"Amour XX-ELLES" (nouvelle)

Elle pose sa main sur ma cuisse. L’hilarité est telle que je n’y prête aucune attention. Entre bonnes copines, des blagues ou des anecdotes particulièrement comiques amènent le contact, des paumes contre épaules, des croisements de regards, profonds et furtifs, lèvres retroussées, toutes dents dehors.
Ce soir là, après un repas bien arrosé, l’appartement déserté, elle tarde à passer le seuil de ma porte et alors que mon rire se poursuit, je suis saisie par le sérieux vite rétabli de son visage et de ses yeux, pétillant des bulles du champagne venues s’y réfugier. Une ombre incertaine est apparue, aussi distinctement que la pression plus chaude au niveau de mon genou.
Elle s’appuie sur moi dans le partage d’une émotion à présent mal agencée entre nous deux. Comment, comment lui dire que je ne suis que sa petite sœur de cœur ?
Je lui prends le poignet, un bracelet brûlant qui semble la réveiller. Dans son regard, l’ombre incertaine que je hais, a disparu. Je lui ordonne d’arrêter, le ton lourd. Un couperet tombe sur notre lien.
Je sais qu’elle préfère les femmes, et que depuis toujours, il aurait fallu se montrer prudente, refuser l’emprunt d’une telle coloration pour notre complicité.

Naïfs, les jeunes hommes éconduits ouvrent de grands yeux, à chaque fois : « Toi, une gouine !... ».
Si belle, si féminine et pourtant… Pas faite pour eux ! A leur grand regret, il ne manque rien aux couples des amours saphiques, pour s’aimer.

Elle se lève. Je ferme les yeux, désœuvrée par la situation, l’ego flatté sans me l’avouer. Mais, je me ressaisis. Sous mes joues, avortent les premiers rougeoiements, se repliant, puis revenant avec la colère qui se décide à prendre le relais.

Je la maudis d’avoir fait un pas dans la direction où il m’est impossible de la suivre.

La porte se referme sur elle, sur notre amitié braillant encore au loin, le cou tordu, battant désespérément de l’aile ; affolée par les volées de plumes se balançant doucement dans les airs, retombant, s’amoncelant sur mon paillasson en un triste dépôt, sans vie ni plus aucune couleur.

le XX n'était pas nécessaire, à moins que ce soit une taillle comme XL

tu rends bien la complexité et des réactions et des sentiments. Tu trouveras facilement un ou des tableaux sur ce sujet. Voila une nouvelle bien courte et bien envoyée.
j'espère bien reçue...

Le sujet n'est pas aisé, il y a de la vie et de la finesse.

Merci Rotko et Troglodyte pour les encouragements !
M'en vais lire les autres nouvelles !

je retire ce que j'ai dit bêtement : XX-Elles est un bon titre à cause du jeu de mots XXL.