écrit:

... J'aime beaucoup son système de listes, je me rappelle celle évoquant tous les objets avec lesquels se torche Gargantua (il me semble)

oui, le torche-cul in Gargantua, chap. XIV et XV.

L'edition du livre de poche classique fournit aussi pour des
étudiant(e)s en lettres des remarques sémantiques très utiles,

tout en parlant des tracasseries subies par Rabelais, proches des luthériens, depuis l'affaire des "placards" : injures contre la religion et la messe, affichées sur la porte du Roi, ; Ce serait une manipulation des catholiques pour faire réprimer leurs adversaires.

Je remets ce fil au goût du jour. ^^

Gargantua, je l'ai lu à 17 ans, durant ma première année en classe prépa. J'en garde un mauvais souvenir. La prof nous avait demandé d'acheter une édition "bilingue", ce qui m'arrangeait bien, car je ne comprenais pas le texte en V.O.

Et voilà que je retrouve, à 22 ans, notre ami Rabelais, avec Le Tiers Livre. Il faut conjurer ses peurs comme on dit. Et moi, j'ai peur des auteurs du XVIe siècle. Ce fut moins terrible que dans mon souvenir ; et là, pas besoin de version bilingue, c'est-y pas merveilleux ?

Dans Le Tiers Livre, point d'intrigue à proprement parler. Le thème central est le mariage de Panurge. Ce dernier cherche à savoir s'il ne sera pas cocu, la réponse devant l'aider à déterminer s'il se mariera ou non. Le tout avec un humour sans failles.

Citation :

Pantagruel rien ne replicquant, continua Panurge, et dist avecques un profond soupir :
- Seigneur vous avez ma deliberation entendue, qui est me marier, si de malencontre n'estoient tous les trous fermez, clous et bouclez ; je vous supply, par l'amour que si long temps m'avez porté, dictez m'en vostre advis.
- Puis (respondit Pantagruel) qu'une foys en avez jecté le dez, et ainsi l'avez decreté et prins en ferme deliberation, plus parler n'en fault, reste seulement la mettre à execution.
- Voyre mais (dist Panurge) je ne la vouldrois executer sans vostre conseil et bon advis.
- J'en suis (respondit Pantagruel) d'advis, et vous le conseille.
- Mais (dis Panurge si vous congnoissiez, que mon meilleur feust tel que je suys demeurer, sans entreprendre cas de nouvelleté, j'aymerois mieulx ne me marier point.
- Poinct doncques ne vous mariez, respondit Pantagruel.
- Voire mais (dist Panurge) vouldriez vous qu'ainsi seulet je demeurasse toute ma vie sans compaignie conjugale ? Vous sçavez qu'il est escript : veh soli. L'homme seul n'a jamais tel soulas qu'on veoyd entre genz mariez.
- Mariez-vous doncq, de par Dieu, respondit Pantagruel.
- Mais si (dist Panurge) ma femme me faisoit coqu, comme vous sçavez qu'il en est grande année, ce seroit assez pour me faire trespasser hors les gonds, de patience. J'ayme bien les coquz, et me semblent gens de bien, et les hante volutiers, mais pour mourir je ne le vouldroys estre. C'est un poinct qui trop me poingt.
- Point doncques ne vous mariez (respondit Pantagruel).
[...]
- Vostre conseil (dist Panurge) soubs correction, semble à la chanson de Ricochet. Ce ne sont que sarcasmes, mocqueries, et redictes contradictoires.