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| | William T. Vollmann | |
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+4caroline rotko Utopie Le mouton sauvage 8 participants | |
Auteur | Message |
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Le mouton sauvage pilier
Nombre de messages : 1680 Localisation : Au Sud de la Frontière, à l’Ouest du Soleil Date d'inscription : 04/12/2007
| Sujet: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 13:27 | |
| Peu de temps après l’inscription sur ce forum hautement culturel (peut-être même trop pour moi), quelqu’un que je ne mentionnerai pas (U----E) m’a dit que je pouvais accepter quelques petites responsabilités sur ce site (genre modérer une rubrique), parce que les grains étaient sympas, conviviaux, « normaux ». Pas de détraqués, pas de désaxés, ni de spammeurs fous… Cette opinion risque de changer après avoir découvert ce que certains grains (en l’occurrence, moi) sont capables de lire ! Henry Tyler est un privé neurasthénique. Il excelle, non pas dans les filatures, les constats d’adultères et les recherches de personnes disparues comme son métier pourrait le prévoir, mais dans la médiocrité négative. Sans aucune estime de lui, il considère sa vie sans saveur et sans intérêt. Il est même du genre à faire fuir ses éventuels clients plutôt que de les embobiner pour obtenir l’enquête. Ses journées, il les passe dans les tréfonds de San Francisco, dans les bars les plus miteux du quartier chaud de Tenderloin. Jusque là, rien de bien choquant, sauf que ce bon vieux Henry Tyler sera chargé d’une enquête un peu spéciale : retrouver la Reine des Putes. Il va errer dans les bas-fonds de San Francisco à la recherche de cette reine, celle qui deviendra plus tard SA reine. Mais que lui arrive t’il ? Tel un zombie fatigué, il navigue dans la chaleur et la puanteur de ces déchets de la société. Il est proche du précipice, d’un abîme dans lequel il semble incapable de sortir. Son seul tort : aimer Irène, la femme de son frère prétentieux et imbu. Alors lorsque le jour où Irène met fin à ses jours, Henry s’enfonce encore plus dans son gouffre. Peut-être sera-t-il sauvé par sa reine ? Quelle doit être sa rédemption pour expier ses péchés, pour le punir d’avoir aimé sa belle-soeur ? | |
| | | Le mouton sauvage pilier
Nombre de messages : 1680 Localisation : Au Sud de la Frontière, à l’Ouest du Soleil Date d'inscription : 04/12/2007
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 13:29 | |
| Henry Tyler met 200 pages à retrouver cette reine des putes. Alors que va-t-il faire dans les 1100 pages restantes ? Il erre, il s’enfonce, il boit et baise des putes dans le Tenderloin. Il navigue parmi la pourriture tel une âme en peine. Il se clochardise petit à petit, en sombrant de plus en plus bas dans l’échelle de l’humanité. Il cherche sa voie, en même temps que sa foi parmi les autres détritus de la société. Et si en fait la réelle héroïne de ce roman était tout simplement la ville de San Francisco et son quartier chaud de Tenderloin. Je sens cet amour de l’auteur pour ce secteur et la passion qu’il s’est découvert pour ses prostituées. Le langage est cru, celui de la rue des putes, les images plutôt immondes et la morale loin d’être saine. Mais c’est la vie et Henry côtoiera parfois avec plaisir, parfois avec des dégoûts d’autres déchets humains, tel Dan Smooth, un pédophile qui se prétend son ami et qui affirme que sa nièce de 5 ans prenait réellement du plaisir sexuellement. Rien ne lui sera épargné dans le Tenderloin où il découvrira tous les plaisirs sexuels les plus extrêmes dont j’ignorais presque leur existence tels l’ondinisme, la scatophilie ou la coprophagie. Je n’insisterai pas sur l’abject Smooth, ni sur les abus sexuels sur des handicapées mentales ou sur les scènes sado-masochistes. Mais au milieu de toutes les ordures de notre société, ce roman rend l’un des plus bel et vibrant hommage aux prostituées en même temps qu’une vision plus que sombre de la vie californienne. La nouvelle bible de San Francisco. Indispensable !
Elles se prénomment Domino, Kitty, Tournesol, Fraise, Saphir, Oiseau Jaune ou même Chocolat, et font le difficile et peu valorisant métier de « putes ». Sous la plume de Vollmann, elles apparaissent comme les véritables héroïnes de ce roman. Elles sont belles ou laides, parfois grosses et souvent sales, rarement en bonne santé physique ni même mentale. 1300 pages au milieu des putes, je suis un lecteur heureux ! | |
| | | Le mouton sauvage pilier
Nombre de messages : 1680 Localisation : Au Sud de la Frontière, à l’Ouest du Soleil Date d'inscription : 04/12/2007
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 15:15 | |
| quelques extraits... - Spoiler:
Au bout d’une heure, Béatrice, amère et épuisée, était sur le point de renoncer quand un de ses clients réguliers, un veuf d’une cinquantaine d’années dont la bedaine s’incurvait comme une vieille rotonde d’Union Pacific, se gara le long du trottoir. Elle se précipita vers sa voiture. Ils allèrent au Lonely Island Hotel. […] Dans la poubelle, il y avait une capote qui venait de servir et d’où dégoulinait du liquide gluant. Béatrice se déshabilla, s’allongea sur le matelas instable et moisi, et s’endormit aussitôt. Elle rêva de Tournesol. Le type, qui était quelqu’un de bien, resta là un moment à observer sa grosse et belle putain qui ronflait les jambes écartées sur le lit, en remuant presque imperceptiblement son pelvis marbré d’abcès. Puis il déposa trente dollars sur la table de chevet et sortit, en refermant doucement la porte derrière lui.
- Spoiler:
Domino fit glisser une capote sur le pénis de son client avec la langue, entreprit de le sucer, écarta un instant son visage, cligna de l’œil et dit : C’est le pire chewing-gum que j’ai jamais goûté. Le type se marra si fort qu’il débanda. Et voilà le travail, dit Domino. T’es cuit. Hé, une minute, dit le type. Ils regardèrent tous deux son pénis raplapla, comme s’il était en mesure de les sauver l’un de l’autre, mais rien ne se passa. Plus de chance la prochaine fois, dit Domino. Merci d’être aussi correct. Elle se leva et sa jupe retomba sur ses genoux, elle enfila ses talons hauts et s’éloigna à longues enjambées triomphantes tandis que le type restait là incrédule, sa bite à la main.
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| | | Utopie pilier
Nombre de messages : 11113 Date d'inscription : 12/06/2006
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 15:22 | |
| Merci pour les extraits, ton commentaire attire la curiosité, le nombre de pages me laisse un peu rêveuse, surtout que je ne pense pas le trouver à la biblio... à suivre... | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 15:40 | |
| - Le mouton sauvage a écrit:
- je suis un lecteur heureux !
Donc tu n'es pas déç(h)u | |
| | | caroline pilier
Nombre de messages : 432 Date d'inscription : 21/06/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 16:57 | |
| Vollmann, William Gass, Richard Ford, Richard Powers, Thomas Pynchon, Robert Coover, McCarthy, ce sont les auteurs américains contemporains indispensables, le haut du panier. Je n'ai pas encore abordé Vollmann, mais je le ferai par celui que conseille Mouton Sauvage, il donne envie. | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 17:20 | |
| dommage qu'ils ecrivent des pavés !
j'ai eu l'occasion de lire le tunnel, mais devant le volume (mot choisi), j'ai différé.
Aux prochaines vacances, peut-être ? | |
| | | Le mouton sauvage pilier
Nombre de messages : 1680 Localisation : Au Sud de la Frontière, à l’Ouest du Soleil Date d'inscription : 04/12/2007
| Sujet: Re: William T. Vollmann Lun 01 Sep 2008, 18:14 | |
| - rotko a écrit:
- Aux prochaines vacances, peut-être ?
Deux autres pavés de Vollmann pour les prochaines grandes vacances (ou la retraite) : - Central EuropeInstallé au centre de la scène de l'Histoire du XXe siècle telle qu'elle s'est en partie jouée entre l'Allemagne et l'Union soviétique, Central Europe est une colossale machine littéraire qui. en faisant entrer en résonance une trentaine de récits enchevêtrés procède à l'autopsie des mécanismes totalitaires qui ravagèrent l'Europe au siècle dernier. En s'attachant à quelques destins singuliers - dont celui du compositeur Chostakovitch ou du cinéaste Roman Karmen, du général russe Vlassov ou de son homologue allemand Paulus- sur lesquels planent l'ombre à deux têtes du Somnambule ( Hitler) et du Réaliste ( Staline ), le livre entraîne le lecteur sur les complexes chemins que durent, sous l'emprise de dictatures adverses, emprunter des hommes et des femmes dont il fait partager les passions, les doutes ou les aveuglements. Et c'est en choisissant d'interpréter, à la lumière de l'histoire la plus intime comme de l'Histoire collective, le parcours du geste artistique aussi bien que celui de l'action guerrière que Vollmann dévoile l'horizon éthique dont chacun eut, dans ces décennies de fer et de sang, tant de fois à se détourner, afin de poursuivre sa mission ou sa vocation propres... Cette incroyable traversée de l'Europe des guerres et des pogroms. qui brûle de l'éternelle déchirure où s'abîment, à l'heure des choix, des pans entiers de l'humanité, se voit transformée par les puissances de la fiction en un creuset d'où surgit la sidérante cacophonie de l'individu dans toutes les " vérités " qui le fondent. Et c'est pourquoi, si Central Europe réussit, au fil d'une impeccable orchestration, le prodige de se constituer tout ensemble comme une critique éclairée du totalitarisme, comme un surprenant portrait de Chostakovitch et une analyse de la gestation des œuvres d'un compositeur, ou encore comme une implacable radiographie de la conscience créatrice, ces pages peuvent sans conteste également se lire comme un traité d'éthique à l'usage de l'Europe que nous habitons aujourd'hui. - Les Fusils1815 : le continent américain a été cartographié à l'est, à l'ouest et au sud. Parti à la découverte du mythique passage du Nord-Ouest, Sir John Franklin disparaît dans les glaces avec tout son équipage. Alternant l'histoire détaillée de l'expédition Franklin et les tribulations plus contemporaines du capitaine Subzéro, un Américain obsédé par la blancheur apocalyptique du Grand Nord qui vit une histoire d'amour avec une jeune Inuit, William T. Vollmann signe un fascinant roman où récit historique, reportage et fiction s'entrelacent en une étonnante composition pour rendre hommage à la beauté aveuglante d'une région plongée dans la nuit perpétuelle et à un peuple en lutte pour sa survie. J'espère, un jour, pouvoir m'y atteler... | |
| | | caroline pilier
Nombre de messages : 432 Date d'inscription : 21/06/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Mar 02 Sep 2008, 09:15 | |
| Et un petit lien sur Pourquoi êtes vous pauvres, dernière parution de l'auteur mêlant portraits et photos. | |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Mer 03 Sep 2008, 21:04 | |
| Ahhhh ... j'ai lu de lui "la famille royale" puis "les fusils". J'attendais la sortie poche de centrale europe. Je me réjouis du dernier ouvrage "pourquoi etre vous pauvres", que, ma foi, je risque d'acheter plein pot.
Cet auteur me fascine. Il se lance à chaque fois dans des projets fous, avec une documentation monstreuse, et beaucoup d'implication personnelles (il se déplace en personne !). Ce auteur semble acharné de travail, il est tout simplement fascinant. Acharné de travail.
J'aurais du mal à parler de "la famille royale". Je pense que c'est une lecture qui demande une certaine implication. Le roman est long, certes, il relativement répétitif (Il se réveilla avec le goût du con d’Irène dans la bouche), si bien que le livre devient obsédant. J'étais vraiment ailleurs quand je l'ai lu, et ça ne m'arrive pas souvent. Une lecture qui m'a vraiment touchée.
Pour les fusils... ça demanderait aussi pas mal de temps pour expliquer le livre. Une fois encore, très documenté, une grande part aux reves et à l'imaginaire. Cette fois, la nature joue un grand rôle... un roman déboussolant...
Comme le dit Caroline, je pense qu'il est incontournable. Et comme à chaque fois il touche des sujets complètement différents, il donne vraiment envie de lire tout ce qu'il a écrit... | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: William T. Vollmann Ven 05 Sep 2008, 09:14 | |
| - Le mouton sauvage a écrit:
- Henry Tyler met 200 pages à retrouver cette reine des putes. Alors que va-t-il faire dans les 1100 pages restantes ?
1300 pages au milieu des putes, je suis un lecteur heureux ! Combien de temps as-tu mis pour lire ce livre ? je ne vois aucun inconvénient à ce que tu aies eu du plaisir dans le milieu mais je crains de m'imprègner d'une ambiance morbide pendant un long moment. c'est pourquoi je ne lirai pas de sitôt les bienveillantes, par exemple. | |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Ven 05 Sep 2008, 09:48 | |
| La recherche de reine est le fil rouge, mais nous avons aussi il y a aussi le personnage de Dan Smooth, pédophile au service du FBI, la relation très complexe de Tyler et son frère, et biensûr, Irene, la belle soeur au destin tragique. | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Ven 12 Sep 2008, 18:17 | |
| Pour info, un papier sur Vollmann dans l'express, page 94 (11/09/08). Il a mené une enquête dans le monde entier, fréquentant les bas quartiers les plus sordides, pour demander aux gens : "Pourquoi êtes-vous pauvres ?" (titre du dernier livre paru chez Actes Sud).
Non sans rappeler au lecteur, en début de son livre : "Vous et moi sommes riches".
Quelques réponses au gré de ses rencontres :
A une prostituée de Bangkok : - Pourquoi êtes-vous pauvre ? - "Parce que j'étais déjà pauvre dans une vie antérieure"
A un pêcheur de thon au Yémen : - Pourquoi êtes-vous pauvre ? - "Allah fait ce qui est bien pour nous"
A une veuve russe mendiant dans la rue : - Pourquoi êtes-vous pauvre ? - "Parce qu'une gitane m'a jeté un sort"
La dernière question de l'auteur, "dérangeante" : "Pourquoi sommes-nous riches" ?
... | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Jeu 25 Sep 2008, 13:38 | |
| Les nuits du papillon – Vollmann
Un roman étonnant, qui suit diverses déclinaisons. Les thèmes s’imbriquent : désir physique, maladie, mort.
L’intrigue : un photographe et un journaliste partent au Cambodge et au Vietnam. Pour leur travail.
Mais cette épopée sera vite détournée au profit d’un véritable « shoot de sexe », aussi boulimique que scientifique. Il y a en effet comparaison entre toutes les prostituées fréquentées, qui font don de leur corps pour manger et pour tenter d’attirer un éventuel riche prétendant au mariage.
Vollmann est un auteur particulier qui procède par mini épisodes. Souvent répétitifs. Plus ou moins longs, qu’il termine par le mot « fin » et qu’il reprend au paragraphe suivant, en rassurant le lecteur « non, il n’y a jamais de fin ».
Les fils conducteurs de cette histoire : la vente du corps, le désir, la folie du sexe, et le traumatisme.
Des allusions aux horreurs khmères apparaissent périodiquement, comme des taches de sang. Ainsi, cette prostituée, Vanna, qui a quelques entailles sur le dos. Stigmates silencieux, d’une époque où chaque jour était dédié au massacre d’une catégorie humaine : enfants, femmes, hommes. Soigneusement photographiés par le pouvoir avant et après.
Ce livre dégage une odeur de charnier, omniprésente, et pourtant seulement effleurée de la plume. Le carnage des khmers rouges n’a pas besoin d’une quantité de mots.
Le héros est le journaliste. Car il tombe amoureux d’une de ces filles de nuit : Vanna. Il en collectionne pourtant des centaines, mais ne peut pas oublier celle-là.
De retour aux Etats-Unis, il divorce, fermement décidé à la rapatrier, coûte que coûte. Mais entre temps, il perd sa trace, son ombre et la fantasme partout où il se trouve.
Le roman est donc une poursuite. Pas celle d’une chimère, celle d’une femme, qui s’est vendue à lui et qui a touché droit au cœur.
Il la retrouvera, certes. A la fin. Au moment où lui-même sera rongé par le sida. Il retournera au Cambodge, pour l’apercevoir derrière les barbelés d’un camp et s’abandonner avec elle à la mort.
Trop tard pour l’amour fou.
Qu’importe !
Sa quête ne fut pas vaine.
Il faut insister sur l’aspect obsessionnel de cette recherche de la femme aimée. Son aspect foudroyant, crucifiant tout au long du livre.
Parfois, le lecteur se lasse de cette Vanna, qui traîne à droite ou à gauche, dans un bar interlope, mais qui échappe sans cesse au héros. L’auteur a voulu souligner l’addiction à l’amour.
Au milieu d’un climat sordide, vil, abject.
Une littérature franchement hors du sentier battu. Peu de mots pour traquer le sentiment amoureux. Pourtant tenace, aliénant et si sublime.
L’homme qui aime : un papillon de nuit ?
------ | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Jeu 25 Sep 2008, 14:43 | |
| Un PS important : le livre que je viens de lire n'est pas un pavé. 400 pages. Cela retiendra votre attention. | |
| | | Seb pilier
Nombre de messages : 950 Date d'inscription : 26/02/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Jeu 25 Sep 2008, 20:35 | |
| Une question en forme de provocation : Si nous autres, grains qui sommes censés être mordus de lecture, rechignons à lire des "pavés" de plus de 1000, 700, 400 pages, qui les lira? Débuts de réponse: en fait, ce n'est pas tant la taille qui fait peur, mais la crainte de s'engager dans des livres qui se donnent pour ambitieux. Les pavés de Dantec ou de Barbara Cartland, ou encore les Millenium se vendent bien, mais parce qu'ils sont moins littéraires. Autrefois, ces livres effrayaient moins - voir les grandes saga genre Buddenbrock, la Comédie humaine ou les Dostoivevski et autres Tolstoï. Serions-nous devenus paresseux???? | |
| | | Dindon pilier
Nombre de messages : 2737 Date d'inscription : 20/07/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Ven 26 Sep 2008, 07:31 | |
| Ah comme tu as raison ! J'avoue pourtant n'avoir jamais dépassé les 700 pages pour un livre. La raison : trop longtemps dans la même histoire, je m'ennuie. Voilà pourquoi j'hésite à me lancer dans plus. Mais sur le fond, un vrai littéraire ne saurait avancer un argument aussi faible. Je tenterai... On verra si ou si ou encore si . | |
| | | Seb pilier
Nombre de messages : 950 Date d'inscription : 26/02/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Ven 26 Sep 2008, 20:14 | |
| - Arc a écrit:
- Ah comme tu as raison !
Quand je dis "serions-nous devenus paresseux?", il va de soi que je m'inclus dans le "nous" ! Malgré tout, Vollmann me tente plus que Pynchon(ne). J'ai essayé le Tunnel de Gass, j'ai trouvé qu'il y avait de très beaux passages mais globalement pas accroché. J'ai aussi lu les Bienveillantes de Littell et je n'ai pas eu de pb de longueur - c'est quand même très prenant - plutôt la sensation d'être embarqué malgré moi, un peu comme si l'auteur me disait: "tu lis, tu admires mon talent et tu la fermes". | |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Mer 01 Oct 2008, 10:11 | |
| sous les pavés la plage ... | |
| | | rotko pilier
Nombre de messages : 69282 Date d'inscription : 26/12/2005
| Sujet: Re: William T. Vollmann Sam 25 Oct 2008, 17:37 | |
| - caroline a écrit:
- Et un petit lien sur Pourquoi êtes vous pauvres, dernière parution de l'auteur mêlant portraits et photos.
clic ! - Citation :
- Il offre, photos à l'appui, des « instantanés » d'existences vouées à « la difformité, l'invisibilité, le rejet, la dépendance, la vulnérabilité, la douleur, l'indifférence et l'aliénation »,
| |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Jeu 30 Avr 2009, 08:12 | |
| je suis en train de le lire. Ca me met parfois dans des situations inconfortables (le titre est un peu provacateur quand on est sollicité dans les transports en commun !). Pour l'instant, ça me plait beaucoup... On retrouve pas mal de points communs avec ses autres romans (il a toujours été obsédé par la pauvreté), toujours aussi honnête aussi (il dit clairement quand il paie pour avoir des informations).
Affaire à suivre... | |
| | | Seb pilier
Nombre de messages : 950 Date d'inscription : 26/02/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Jeu 30 Avr 2009, 08:21 | |
| - Monique Rannou a écrit:
- (le titre est un peu provacateur quand on est sollicité dans les transports en commun !)
mais moins provovateur que Sachez recevoir vos hôtes dans votre château ou Toutes mes recettes au caviar | |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Dim 03 Mai 2009, 09:43 | |
| - Citation :
- Vous êtes riches ; alors dites-moi : Qu'est-ce que cela vous fait ?
| |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Dim 03 Mai 2009, 10:00 | |
| Un petit extrait (légal)
JE PENSE QUE JE SUIS RICHE (Thaïlande, 2001)
1
La première fois que j’ai rencontré Sunee, j’étais à Klong Toey afin de trouver un pauvre à qui demander pourquoi la pauvreté existait, et elle s’est jetée sur moi, ivre, en tirant sur ma manche et en me suppliant de venir chez elle. D’après mon interprète, c’était sûrement une ancienne prostituée car elle connaissait quelques mots de japonais, et quand elle nous servit de l’eau elle s’écria jovialement, en anglais, exactement comme les entraîneuses des bars de Patpong : Dlink, dlink !
Contre l’avis de mon interprète, je décidai d’accepter la proposition de Sunee. Nous n’étions à Klong Toey que depuis à peine cinq minutes. Une fois dans le plus proche bidonville, qui se trouvait à une cinquantaine de mètres, nous nous sommes retrouvés dans un dédale de rues aux trottoirs humides et affaissés, avec des maisons-boîtes suffisamment proches les unes des autres pour que leurs cloisons se touchent. Les habitants m’inspectaient timidement depuis leurs fenêtres-trous : Voulais-je acheter de l’héroïne ou des petites filles ? Sunee s’est avancée fièrement devant nous en titubant, et se comprimant la poitrine. Deux minutes plus tard nous arrivions chez elle, ou, plus précisément, dans la cabane de sa mère, dont le plafond et les murs se résumaient à des planches clouées ensemble, avec des fentes ici et là pour la plus grande commodité des moustiques thaïlandais. Nous nous sommes assis tous les quatre en tailleur sur un drap en vinyle bleu qui recouvrait le sol en béton. La première chose que je remarquai, ce fut le chat roux et maigre qui se léchait et se mordillait – sans doute avait-il des puces – puis le cercle d’un miroir qui réfléchissait immanquablement la paroi de tôle ondulé (des bocaux sur une étagère), et enfin l’odeur d’eau croupie qui régnait partout. Ce que remarqua mon interprète (qui m’en voulait encore), ce fut les biens domestiques de la mère de Sunee, en particulier les deux ventilateurs, dont l’un, en activité au plafond, avait été allumé par notre hôte en signe de bienvenue ; je devrais également signaler le filtre à eau, la télévision et le minuscule réfrigérateur. L’interprète m’informa d’un air morne que Sunee ne pouvait en aucune façon être pauvre, car Sunee, ou, du moins, la mère de Sunee, possédait plus d’appareils électriques qu’elle ! – Mon interprète était rusée, expérimentée, et, sauf quand l’amertume l’égarait, ne se trompait jamais. Dans ce cas précis, son jugement se révéla aussi exact qu’il avait été péremptoire, car j’appris très vite que la vieille femme était la propriétaire de cette maison ; elle l’avait achetée avec son propre argent. Soit. Elles étaient donc riches. Tout ce temps, Sunee ne cessa de me regarder, en se caressant vaguement les seins par dessus son chemisier, s’essuyant continuellement le visage avec les pans et le col de son vêtement. […] Et sa mère, avec une large grimace affectueuse qui découvrait des dents brisées, regardait fixement la femme ivre. […] Puisque tu es si malheureuse, voudrais-tu devenir une religieuse ? demanda l’interprète.
Non, je ne veux pas. Donne-moi ton numéro de téléphone, me dit-elle. La mère lui toucha le genou d’un air triste ; mais Sunee, ignorant cet avertissement, se mit soudain à quémander et supplier, en se penchant en avant, en faisant des grands gestes, lissant ses cheveux en arrière. Mon interprète, qui aimait et aidait presque tout le monde, y compris les terroristes, ne parvenait pas à éprouver le moindre respect pour Sunee, qui ne cessait de répéter : Ma fille est bonne ; ma mère est bonne. Je suis une ivrogne.
Qu’est-ce que tu aimes boire ? De la mekong ? Le whiskey du coin. Si tu pouvais avoir ce que tu veux, que voudrais-tu ? Elle pressa ses poings contre ses seins et déclara d’une voix pleine de sanglots : de l’argent ! Environ dix mille baht pour l’éducation de la plus jeune. Ma fille est bonne. Ma propre vie n’a pas d’importance maintenant.
Un moustique me piqua le bras. Sunee croyait que j’étais être une sorte de missionnaire chrétien. Sinon, pourquoi un caucasien de sexe masculin aurait-il accepté d’entrer dans cette maison ? Après tout, elle était trop vieille pour être sexy, non ? De même, pourquoi est-ce que je refusais de lui donner mon numéro de téléphone ? Me fixant avec malice ou peut-être avec méfiance, elle s’écria : Jésus a dit, je peux mourir pour les hommes. Moi, aussi, je peux mourir – pour ma fille. | |
| | | Monique Rannou pilier
Nombre de messages : 670 Date d'inscription : 21/04/2008
| Sujet: Re: William T. Vollmann Mer 06 Mai 2009, 21:37 | |
| Je l'ai finin il est bien moins long que ce que je pensais, vu qu'une bonne partie est constituée par des photos.
Je le conseille, comme tous les livres lus de Vollmann... J'ai eu envie de garder des passages. J'ai cru reconnaître les regards dans certaines personnes. Ca m'a rappelé aussi certaines rencontres, en France tant qu'à l'étranger, avec toutes les questions que soulèvent les inégalités.
Ce roman n'est pas dans des considérations politiques ou économiques (meme si il donne quelque chiffres), mais se contente de laisser parler des personnes dépossédées, suite à un prise de contact plus ou moins facile. De nombreuses réponses pour expliquer une pauvreté tout aussi variée.
Je n'ai pas le courage d'en écrire plus ce soir. Ce n'est pas la lecture idéale à lire en ce moment... meme si j'admire énormément l'auteur, qui avoue, sans froufrous ses faiblesses, et montre une fois encore son goût prononcé et sincère pour les sujets difficiles. Il ne cache pas les incohérences des récits, mais conserve toujours cette grande humanité qui me touche beaucoup chez lui, qu'il s'agisse de parler de prostituées, ou de personnes déféquant sur les murs par acte de protestation.
Je l'ai trouvé finalement un peu trop court...
Voilà. Il me reste a lire central europe. Des qu'il sera en poche ! | |
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