Anne Wiazemsky

Jeune fille

Printemps 1965. Anne, la narratrice, a dix-huit ans quand elle rencontre le cinéaste Robert Bresson. Cette entrevue a été organisée par son amie Florence, qui tenait le premier rôle dans Le procès de Jeanne d'Arc. Persuadée qu'Anne est l'actrice idéale pour interpréter Marie dans Au hasard Balthazar - le prochain film du maître - Florence la pousse à auditionner malgré sa complète inexpérience. Au fil des séances d'essai, la présence d'Anne, son, attitude, sa voix convainquent Robert Bresson de la nécessité de ce choix.

J'ai dévoré ce livre en quelques heures, passionnée par l'histoire, par la personnalité de la jeune fille qu'à été Anne Wiazemsky et celle de ce cinéaste, dont je n'avais jamais entendu parler auparavant.
On est assez loin des autobiographies nombrilistes et sans intéret qui font fureur depuis quelques temps.

Jeudi 15 mars, à 20h Au salon de musique, lieu unique à nantes


A propos de “Jeune fille” (Gallimard, collection blanche, déc 2006)

Anne Wiazemsky .

Merci pour ton commentaire Moon qui m'a donné l'envie de lire ce fameux "Jeune fille" repéré à la librairie . Je n'avais pas encore lu d'avis à ce sujet, donc il tombe à pic!
J'espère partager ton enthousiasme .

les commentaires élogieux sur ce livre sont légion.

En voici un :

Citation :

Jeune fille est l’œuvre sincère, délicate et abrasive d’une romancière intimiste et téméraire, qui investit la littérature avec la même grâce butée et singulière qu’elle imposa autrefois à l’écran.

Mon commentaire sera un peu plus mitigé que le tien Moon.

Elle est discrète, elle est légère la jeune fille désirant devenir actrice. Fille femme, genre délicate porcelaine blanche transparente et pourtant, si résistante au toucher. Une tonalité dans le phrasé me renvoie aux dialogues des films de Truffaut, déclamés par l’excellent Jean Pierre Leaud (en Doinel). C’est une ambiance des années « quatre cents coups », teintée d’émancipation timide, gorgée de malice vestimentaire, prémices d’une révolution de jeunes engagés dans la vie libérée.
L’approche d’un grand réalisateur tel que Bresson donne aux heureuses élues la retenue débordante d’euphoriques attitudes chuchotées, à peine le temps d’absorber son regard profond, ses colères chimériques, sa singulière approche des vivants, projetés sur grand écran.

L’auteure, flirte avec le bonheur de vivre ou plutôt le « bonheur de se sentir vivre », tant l’insouciance de cette « vedette » l’ensoleille au point qu’elle se sente protégée du reste du monde et des affres de la misère des guerres ou autres drames contemporains, dès lors que monsieur Robert Bresson, d’autorité lui souffle ses répliques devant caméra, micros et projecteurs éblouissant. Faut il venir d’une famille aisée (ici celle de François Mauriac), pour oublier les inconvénients futiles du quotidien, pour ne jamais s’inquiéter des nécessaires obligations financières dont tout jeune à cet âge s’enlourdit la vie qui n’a rien de bohême ? Anna vit dans un rêve, épaulé par ses parents, sans se rendre compte de sa chance du moment.

L’écriture de Anne Wiazemsky virevolte autour de Bresson, son maître dieu, héroïque mécène de sa découverte du septième art, au moins le temps du tournage « au hasard Balthazar ».
Les acteurs portés hauts devant les projecteurs (Florence Carrez dans « le procès de Jeanne d’Arc ») sont de véritables objets malléables, exécutant pantomimes, articulations phonétiques de chiens savants. Ils restent à la merci des phobies d’artistes plus ou moins géniaux .

Mesdames, messieurs, n’offrez pas ce livre à vos filles, elles risqueraient de prendre goût à l’ambiance éphémères des plateaux de tournage, de « s’y perdre ».

Jeunes filles, ne lisez pas ce journal très bien romancé : vous pourriez envisager une carrière de potiche dérisoire destinée à vous identifier aux statu…ts, des intermittents du spectacle.

Petite note désagréable à l’intention de Gallimard : la présentation de l’éditeur est scandaleuse. Doit on dévoiler un livre avant de l’avoir ouvert ?(bertrand-môgendre)

Quelle déception de visionner le film "au hasard Balthazar" de Bresson, après la lecture de ce journal de bord. Combien le jeu des acteurs est mièvre, emprunté, mauvais. Le clou du film est celui, raconté (avec beaucoup de talent) par Anne dans son livre : la chute après la dispute. Elle vit cette scène comme étant un véritable cri de rage. A l'écran, sa chute passe pour rigolote tant elle est insignifiante.

Après deux avis opposés, me voilà intriguée , et surtout bien décidée à le découvrir afin de voir par moi-même!

Merci à vous deux de ces commentaires qui m'ont en tout cas interpelée!

je donne donc mes sources pour que le dossier soit complet jeune fille où le journaliste parti d'a priori revoit sa position.

Ceci dit j'aime bien ta façon de procéder, Bertrand : se servir d'un livre donc d'un regard, comme une fenêtre pour aller voir toi-même ce que ça donne sur le terrain, donc revenir par exemple à Bresson.

Les films sur Truman Capote m'ont donné l'occasion de lire petit dejeuner chez Tiffany, et j'en lirai d'autres, sans doute.

le film belle toujours de manoel de Oliveira (98 ans !) me donne envie de voir Belle d'un jour de Bunuel.

les critiques de l'emission tout arrive sur france-culture étaient favorables. Ils regrettaient même qu'on pense aux personnages de Belle toujours dans le film Belle d'un jour.

Ils ont sans doute raison.

Mais je fais ce que je veux, hein ?

roxane, surtout ne reste pas sur un commentaire. Je pense que le livre n'est pas décevant. Je soulignais juste la mauvaise qualité du film.

rotko, tu me conseilles donc belle d'un jour ?
A propos de rotko, je vais te mitonner un petit commentaire, assez rigolo, suscité par le dernier roman lu "le dernier monde". Rotkho joue un chef de troupe. Attends, je te prépare ça avant la fin de semaine.

bertrand-môgendre a écrit:

rotko, tu me conseilles donc belle d'un jour ? .

voila où j'ai laissé trainer mes grandes oreilles .

lemonde où j'ai posé mes jolis yeux déclare :

Citation :

C'est un film court et malicieux [...]
Ici, Oliveira pose un regard impitoyable sur ces deux créatures aux prises avec l'obscur objet de leur désir. Un homme (alcoolique), une femme (manipulée) dînant dans la pénombre, à l'orée de la mort, devant une mystérieuse boîte qui illustra jadis l'éros et qui symbolise aujourd'hui leur cercueil (thanatos). Deux figures devant lesquelles se prosternent des serviteurs, sous l'oeil d'un coq échappé du Fantôme de la liberté : un animal perplexe devant la perversité des humains

bertrand-môgendre a écrit:

A propos de rotko, je vais te mitonner un petit commentaire, assez rigolo, suscité par le dernier roman lu "le dernier monde". Rotkho joue un chef de troupe. Attends, je te prépare ça avant la fin de semaine.

mitonne, petit marmiton, j'attends avec appétit....

bertrand-môgendre a écrit:

roxane, surtout ne reste pas sur un commentaire. Je pense que le livre n'est pas décevant. Je soulignais juste la mauvaise qualité du film

Non, au contraire, ma curiosité n'en n'est que plus titillée!
En fait, en te relisant, je note surtout ton peu d'enthousiasme par rapport à l'adaptation cinématographique.
Je m'en tiendrai au roman!

J'avais l'intention de voir le film tout en préparant à une histoire un peu mièvre. Finalement je n'ai pas eu le temps de le voir, et visiblement ce n'est pas une grande perte. Peut-être un jour tout de même, car j'aime me faire mes propres idées.

Pour en revenir à la critique de Bretrand : N'est-ce pas justement ce décalage entre ce qu'Anne et les autres perçoivent qui est intéressant? Cette naïveté d'une jeune fille qui se dit devenir adulte? Je sais que tu critiques essentiellement le film, et nous sommes peut-être d'accord sur le sujet...

Pour tenter d'analyser la manière dont j'ai abordé ce livre, je dirai que je n'ai pas cherché le témoignage de la réalisation d'un chef-d'oeuvre (ce que le film de Bresson n'est visiblement absolument pas) ou même d'un film, tout au plus le témoignage d'une jeune fille immergée dans l'illusion, perdue dans ses rêves. L'auteur le dit elle-même, elle a cherché à montrer la manière dont elle a vécu ce moment de sa vie. Et à mon avis c'est sacrément réussi.

Citation :

Mesdames, messieurs, n’offrez pas ce livre à vos filles, elles risqueraient de prendre goût à l’ambiance éphémères des plateaux de tournage, de « s’y perdre ».

Jeunes filles, ne lisez pas ce journal très bien romancé : vous pourriez envisager une carrière de potiche dérisoire destinée à vous identifier aux statu…ts, des intermittents du spectacle.

Il y a évidement un recul à avoir face à ce livre.

Je trouve en effet le livre très réussi, non seulement en raison du regard que porte la narratrice sur cet été de tournage qu'elle a vécu (et on peut l'en croire) comme une féerie, mais aussi pour sa description de la personnalité de Robert Bresson.
Car si Robert Bresson était un cinéaste controversé, capable du meilleur (Pickpocket, Un condamné à mort s'est échappé, Journal d'un curé de campagne) comme du moins bon - certains diront du pire (Au hasard Balthazar, l'Argent, peut-être Lancelot du lac), on ne peut nier que c'est un personnage fascinant.
Certes, il tyrannise ses acteurs, mais parce qu'il sait exactement ce qu'il veut, et que sa direction d'acteurs est diamétralement opposée à une école comme l'Actor's Studio (mettez-vous dans la peau du personnage et essayez de ressentir ses émotions).
Mais à côté du génie, il y a l'homme, et celui-ci est finalement assez à plaindre, il est amoureux de cette gamine de seize ans au point d'exiger sa présence à ses côtés, s'irrite quand elle veut revoir ses jeunes amis et lui demande ce qu'elle peut bien leur trouver, joue au chat et à la souris avec ses producteurs qui lui reprochent ses dépassements de budget, et se désespère du moindre nuage qui passe dans le ciel au moment où il a une scène à tourner.
Je crois que la grande reussite du film, c'est cette évolution progressive dans les rapports entre la jeune fille et le grand maître. Alors qu'elle aurait pu se faire broyer et abuser, elle parvient, après avoir découvert ses faiblesses cachées, à s'arracher progressivement à son emprise tyrannique, jusqu'à être parfois en position de jouer à l'irriter ou de l'admonester comme un enfant.

Seb

Citation :

Je crois que la grande reussite du film

oops... je parlais bien sûr du livre, voilà ce que c'est de mélanger cinéma et littérature !

Seb

L'histoire est légère est pourrait être très jolie, d'une certaine manière. Mais j'ai trouvé qu'elle tournait beaucoup trop autour du personnage de Bresson. En lisant la quatrième de couverture je ne m'attendais pas à cette histoire. Il est vrai que je me suis un peu ennuyé par moment, mais Anne ( dans le roman, je ne connais pas les autres œuvres qu'elle a pu écrire, ou les films dans lesquels elle a joué) est un personnage attachant.

Anne Wiazemsky publie chez Gallimard Mon Enfant de Berlin, ou l'histoire de ses parents et sa naissance.

Citation :

une évocation émouvante et extrêmement vivante du destin de sa mère Claire à la fin de la Seconde Guerre mondiale, puis dans Berlin dévasté durant la période de l’immédiat après-guerre.

la jeune Claire Mauriac, ambulancière pour la Croix-Rouge, rencontre son mari, Jan Wiazemsky dit Wia, fils d’exilés princiers et russes, lui aussi engagé dans les rangs de la Croix-Rouge et en charge de négocier avec les Soviétiques. Dans la capitale allemande, divisée par les Alliés, naît l’«enfant de Berlin» : Wiazemsky elle-même.

Berlin à la fin de la 2e guerre mondiale, l’hiver qui suit est extrêmement dur et ressemble à une danse sur un volcan tout juste éteint.

L’ancienne capitale du Reich, Berlin, a été divisée en quatre secteurs par les forces alliées qui travaillent au plus urgent : le ravitaillement en nourriture et en chauffage, le relancement de l’activité économique, le rapatriement des prisonniers de guerre étrangers en Allemagne.
Claire Mauriac, fille de l’académicien François Mauriac, ambulancière de la Croix-Rouge française pendant la guerre, ne veut pas rester à Paris et ronger son frein. Elle est contente d’avoir pu partir pour sortir de l’ombre auréolée de son père et se vouer à d’autres tâches. Avec ses 27 ans elle est belle, capricieuse et aime son travail, donc elle reprend du service à la Croix-Rouge. A Berlin en ruine elle est affectée au service de rapatriement des prisonniers français.
Les jeunes femmes sont rares parmi les vainqueurs dans cette ville occupée, elles sont donc très entourées par les collaborateurs masculins qu’elles côtoient tous les jours. Yvan Wiazemsky, prince russe émigré, lieutenant français polyglotte, tombe amoureux de Claire Mauriac. Il ne connaît rien à la littérature, ignore tout du père de Claire, il l’aime pour elle-même et d’un amour fou.

Anne Wiazemsky exploite toutes les facettes de la vie de sa mère, qui hésite un court instant avant d’épouser ce prince amoureux. Comme collaboratrice de la Croix-Rouge Claire Mauriac comprend toute la folie d’une guerre, les morts, les blessés, les affres d’un jeune soldat mourant. Depuis Berlin ville anéantie elle envoie des lettres à sa famille donnant libre voie à sa sensibilité, son élan pour aider le prochain, sa bataille pour la vie. Bientôt les nuits deviennent jour dans Berlin et les alliés n’arrêtent pas de fêter la victoire et la résurgence à une nouvelle vie.

La fille de Claire et d’Yvan Wiazemsky dresse un tableau ressemblant de la cité à terre, de l’amour impossible entre ses parents. Elle s’est documentée, a lu le journal de sa mère, la correspondance de ses parents, écouté le récit de leurs amis et de leurs compagnons de route. C’est elle « L’Enfant de Berlin », elle y naquit en 1947. Son discours est d’une rare franchise, elle décrit les états d’âme des hommes et des femmes d’alors indépendamment de leur origine sociale. Elle a réussi à faire de ce roman un document d’époque.

Babur a écrit:

Elle s’est documentée, a lu le journal de sa mère, la correspondance de ses parents, écouté le récit de leurs amis et de leurs compagnons de route. C’est elle « L’Enfant de Berlin », elle y naquit en 1947. Son discours est d’une rare franchise, elle décrit les états d’âme des hommes et des femmes d’alors indépendamment de leur origine sociale. Elle a réussi à faire de ce roman un document d’époque.

oui, Anne Wiazemsky est la petite-fille de l'écrivain François Mauriac par sa mère Claire Mauriac.

rotko a écrit:

oui, Anne Wiazemsky est la petite-fille de l'écrivain François Mauriac par sa mère Claire Mauriac.

Oui oui, et elle n'hésite pas un seul instant à en faire état dans ce roman

l'idylle avec Godard

cette année si particulière, qui de l'été 1966 à l'été 1967, a donné un sacré coup d'accélérateur à sa vie et lui a permis de côtoyer Truffaut, Rivette, Bertolucci, Cournot, Jeanne Moreau, Cohn-Bendit... des mois fous qu'Anne Wiazemsky a peiné à recréer...

D'où la fraîcheur du ton, la candeur - voire la naïveté - des protagonistes, la gaieté du récit et le portrait, tout en éloges, ou presque, du réalisateur d'A bout de souffle. C'est bien cette face inexplorée d'un Godard tout à la fois amoureux, romantique, Pygmalion, doux amant, drôle, enfantin, généreux, délicat, jaloux, un rien possessif, qui intrigue et charme le lecteur...

tout l'article de l'Express

Je sais bien qu'il ne faut pas écouter les ragots, mais on les entend quand même.

Certaines mauvaises langues laissent entendre qu'Anne Wiazemsky ne manque jamais de rappeler qu'elle est la petite fille de Mauriac, et qu'elle exploite le nom de Godard à ses fins personnelles.

Qu'en est-il vraiment ? je ne l'ai pas lue.

Je te dirai ça à la fin de ma lecture, mais pour l'instant je suis charmée par le ton candide d'Anne W. Lorsqu'elle parle de son grand-père, elle évoque surtout l'admiration sans borne qu'elle avait pour lui et sa peur de le décevoir. Pas de pédanterie ici.

Exploiter le nom de Godard? Rappelons tout de même qu'elle a été mariée avec lui plus de 10 ans. Elle évoque avec tendresse son caractère extravagant et son refus de rentrer dans le moule.

Jusqu'à présent, j'ai surtout vu de l'humilité face aux géants qu'elle a eu la chance de connaître et j'ai été émue par l'ombre d'Anna Karina qui plane et intimide la protagoniste.

Il faut dire que j'avais été conquise il y a quelques années par le premier volume. Je suis ravie de retrouver Anne W.

Citation :

Exploiter le nom de Godard? Rappelons tout de même qu'elle a été mariée avec lui plus de 10 ans.

ah ! ca change ce que je croyais (une idylle passagère).

rotko a écrit:

Citation :

Exploiter le nom de Godard? Rappelons tout de même qu'elle a été mariée avec lui plus de 10 ans.

ah ! ca change ce que je croyais (une idylle passagère).

Elle l'a rencontré en 1966, et ils ont été marié de 1967 à 1979 (d'après wiki).

En tête des ventes, depuis 2 semaines, selon l'Express du 25 au 30 janvier.