Valeurs d'hier et valeurs d'aujourd'hui

rotko a écrit:

Seuguh a écrit:

Je ne sais pas dans quelle mesure taxer Daudet de racisme n'est pas une démarche anachronique ?

Marie kiss la joue a écrit:

C'est aussi ce que je pense, à l'époque ce genre de propos n'était pas du tout perçu de la même manière...

Si ça ne choquait pas, c'est peut-être que toute la mentalité ambiante était persuadée de la supériorité des blancs et de l'animalité des noirs...

Je m'excuse de n'avoir pas fini ma démonstration, et je ne sais pas, n'ayant que la chèvre de M. Seguin comme référence (sales loups, salopards de loups, nan mais il faut aussi voir qu'il n'y en a presque plus en Europe), dans quelle proportion la comparaison suivante est idoine :

Charles-Joseph de Ligne (1735-1814) écrit, dans son Mémoire sur les Juifs :

Citation :

Toujours suants à force de courir les places publiques, les cabarets, pour y vendre ; presque tous bossus ; une barbe rousse ou noire aussi crasseuse ; teint livide, brèche-dents, nez long et de travers, le regard craintif et incertain ; tête branlante ; cheveux crépus épouvantables ; genoux picotés de rouge et découverts ; pieds longs et en dedans [...] C'est ce qui les rend trompeurs, peureux, menteurs et bas. Ces quatres sentiments, marqués sur leurs figures, ne les embellissent pas.

Jusque là, me direz-vous, on ressent plus qu'un antisémitisme qui affleure... Pourtant, je vous livre la suite immédiate de ce texte du Prince de Ligne, ami de Catherine II, et auquel même Jean-Marie Arouet (lui aussi taxé d'antisémitisme) aura dédié un poème plus que flatteur :

Citation :

Donnez-leur un Etat ou un bon asile et ils cesseront d'être ce que j'ai dit qu'ils sont. [...] Qu'on les [leurs quartiers dans les villes] leur rebâtisse proprement avec un ruisseau qui coules dans toutes les rues ; qu'on leur donne un habillement long et oriental, avec un bonnet de même et de jolies couleurs [...]

Au fil de ce Mémoire, le Prince de Ligne devient, avec cette courte réflexion et bien avant Theodor Herzl, le premier fondateur du sionisme, et pourtant, vous aurez vu sa première description.

Ici, un passage sur les femmes juives :

Citation :

Voyez malgré cela la beauté de leurs femmes et de leurs filles échappées à la misère ou couvertes de haillons. On croit être bon chrétien en disant : elles ont de beaux yeux, mais elles ont l'air juif. C'est avec un peu plus de dureté peut-être, et moins de cette charmante volupté moelleuse, le genre de beauté des Grecques ; et de toutes ces figures orientales sont au-dessus de celles de notre triste et vulgaire Occident qui est ce qu'il y a de moins piquant. Cette dureté dans les yeux et les traits tient à celle de leurs principes. Elles sont extrêmement sages et décentes, même au milieux des nations qui le sont moins.

Au final, de Ligne regrette qu'il n'y ait pas une nation juive. Bien sûr, je ne sais pas ce que pensait Daudet, et Troglodyte va nous en dire plus.

Seuguh a écrit:

(sales loups, salopards de loups[...]

Ben non, maintenant, je vis dans mon temps, et j'aimerais qu'on fasse un peu attention à ces canidés, ils disparaissent, ce sont des mammifères intelligents, beaux, et sûrement un exemple d'organisation sociale, non ? Va-t-en dire ça à un paysan, ou à un seigneur qui le chasse, au XVIIIe ou au XIXe... Va-t-en même le dire à M. Pasteur !

Le loup de M. Seuguh

M. Seuguh aimait beaucoup son loup, il le traitait vraiment bien (c'est-à-dire qu'il ne le traitait pas du tout, enfin pas comme on pourrait traire une chèvre). Son loup lui procurait beaucoup de bonheur. M. Seuguh l'appellait "mon p'tit loup", parfois même "mon loulou". Un jour, M. Seuguh ne fit pas bien attention à son loulou, et il s'échappa dans la montagne. Bien sûr le loup de M. Seuguh ne savait pas que régnait, là-haut, une abominable et féroce chèvre. Mais il aimait la liberté. La chèvre aimait manger les loups, et se frotta les sabots en voyant arriver le loup de M. Seuguh. Le loup de M. Seuguh hésita un moment, mais fit front, avec ses petites canines et ses babines habituées à frotter les meubles de M. Seuguh. Au bout d'un combat dantesque, après un jour et une nuit interminables, la chèvre (qui donnait plein de lait, elle, elle était productive) eut raison du loup de M. Seuguh.

M. Seuguh ne se remit jamais de la perte de son loulou.

Le Loup,



Ton regard est un livre ouvert,

Une supplication offerte au nôtre,

Confession d’un mystère,

Qui nous a séparé les uns et les autres.



Une histoire d’amour en souffrance,

Où l’homme s’est approprié le pouvoir,

De te livrer en pâture depuis notre enfance,

Dans les contes et les histoires.



Cri d’alarme et de protestation,

Personne ne tient compte de tes états d’âme,

On te persécute dans la soumission,

Sans écouter tes plaintes et tes larmes.



L’homme déploie l’arsenal meurtrier,

Miroir de son propre reflet,

Pour pourchasser et exterminer,

Le loup prédateur qui n’a jamais existé.



j'ai trouvé ça là instant present.

Seuguh a écrit:

Au final, de Ligne regrette qu'il n'y ait pas une nation juive. Bien sûr, je ne sais pas ce que pensait Daudet, et Troglodyte va nous en dire plus.

. . Je suis bien loin d'être un spécialiste d'Alphonse Daudet : je n'en connais que les "Lettres de mon moulin" et "Tartarin de Tarascon". Etait-il un simple gars qui parfois se laissait aller à écrire des conneries, était-il un grand pervers caché sous un masque d'innocence ? Il était un homme et bien souvent les hommes n'ont pas la force d'âme nécessaire pour ne pas quitter la route dans les virages dangereux.
. . Méfiez-vous de moi, coposteurs : je suis un manipulateur qui aime à provoquer pour tenter de vous faire sortir de vos gonds. Bien vile manoeuvre de psychanalyste à la manque que de se déguiser ainsi en polémiste attardé, mais ô combien jouissive !

troglodyte a écrit:

. . Méfiez-vous de moi, coposteurs : je suis un manipulateur qui aime à provoquer pour tenter de vous faire sortir de vos gonds. Bien vile manoeuvre de psychanalyste à la manque que de se déguiser ainsi en polémiste attardé, mais ô combien jouissive !

Nous sommes deux, sauf que je n'ai pas l'avantage d'être un psychanalyste à la manque, je suis juste un psychologue de troquet.

Je le savais bien qu'on était bien encadré ! Ca me rassure mais il manque un ophtalmo, j'ai mal aux yeux !

Je ne connais pas Daudet mais je vais relire ce fil pour apprendre !

Je viens de survoler un petit livre de Lovecraft avec des mots assez mais avant d'en parler, je voulais jeter un oeil de manière plus approfondie, c'est peut-être une parodie

Utopie a écrit:

Je ne connais pas Daudet mais je vais relire ce fil pour apprendre !

Moi non plus, et d'ailleurs, je suis autant psychologue qu'ophtalmologue (Jean Gabin est mon mentor : "t'as d'beaux yeux, tu sais"). A propos de Lovecraft, j'en ai lu un petit peu, et il me semblait que l'engoulevent revenait à chaque nouvelle. N'as-tu pas eu une impression de récurrence un peu... gonflante ?

Profitons-en pour blablater sur la récurrence comme valeur à travers les âges (toujours la petite dernière phrase pour justifier...)