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 La vie quotidienne dans les transports en commun

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troglodyte
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troglodyte


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Localisation : Strasbourg
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MessageSujet: La vie quotidienne dans les transports en commun   La vie quotidienne dans les transports en commun EmptyDim 05 Fév 2006, 23:31

Voilà ce que je puis en dire : (les astérisques renvoient aux notes)

"Il va falloir trouver des moyens pour augmenter la productivité, François-Xavier. Soumettez-moi quelques propositions demain, s'il vous plaît", dit Jacques-Henri Soullay de Labranche à François-Xavier Duclos de la Saillie. Instantanément, l'esprit entraisné de François-Xavier se mit en branle, car trouver de bonnes idées était le gage de son succès dans l'entreprise. Il était adjoint au directeur des ressources humaines depuis trois mois déjà, et il comptait bien prendre la place de son supérieur, lequel était sur la touche depuis deux semaines, c'est-à-dire depuis son entrée à l'hospital de la Xylojambe, suite à l'infarctus qu'il avait contracté lors de l'entretien préalable à embauche qu'il avait eu avec Catherine Ziyasse.

En manque d'inspiration, François-Xavier se dirigea vers l'atelier. Il avait remarqué que l'odeur de la sueur des ouvriers décuplait son désir de productivité, ce qui d'ailleurs avait amené le docteur Ningmore à qualifier cette sueur de substance "productisiaque". Passé l'écoeurement dû au caoutchouc des énormes pneus entreposés près de l'entrée, et l'horreur des bidons d'huile de vidange, il vit un groupe de travailleurs s'affairant autour d'un autobus placé à deux bons mètres au dessus des testes, tels des fourmis dépeçant un énorme hanneton. Plus que quelques mètres et il pourrait humer leur sueur... mais quels mètres difficiles à parcourir, dans ces locaux non climatisés et poussiéreux... lorsque soudain un cri lugubre jaillit de quelque part sur sa gauche.

"Merde alors! Mais sortez-le de là!" c'était un mécano grassouillet qui appelait à la rescousse, alternativement penché vers une fosse et vers ses collègues, tandis qu'un gémissement étouffé s'échappait du sol à ses pieds. Dans un effort surhumain, et au risque de salir les semelles de ses superbes chaussures sur une flaque de gasole, François-Xavier, afin de donner l'impression qu'il compatissait au sort malheureux de ses subalternes, se précipita vers le lieu de l'accident, pour découvrir un mécano gisant dans le fond de la fosse, la teste fracassée sur une rampe métallique. Il comprit en un éclair qu'un décès sur le lieu de travail allait entraîner d'important frais à la charge de l'entreprise, et composa immédiatement le numéro interne de Terminalarex, son fidèle bras droit judicieusement placé au poste envié de chef de station. Lorsque ce dernier arriva sur place, accompagné de trois employés du nettoyage travaillant en sous-traitance pour la CPS, il était peut-être trop tard, mais peu importe, il fallait faire disparaître ce corps mort ou vif, et plutôt mort que vif puisque les indemnités à verser pour une victime d'accident du travail étaient colossales. Sur un clin d'oeil de François-Xavier, Terminalarex et ses trois acolytes se jetèrent dans la fosse, fixèrent le crochet du palan à la ceinture de l'infortuné accidenté, le hissèrent au niveau du sol, puis l'emmenèrent promptement tandis que François-Xavier faisait mine d'appeler des secours sur son portable. Il allait maintenant falloir effacer toutes les traces physiques et informatiques de cet employé improductif.

Encore quatre heures trente à tirer, pensait Jacky au volant de son bus articulé rempli à cent vingt pour cent de clients à quatre-vingt dix-neuf pour cent mécontents. Quatre heures trente à survivre dans un véhicule sans climatisation, en plein mois de juillet, avec une température extèrieure de trente-sept degrés celsius et une température intérieure de cinquante degrés celsius, à condition de ne pas être trop près du moteur en surchauffe, aux environs duquel la température avoisinait les soixante degrés celsius. Il fallait tenir le coup... un jour de plus... Aux feux rouges, c'était abominable : mesme pas le petit vent qui venait rafraischir le visage par la microscopique fenestre, Jacky sentait les gouttes de sueurs secrétées par le dessus de son crasne chauve lui ruisseler dans le cou et les yeux.

"Vous allez au Ouaken?" lui demanda un grand blaque avec un énorme sac de basquette en bandoulière, un pied sur la marche et l'autre encore sur le trottoir, achevant prestement sa cigarette. Jacky, devenu maistre dans l'art d'économiser ses forces, lui répondit affirmativement d'un léger hochement de teste. Le SAE* indiquait RH08, ce qui signifiait huit minutes de retard sur l'horaire, ce qui signifiait que si Jacky ne parvenait pas à rattrapper ce retard, il arriverait au terminus du Ouaken à l'heure où il devait en repartir, ce qui signifiait que lorsqu'il arriverait au terminus suivant, Hillkirch Fort Ulrich, il aurait roulé plus de deux heures sans s'arrester, ce qui signifiait qu'il aurait des douleurs aux fesses, des douleurs sous les cuisses dues à la sueur et au frottement sur le fauteuil, des douleurs à la teste dues à une activité prolongée nécessitant une intense concentration. A peine le grand blaque était-il entré, Jacky pressa l'accélérateur, ce qui relascha les freins du bus dans un énorme "PCHiii", et mit en branle l'énorme carcasse brinquebalante sur les bosses et les nids de poules de la rue de Gigovrillé. Cela faisait déjà un an que cette rue était défoncée par des travaux entamés par la ville sans autorisation, travaux qui avaient été stoppés par décision administrative, un an que tous les jours des milliers d'usagers des transports en commun étaient secoués comme des glaçons dans un milquechaque, un an que des paniers de provisions, des cartons à dessin, des lampes halogènes, des téléviseurs seize neuvièmes et autres bagages tombaient dans les bus, un an que des usagers trop ballotés regardaient d'un oeil méchant les chauffeurs dans le rétro, grommelant parfois un "nique ta mère" ou un "j'vais lui fumé sa rasse à ce battar". Pas le temps de faire dans la dentelle, il fallait carburer pour avoir quelques minutes de repos au terminus, Jacky adopta la trajectoire de la ligne droite, la plus courte, et écrabouilla quantité de plots de plastique jaune, ce qui donna l'occasion à une jeune tchava en survette rentré dans les chaussettes, plus virulente que la moyenne, de lancer : "Mat com il C pa roulé il a niké tou lé poto" à sa copine affublée d'un pantalon en jine bleu avec des taches de farines sur les fesses, occupée à envoyer un esse et messe à Grégory, son queume scouteurisé qui suivait le bus depuis quatre arrests. "1?" répondit-elle sans mesme lever les yeux.

"-ila niké tou lé poto jte di! o tu mécout boufonn?
-ouéoué j T entendu en VriT mé atta just 1 peu G po fini mon SMS
-ba léss Bton tout fasson lé tro vil1 ton keum avec C tonbz sur la sefa
-dkoi jme mél? C tro 1 bogoss en fét é toi T tro jalouz en VriT
-jalouz moi? dan T rév Spess 2 mito oim G mouloud tout lé meufe du tiéKr L le kif amor
-ta mouloud? mé ou C kta vu sa oit? i ta doné 1 chmak alor sayé tu T fé 1 fim sur lui?
-po k 1 chmak kilma doné! on é sorti ensenbl jte signal
-aoué? é zett alé ou? o JM3 la teuboi D bléro?
-mé T trop Jvré toi! o conplesk kon é alé!
-t1 cool sa trobonn la zik laba
-oué é jVddir CT tro cho com il ma bi1 Kressé é tou
-mat com il roul mon keum com il é bo!"

Grégory, afin d'épater sa chérie, s'était lancé dans un dépassement du bus à vive allure, son scouteur dressé sur sa roue arrière, tel un cheval sauvage que lui, Grégory, le superqueume, savait maistriser quand mesme. Il avait simplement posé son casque intégral sur le dessus de sa teste, prest à vivement le placer correctement en cas de rencontre avec la police, ce qui lui donnait l'air d'un schtroumpf hurleur, mais il n'amusait pas Jacky qui dut freiner afin de laisser passer Grégory entre son bus et un autre qui allait juste le croiser. "Ils sont fous ces cheunes!" s'exclama Susie, une habituée de la ligne, divorcée de quarante-six ans qui aimait rester à l'avant pour tester la puissance de ses charmes sur les chauffeurs, hommes dont la connaissance des femmes était légendaire, dans l'inconscient populaire. Malgré son déshabillé, elle avait très chaud, et l'énorme quantité de parfum dont elle s'était imbibée commençait à donner la nausée à Jacky, qui pourtant n'osait rien dire de peur de perdre cette affriolante compagne.


*SAE : je crois que cela signifie Système Autonome Embarqué, mais en fait Saloperie d'Appareil Electronique
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coline
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MessageSujet: Re: La vie quotidienne dans les transports en commun   La vie quotidienne dans les transports en commun EmptyDim 05 Fév 2006, 23:36

Happy C'est du vécu?
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troglodyte
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troglodyte


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MessageSujet: Re: La vie quotidienne dans les transports en commun   La vie quotidienne dans les transports en commun EmptyDim 05 Fév 2006, 23:38

Je dirai que c'est du vécu caricaturé.
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MessageSujet: Re: La vie quotidienne dans les transports en commun   La vie quotidienne dans les transports en commun Empty

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