Jacques Josse

Hameau mort : c’est un titre de jacques Josse qui par l’écriture redonne une existence à ces silhouettes du passé. La vie de ces villages en voie de disparition est rythmée au quotidien par les sorties au café. On s‘interroge sur la signification du glas et dans les cortèges d’enterrement les participants évoquent des souvenirs d’un monde qu’ils sentent déjà oublié.

petite présentation sur ce site

Brèves de Bruges

Cet homme sort d’un bar. Il ajuste son pas. L’adapte au rythme de la foule. Il se sait d’ici et de nulle part. Ou de partout si l’on préfère... Certains soirs, la distance qui sépare Le Valparaiso à Saint-Malo (intra-muros) du Den Dijver à Bruges lui semble disparaître en un clin d’œil. Pour un peu, le vent du nord portant, il pourrait même capter, mêlées au vacarme des vagues qui cognent pierres et murets aux abords du Sillon, quelques notes légères, claires et précises, directement sorties du ventre du beffroi. Il sourit, s’en amuse... Se reprend aussitôt et chasse l’idée d’un revers de main. Il lui préfère l’émotion du regard. Elle seule permet de saisir, en une seconde, telle ou telle silhouette entrevue par hasard dans un reflet de vitre... C’est pour cela qu’il aime tant se fondre dans l’anonymat mouvementé des rues et scruter tous ces visages tendus, en attente, eux aussi, d’un signe pour enfin se dérider, sourire au cheval qui passe, percer un bock chez Maës ou baiser les lèvres de Martha, la brune qui voltige, des verres de Palm plein les mains sur les pavés mouillés de la Hallestraat...

Merci ! Une écriture douce, une présentation délicate et sobre... un vrai plaisir que cette découverte !



MAYA MEMIN
Linges rendus à la lumière fertile

plus loin
vers l'Orient,
les cendres d'une mère
flottent sur la rivière.

Jacques Josse

Les cafés, les camions qui transportent partout la bière, inspirent ce poète breton qui compose dans la solitude de son logis.

autres titres :

Jacques Josse
Vision claire d’un semblant d’absence au monde (poèmes 1985-2001),
Editions Apogée, Rennes 2003.

Bavard au cheval mort et compagnie (proses),
Cadex 2004. Avec 11 dessins originaux de Georges le Bayon.

Ombres classées sans suite

Les livres de Jacques Josse sont rarement longs. Comme autant d'échardes plantées sur la peau d'une langue trop lisse, ses petites proses, poétiques et rugueuses, brillent d'un éclat noir. "Philosophe de la fêlure", il sait trouver des titres évoquant à merveille son univers : Fissures, Le Voyageur égaré, Le Veilleur de brumes, Vision claire d'un semblant d'absence au monde, ou encore Un habitué des courants d'air.
Aujourd'hui, voici Ombres classées sans suite, texte "hanté par l'inévitable début de la fin", ensemble placé sous l'exergue du deuil et de la nuit par cette citation de Michel Dugué : "Nul n'est sans abîme et chacun vient du deuil". Source et suite de l'article sur Le Matricule des Anges"
Jacques Josse - Le Matricule des Anges n° 36

Une belle chronique de Ronald Klapka à propos de Jacques Josse.

Citation :

ne dis rien
des nuages délavés,

rien du cours
passé de la douleur,

rien
de l'utopie
que l'on ouvre
au couteau

pour en extraire
les iris mauves

d'un fantôme qui claudique
dans les couloirs du vent.

Rêveur raconteur, le Capitaine est l’une des figures du bar . Le soir, Jimmy, ex-grutier sans emploi, s’installe pour boire à ses côtés, l’écouter et prendre place dans l’étrange chronique collective dentelée de disparus, d’énigmes, de voyages et de coups du sort d'un petit port de Bretagne.

J'ai écouté Jacques Josse présenter et lire un passage de son livre : que deviennent les capitaines de la marine marchande, une fois qu'ils ont quitté leurs navires ? ils s'installent face à la mer, dans un village entre Paimpol et Plouha, et ils racontent de temps en temps des souvenirs.

L'auteur aime les bistrots, ces microsociétés où la parole circule à demi-mots, témoignant de la vie collective. On y évoque les disparus (le cimetière n'est pas loin du bistrot, et de l'église) les moments passés, on y effleure les sujets tabous, on tourne autour des personnages et des histoires.

Fait curieux, pendant cette séance de présentation, un ancien capitaine a spontanément raconté une histoire cocasse de vie maritime en Somalie. C'est dire que jacques Josse a su évoquer les personnages et le décor.

68 pages chez Digitale.

Ils demandent non seulement au précieux liquidé d'épancher leur inextinguible soif mais aussi d'égailler leurs papilles, de calmer leur solitude et de leur réserver, sur le zinc ou à table, des rendez-vous savamment maltés. Ce sont ces hommes, ces femmes, entrevus sous diverses latitudes, là où il aime s'immerger et explorer, dans des lieux où la bière sait souvent chanter juste, que l'auteur du Café Rousseau a croisés dans ses récentes déambulations.

c'est à la parution de ce livre que j'ai rencontré Josse pour la première fois.
Observateur des bistrots, il écoute et donne vie à ceux qui les fréquentent. Si les marins parlent, en général, il a remarqué que ceux qui revenaient d'Algérie gardaient le silence. Souvent célibataires.

Comme Laurent Mauvignier dans des hommes , Josse, de la génération suivante des appelés d'Algérie, a vu dans les cafés des hommes dont la jeunesse a été brisée.

je savais bien que j'avais déjà parlé de jacques Josse, c'est sur cette page..

Croyez-moi, il gagne à être connu, et ce n'est pas mon dernier mot sur lui !

« Marin -convoyeur de bois, de sable, de vin, d’étoffes, d’épices ou de pétroles - il a traversé les brumes du monde. Elles étaient bleues l’après midi sur Tanger. Tiraient déjà sur le gris le soir à Bangkok. On aurait juré des cendres de Noël se promenant sur Lisbonne en avril, et les mêmes un peu plus tard, revenaient planer entre les pattes d’oiseaux de mer au-dessus de Stockholm. »


Par ces temps de brumes, un peu tristes, il est bon de lire le veilleur de brumes de Jacques Josse.

On y voit passer les ombres de Jules Lequier, et de Stanislas Rodanski.

Je suis hanté d’une nostalgie profonde
Ô sœur du pays des mers
Un regret très vieux baigne tes yeux
Etrange éclat où se reconnaît ma souffrance :
Mon aimant mon amie je dois encore partir
Où es-tu ?

Stanislas Rodanski

Elle ! Toujours elle ! A jamais elle !

Jules Lequier.

j'ai regroupé le fil récits et le fil poésie de jacque josse.

Citation :

"le bar ouvre sur une place avec église, cimetière, parking et monument aux morts. Pour trouver le Capitaine, c'est le soir qu'il faut venir. La porte reste grande ouverte. Il suffit d'entrer, de saluer, de s'asseoir et de capter quelques unes des bribes de phrases qui volent au ras du comptoir"

l acommunauté du bistrot a ses rites, ses annonces, ses histoires de cimetières, et le souvenir de ces voyageurs des mers, cloués au port,(1) qui ont tutoyé albert Londres, vu Gauguin, et qui rivalisent avec R.L Stevenson.

(1) quidam éditeur, 90 p.