Manuel Candre, Autour de moi

Autour de moi 100 p.

Citation :

l'attente secrète tapie au fond du coeur

dit l'exergue.

Du 04/07/07 au 10/03/73, le journal est fait de notes éparses, sorte de puzzle qui prend son unité à la fin de ce court volume, qui désarçonne, comme une pirouette ou une langue tirée pour dédramatiser...

Il s'agit essentiellement d'attentes et d'absences, voire de pauses avant une violence ou une catastrophe ressenties comme imminentes.
Les épisodes sont en écho, comme obsessionels, pour dire l'enfance marquée par les maux des parents ou des grands parents.

Vies bousculées et traumatisantes, avec pour l'auteur (on parle de la famille Candré) un sentiment de culpabilité, à toutes les époques.

On retrouve les souvenirs inattendus de l'enfance, la présence d'objets marquants, mais ce qui prédomine, c'est la violence des scènes subies passivement, les dérouillées, les cruautés et les désillusions. La Mère regrettée, le père imprévisible, ou au contraire trop prévisible...

Ce condensé, qu'on croirait à l'état brut, mais finalement organisé, ne laisse pas le lecteur insensible, c'est perturbant.

Mais intéressant car il "saisit " le lecteur.

veux pas être perturbée ! je le suis déjà assez comme ça !  

Son écriture est efficace et dérangeante, car plus que l'humour dont parle l'éditeur, c'est surtout l'angoisse qui prédomine.

Manuel avait des raisons précises d'être angoissé, mais dans les attentes de l'enfant, en général, la sérénité n'est pas toujours au rendez-vous ; y compris les fantasmes de disparition des parents, ou des griefs imaginaires que les parents peuvent nourrir contre leurs rejetons !

chez le même éditeur :Le portique du front de mer dont j'ai entendu du bien.

Voilà pourquoi je me suis jeté sur Autour de moi dès que je l'ai trouvé.

Rotko a écrit:

Voilà pourquoi je me suis jeté sur Autour de moi dès que je l'ai trouvé.

belle expression !  

Bien d'accord avec toi sur les "paysages intérieurs" : on voit des images qui se répondent d'une génération à l'autre,

p.47-48 j'ai conservé cette unique image, celle de mon grand père adossé à l'armoire à glace, le nez et la lèvre  en sang. Mon pèere devant lui [...] Moi aussi, un soir j'ai empoigné mon père, mon visage hurlant au-dessus du sien. C'était plus tard.

La trame temporelle, bien indiquée du  04/07/07 au 09/09/10, est trompeuse puisqu' interviennent des événements antérieurs et postérieurs, dans ces notes qu'on trouve parfois bien rédigées, d'autres fois sans ponctuation, ou avec la mention (ne pas raconter).

Tu notes bien la continuité temporelle entre les deux oeuvres avec cette citation d' Autour de moi qui annonce le Portique du front de mer (pas encorelu)

Citation :

seul et désespéré, n'aspirant plus qu'à se "désagréger lentement sur la plage au matin".

je pense que les notes sont un materiau de base pour un psy,

cf.03/12/08

Le psy m'a dit laissez tomber l'enfance ça fait trente ans toutes vos conneries à quoi ça rime

et des notes d'écriture,

La fin est toute trouvée, je crois (27/01/09)

Autour de moi se terminerait par la mort du père ? (08/10/09)

Quant à la dernière phrase du 10 mars 1973, sorte d'appréciation sur un bulletin scolaire, elle fait écho, dans sa dérision tragique, à la note du psy sur les "conneries".

Le livre  a des maladresses, mais il a du fonds.

Le portique du front de mer, Manuel Candré,
éditions Joëlle Losfeld, 160 p. ,15,90 €

Le portique du front de mer se déroule entre mer et désert dans la ville de R., une station balnéaire tombée en désuétude où résident apparemment quatre amis s'enfonçant dans une certaine léthargie.
Au narrateur, amateur de poésie et écrivain en devenir qui se révélera être «Manuel», s'ajoutent en effet Lucio, son premier lecteur et correcteur, et Joao, sorte de «jumeau manquant» dont l'apparition comme la disparition touche au coeur du mystère. Deux amis  rejoints par Raymond Mayo, un personnage emprunté à Vermilion Sands , le recueil de nouvelles de J.C Ballard, auquel l'auteur rend hommage.
Plutôt désoeuvrés et grands consommateurs de bières, les quatre aiment se retrouver au «Zanzibar», café qui n'est pas sans évoquer cet ailleurs tant célébré par la littérature qui fut le terme rêvé de l'errance rimbaldienne. Mais l'horizon  va se barrer de noir et des mirages surgissant dans le désert vont emporter en se dissolvant des pans de réels, tandis que Joao va disparaître et le temps se mettre à hoqueter ...  
Manuel Candré explore dans ce livre un espace «géomental», nous invitant à nous perdre avec lui dans les sables du Temps...