Li yang: Blind shaft

je ne vous renvoie pas à cineasie qui en dit trop si vous voulez voir le film, ce que je ne saurais que vous conseiller ou alors parcourez rapidement l'article
Precisons quand même que

Citation :

le réalisateur a eu les pires difficultés à venir à bout de ce film et qu'il sera maintenant mis sur la liste noire, déjà longue, des réalisateurs interdits de tournage en Chine.

Il a obtenu la quasi totalité des prix de la 5e édition du Festival du Film Asiatique de Deauville, non pour des raisons politiques, mais parce qu'il est beau et émouvant.

Je l'ai vu hier soir dans un petit cinema maintenu à bras tendus par des benevoles : nous étions quatre dans la salle !!

Dans une mine de charbon chinoise deux travailleurs, des malandrins, ont l'habitude de constituer un trio : le troisieme est une proie qu'ils tuent et ils se servent de sa mort, prétendûment due à un éboulement, pour faire chanter le patron sur le manque de sécurité : ils recueillent ainsi une grosse somme (relative) en échange de leur silence.

Toutes ces données sont établies dés le début du film.

La suite, c'est l'incorporation à cette équipe d'un jeune garçon, timide et naïf, forcé de travailler dans le but de poursuivre ses études.

Les personages sont plus que crédibles : ils sont vrais, et on voit s'ebaucher entre eux des liens humains d'attachement, de compassion, de générosité. L'interrogation sur le sort réservé à ce jeune rend ces instants poignants.

Pas de décors, mais une mine vétuste, peu sûre, avec tous les défauts posssibles, filmée sans complaisance mais sans forcer la note : énormes camions, un bulldozer, des wagonnets à pousser et verser à la main.

La vie est rudimentaire : le bain à plusieurs dans un tonneau, la cuisine sur place, le sommeil commun dans un local sans aucun confort.

Plus bas, c'est le bordel où dépenser le salaire, mais travailleurs comme prostituées envoient une part de leurs ressources à des parents. Nous l'apprenons incidemment par une rencontre de deux protagonistes au guichet des mandats.

Les deux malandrins négocient une passe au bordel pour leur victime

On comprend facilement que le gouvernement chinois ait fait grise mine au réalisateur du film. L'existence même de telles entreprises minières montre le peu de cas porté à la vie humaine.

Si l'Etat s'occupait des règles d'hygiene et de sécurité, le travail et le logement des ouvriers ne serait pas ce qu'il est.
N'allons pas croire non plus que les deux ouvriers soient les seuls malandrins de l'intrigue. Devant la menace de chantage, le patron envisage froidement l'élimination des maîtres chanteurs.

Quel monde !

Et les jeux Olympiques viendront lui donner un certificat d'honorabilité !

*Désolé de te couper dans ton solliloque, Rotko... *

J'avais adoré ce film lors de sa sortie ciné, au point d'aller le revoir une seconde fois.

Par contre, Li Yang a pu faire un deuxième film qui était présent cette année au Festival de Cannes, dans la sélection parallèle "Un Certain Regard". Son titre original est Mang shan, le titre internationale est Blind Mountain. J'ai pu le voir en juin dernier, lors de la reprise de cette sélection au Reflets Médicis à Paris.
Première constatation : les sous-titres et un titre français étaient incrustés sur la copie projeté, ce qui signifie qu'il pourrait avoir une sortie en salles en France (si le distributeur le veut bien). Et le titre français serait Sourdes vallées.
Cette fois-ci il s'agit d'un autre sujet coup de point en liaison avec la situation sociale de la Chine : une jeune étudiante est enlevée par des trafiquants d'être humains et vendue dans un village reculé à une famille de paysans, qui la force à être l'épouse d'un des fils. Elle découvre que plusieurs jeunes femmes, dont certaines sont mères,
ont vécu un sort similaire. Elle a le choix entre accepter son sort, ou trouver le moyen de s'enfuir.

Avec Sourdes vallées, Li Yang signe un film un peu trop répétitif et long, peut-être dans le but de faire ressentir la détresse et la claustration de l'héroïne. Le dénouement, s'il est presque trop rapide, a un côté très dérangeant.
Si c'est moins réussi et semble-t-il moins spontané que Blind Shaft, ça reste un bon film, que j'espère revoir en salle d'ici peu.

rue 89 publie un entretien de Li Yang

Citation :

Mesures économiques et politiques devraient avancer ensemble pour que le changement se produise.

En ce qui me concerne, ça doit aussi s’appliquer à la censure. Aujourd’hui, nous avons la censure, mais il n’y a pas de loi, il n’y a pas de norme. Qu’est-ce qui est permis, qu’est-ce qui ne l’est pas? Cette situation ne correspond pas au discours que tient le gouvernement, une société harmonieuse n’a pas besoin de censure.

Citation :

Mes films montrent les problèmes sociaux de la Chine. Un film ne peut pas résoudre ces problèmes, mais au moins il permet de les mettre à jour. Il y a évidemment une part de critique dans mes films, mais c’est une grande tradition du cinéma.

Sur Sourdes vallées Zero de conduite se montre un peu réticent :

Citation :

Le tableau de l’humanité que dresse Mang Shan n’est pas sans rappeler Dogville de Lars Von Trier : veulerie et cupidité généralisées, concupiscence des hommes, complaisance des femmes. Mais à la différence de la fable du réalisateur danois, Li Yang prend soin de replacer son histoire dans un contexte économique et culturel précis, celui d’un petit village perdu de la Chine du Nord : misère de moins en moins supportable à mesure que l’on se convertit au capitalisme (l’argent est une obsession partagée par tous les personnages), survivance des schémas patriarcaux traditionnels, ravages de la préférence donnée au garçon (encore aggravée par la politique de l’enfant unique), démission des autorités, absentes ou corrompues, qui auraient pu corriger ces travers. Sur ce sujet ô combien scabreux, la mise en scène de Li Yang (déjà auteur du magnifique Blind shaft) évite le voyeurisme.

Citation :

Mang Shan ne donne aucun espoir à ses personnages, ni ne semble tirer d'enseignement des mésaventures de son héroïne. A quoi peut donc servir sa projection dans des cinémas occidentaux, devant un public qui n'est pas concerné par cette situation, et n'y pourra changer grand chose ?

Ce point de vue me semble bien étroit !


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Si j'en crois allociné à propos de Li Yang

Citation :

Le gouvernement chinois a décidé de retarder la sortie de quelques films controversés programmés pendant la période des jeux olympiques de Pékin, en août 2008.

toujours est-il qu'en France, le film "sourdes vallées" ne semble pas être prévu pour sortir en salles.

Ce qui m' a choqué dans l'article de "Zero de conduite" était une sorte de justification de son absence des écrans, comme si on nous disait :

- "vous savez, ces problèmes ne nous concernent pas, et de toute façon, on n'y peut rien !"