Le Crous de Lille a organisé un concours de Nouvelle cette anée sur le thème rouge (thème si vaste!)
Donc voilà ma production. Je l'ai posté avant hier. En espérant qu'elle passera au moins la phase éliminatoire
Rouge AuroreL'aube apparaissait, le soleil s'extirpait du sol. Tandis que ses rayons caressaient le visage des hommes marqué par le sommeil, un oeil s'ouvrit, puis un autre... Kamui se leva et scruta l'horizon. Il tendit la main vers les montagnes que le soleil tentait de dépasser et fit mine de les saisir. Le jour était là, il n'avait plus droit à l'erreur. Le dernier acte était proche. Kamui respira profondément puis sortit de sa poche un ruban incarnat qu'il contempla en pensant à celle à qui il appartenait.
Un homme d'une carrure impressionnante s'approcha doucement de lui. Il était deux fois plus grand que son chef mais la prestance et le charisme de celui-ci l'écrasait et son regard le pétrifiait. Évitant avec soin ce regard, l'homme s'adressa à son chef et ami Kamui :
_Enlevez la de votre tête. L'occident est notre ennemi et elle appartient à ce peuple qui tente de nous détruire.
Kamui caressa le ruban tout en pensant à ses cheveux couleur or.
_Sauf votre respect... commença l'homme.
_Kienzen... Kamui noua ses longs cheveux de jais avec le ruban de la femme de ses rêves et se tourna vers l'homme qui s'était tut en entendant son nom. Je comprends que tu ais peur mais sache que cette guerre n'a pas que des points négatifs. Cette femme ne sait pas qui je suis; même si elle fait partie de ce peuple, elle n'a rien à voir avec le sang versé par les occidentaux. Les femmes ne vont pas sur le champs de bataille.
_ Si les hommes apprennent que vous vous êtes amouraché d'une occidentale...
_Ils n'en sauront rien. En tout cas, pas avant que cette guerre ne soit finie... Et nous savons tous les deux que cette bataille est la dernière.
Kienzen soupira.
_Va préparer les troupes. ordonna Kamui. Je dois aller la voir, seul.
Kienzen frissonna. Cette femme que Kamui avait décidé de consulter était une sorcière aux pouvoirs occultes qui se nourrissait de chair humaine. Tout le monde la craignait et n'osait pénétrer dans les bois où elle résidait.
Kamui lança un regard froid à son ami et bras droit.
_Tu es le mieux placé pour savoir que je n'ai peur de rien et encore moins de cette vieille femme qui vous terrorise.
_Pourquoi y aller si vous ne croyez pas en ses pouvoirs?
_C'est elle qui veut me voir, pas le contraire.
Kienzen interrogea son chef du regard mais celui-ci était déjà plongé dans ses pensées. Il se détourna alors et parti s'occuper du campement. Kamui poussa un léger sifflement et son cheval avança vers lui. Il se mit en selle, lança un dernier regard à ses soldats puis pénétra dans la forêt que tant d'hommes craignaient. Kienzen eu juste le temps d’entrevoir sa silhouette planer à travers le ballet rougeâtre des feuilles de cerisiers brûlées par le soleil d’automne.
Les arbres se faisaient plus denses et la lumière du soleil, à présent haut dans le ciel, n'arrivait plus à percer les branchages. L'obscurité s'installa et le froid étreignit Kamui qui ne savait plus depuis combien de temps il errait dans cette sinistre forêt. Au bout d'un moment, il se retrouva dans un cul de sac. Alors qu'il s'apprêtait à rebrousser chemin, une voix flûtée s'éleva d'un buisson et l'appela. Kamui dégaina son katana et scruta les alentours.
_C'est moi que tu cherches? demanda la voix à côté de lui.
Surpris, il glissa de sa selle. Le commandant en chef de l'armée japonaise se retrouva sur le postérieur alors qu'une vieille, juchée fièrement sur sa monture, le dévisageait avec un sourire narquois. Elle éclata de rire et cracha dans sa direction. Kamui bondit sur ses pieds et fouetta l'air de son katana en direction de la sorcière. La lame frappa la selle à présent vide.
_Kamui! Celui qui réfute l'autorité de Dieu! En personne! aussi lent qu'un vieillard sénile! Pitoyable!
Il fit volte face et fusilla son assaillante du regard. Celle-ci lui répondit par un sourire. Son visage ridé et parcheminé reflétait son grand âge, son corps pourtant clamait une vitalité et une jeunesse intactes. Elle se tenait droite et fière face à lui. Son regard empreint de sagesse gagnée à chaque printemps dissimulait assez mal toute la fourberie de son esprit. Kamui se mit en garde. Une posture parfaite. Il fléchit légèrement les jambes, prêt à bondir.
_Pourquoi une attitude aussi belliqueuse envers moi? demanda suavement la sorcière.
Kamui frissonna.
_ Suis moi.
_Pourquoi vouliez vous me rencontrer? demanda-t-il sans baisser sa garde.
La sorcière, sans faire cas de sa question, s’engagea dans la forêt.
Il décida d'obtempérer... De toutes façons, il n’avait pas trop le choix.
Après quelques minutes de marche dans cette nature vermeille, ils arrivèrent dans une clairière. En son centre se dressait la demeure de la sorcière mais ce qui attira l’attention de Kamui fut le majestueux cerisier qui se dressait à côté. Ses fleurs chantaient encore l’hymne du printemps et le vent ne parvenait pas à faire frémir ses feuilles. Abasourdi, Kamui resta contempler le cerisier pendant un long moment, se demandant comment un tel prodige était possible. Il fut tiré de sa rêverie par le rire moqueur de la sorcière.
_ Il est beau n’est-ce pas?
_ Comment avez-vous … commença-t-il.
_ Peu importe la façon. Ce qui importe c’est le résultat. Ne crois-tu pas?
_ Vous vouliez me voir. Je suis ici. Que me voulez-vous?
La sorcière éclata de rire. Kamui grinça des dents. Cette situation commençait sérieusement à l’énerver.
_ Pourquoi es-tu là?
_ Parce que vous avez demandé à me rencontrer! s’exclama-t-il.
Sa réaction amusa la sorcière.
_ Kamui Li. Général de l’armée japonaise et maître d’armes de l’empereur. Seul espoir pour gagner la guerre se rend chez une sorcière parce que celle-ci a demandé à le rencontrer… Un jour si important … Pourquoi?
Kamui inspira profondément. La vieille femme venait de faire une remarque intéressante. Lui-même ne savait pas pourquoi il était là.
_ Le tronc de ce cerisier est orgueilleux. reprit la sorcière. Ses branches s’avancent vers le ciel dans l’espoir de marquer leur temps et de perdurer dans l’histoire. Mais elles sont freinées par les fleurs, belles et voluptueuses, que tout le monde remarque et que personne n’oublie. Pourtant, sans la branche, il n’y aurait pas de fleur. Tout est donc harmonie mais seule la fleur représente le cerisier. Si la fleur ne séduit pas. L’arbre n’est pas regardé. Il passe inaperçu et le tout tombe dans l’oubli. Une fleur est délicate et se fane vite. Si on l’arrache de sa branche… Elle meurt…
_ Je n’ai pas le temps de déchiffrer vos messages codés sorcière!
_ Tu ne peux pas? Ou tu ne veux pas? demanda-t-elle avec ce même sourire narquois qui l’avait accueillit.
Kamui dégaina sa lame.
_ Pourquoi vouliez vous me rencontrer?
_ Pour te mettre en garde.
Il resserra sa prise sur son arme.
_Oublie là ou tu perdras la guerre.
Profitant du trouble de Kamui elle ajouta.
_Elle causera ta perte et celle du peuple.
En un clin d'oeil il fut sur elle. La sorcière ne pu esquisser le moindre geste. À présent, elle se retrouvait sous l'emprise du maître d'armes, la lame de son katana plaquée sur sa gorge.
_Pauvre fou! lâcha-t-elle avant qu'il ne resserre sa prise sur elle, entaillant légèrement son cou d'où s'échappa alors un filet de sang.
_Donnez moi une bonne raison de ne pas vous tuer! susurra t-il à ses oreilles.
La sorcière éclata de rire avant de déclarer :
_En ce moment, le sang et la passion se mêlent en un rouge parfait. Je peux sentir le goût de la mort, le goût du sang pendant que je te parle. Ne sens-tu pas l'odeur de la chair rougie par le fer?
Kamui poussa un juron avant de la lâcher et bondit sur sa monture.
Il avait perdu toute notion du temps et à cet instant la bataille avait sûrement déjà éclatée. Il lança un dernier regard à la sorcière et lui promit de s'occuper d'elle plus tard. Il talonna sa monture et s'élança vers le champs de bataille. Son rythme cardiaque augmentait au fur et à mesure qu'il approchait du tumulte qui s'élevait de la zone de combat. Kamui se coucha alors sur l'encolure de son cheval et lui chanta une mélopée. Celui-ci, comme envoûté, allongea son galop qui devint irrésistible. En quelques minutes il arriva à destination. Il fut prit alors d'effroi face au spectacle qui se déroulait devant lui. L'armée occidentale avait attaqué par surprise les soldats japonais et se livrait à un vrai massacre. Les hurlements guerriers avaient très vite été remplacés par le fracas des épées sur les boucliers et les cris des soldats qui s'écroulaient, mortellement touchés. Kamui se jeta corps et âme dans la bataille, rivalisant de puissance et de précision. Sa lame ne ratant jamais sa cible et chantant un hymne à la mort à chaque fois qu'elle s'abattait, irrévocable, sur la chair humaine, faisant ainsi jaillir un flot de sang aussi rouge que la passion qui le consumait. Entre deux coups, il lançait des regards circulaires afin d'évaluer la situation. Son regard se posa alors sur Kienzen qui galvanisait les troupes japonaises de la voix. Il avait renoncé à utiliser son bouclier, apparemment trop encombrant, et combattait, sa longue et lourde hache tenue fermement dans ses puissantes mains, avec une telle sauvagerie qu'un vide s'était créé autour de lui. Cette attitude dissuadait les plus audacieux de l'attaquer. Enivrés par son exemple, les soldats japonais se surpassaient. Les occidentaux étaient trop nombreux et la fatigue gagnait peu à peu les guerriers. Entre deux esquives, Kamui cherchait des yeux le commandant de cette armée qui décimait ses hommes. Il trancha une gorge, coupa un bras, brisa une nuque, ramassa un casque à visière et se rapprocha de Kienzen. Alors qu’il arrivait à son niveau, une ombre le frôla. Il eu juste le temps d’éviter le coup mortel par une pirouette. Le cliquetis des lames s’évanouit tandis que les deux adversaires se faisaient face. Tous savaient que la bataille prendrait fin à l’issue de cet affrontement. Les deux guerriers se jaugèrent, tous deux conscients de la force de l’autre. Kamui aurait voulu planter son regard dans celui de son adversaire mais il portait lui aussi un casque à visière. Un silence pesant tomba sur le champ de bataille… Chacun retenant son souffle… Les combattants s’élancèrent. Tout se passa très vite. Kamui évita in extremis la lame de son adversaire qui fit voler son casque et en une courbe parfaite, planta la sienne dans la défense de son armure. Le commandant en chef de l’armée occidentale mourut avant de toucher le sol. Le vent tomba. Kamui, fier et invincible s’approcha du corps de sa victime. Il se pencha, sourire aux lèvres, et retira son casque.
Le temps se fige.
Cascade dorée
Rouge infini
Sourire crispé
Douleur.
Le guerrier pleure et étreint le corps inerte de celle qu’il aime. Sa lame lui a enlevé sa chère après avoir entaillé sa douce et tendre chair. Son cri déchire le ciel mais ne ramène pas sa belle. Sa peine est trop grande. Son regard rougi par les larmes se voile, puis s’éteint.
Kamui ouvrit les yeux. Il se trouvait à nouveau sous sa tente, adossé à une pile de coussins.
Il jeta un coup d’œil à son katana posé près de lui. Sa vue se brouilla.
Mèche blonde. Sourire enjôleur. Éclat de rire. Amour éternel. « Moi aussi » . Afflux de sang. « Je t’avais prévenu! ». Promesse. « Dans trois jours je serai tout à toi ». Douleur. Lame ensanglantée. Tendres baisers. Lèvre rosée. « Je t’aime ». Passion. Poussière. Cris. Mort. « Tu ne m’a pas écouté! »
Kamui sursauta. Il dégagea une mèche de cheveux de son visage. Il était moite... Pourtant l’air était frais. Il inspira profondément, essaya de se détendre... Impossible. L'image de ce corps inerte dans ses bras le hantait.
Aveuglement? Perdition? Les amants s'embrassent et s'échangent des caresses. On se chamaille et la belle esquive un geste d'une pirouette. Interrogation. Sourires. « La danse me procure cette agilité » répond-t-elle. « Tu as été abusé et aveuglé! ». « Je lui ai menti aussi. ». « Tu aurais dû être sur tes gardes! Tu ne mérites pas l'appellation de héros! ». Meurtrier. Impardonnable. Les larmes coulent le long de son visage vultueux. La douleur est trop vive. La souffrance intense...
La nuit sera longue et la torture du guerrier insoutenable. Aussi aiguisés qu'un poignard, les souvenirs blesseront son âme inconsolable.
_ Le jour se lève. déclara Kienzen qui se trouvait près de la tente.
_ L’aube est rouge. signala un soldat.
_ Ses rayons pourpres signaleront au peuple que beaucoup de sang aura coulé cette nuit. Et quand le soleil sera haut dans le ciel, tout le monde saura que l’armée japonaise a triomphé. Festoyez mes amis! Nous sommes vainqueurs! dit un troisième homme.
_ Mais à quel prix? demanda Kienzen
Silence… De toute façon, il n’attendait pas de réponse.
Sous sa tente, à l'abri des regards, le guerrier se meurt. Son visage, posé sur un coussin carmin, s'éteint. Le sang s'échappe de son abdomen et colore le tapis. Son regard semble vide et pourtant... Il se voit sortir et contempler l'horizon. Tendre la main vers les montagnes que le soleil écarlate tente de dépasser et faire mine de les saisir. Mais ce matin les montagnes s'éloignent et un cerisier appairait. Ses branches sont nues et le tronc gémit de douleur. Un regard furtif... Un iris bleu accusateur... L'homme sourit. Ce soleil, il ne le reverra jamais. Sa chaleur n'étreindra plus son corps et ses brûlants baisers ne parcourront plus son visage... Il caresse son katana...
Douce lame….
Dernière larme…
Dernière pensée…
Pour sa bien aimée…
Petit problème de mise en page à la fin... les quatres dernières lignes sont normalement misent autrement.