Mademoiselle Chambon, un film de Stéphane Brizé, avec Vincent Lindon, Sandrine Kiberlain, Aure Atika, Jean-Marc Thibault.
Un moment, on se dit qu'on va avoir un
Regrets bis (ce film où Valéria Bruni-Tedeschi, bourgeoise méprisée par son mari Yvan Attal, tombait folle amoureuse de Sergi Lopez, l'homme venu faire les travaux dans sa maison). Ici, ça commence un peu pareil, Vincent Lindon est maçon (donc fruste et musclé) et Sandrine Kiberlain est institutrice (donc sensible et intelligente) et au début on redoute le pire.
Sauf que là, ça n'est pas du tout ça:
- parce que le film sort du discours sur "la-passion-irrésistible-contre laquelle-on-ne-peut-rien", pour montrer un homme finalement attaché à son épouse (Aure Atika qui fait une composition subtile) et au fond déchiré par cette histoire d'adultère.
- parce que les métiers "manuels" ne sont pas seulement idéalisés, certes Lindon est capable de bien parler de son métier à une classe d'enfants, mais la pénibilité du travail n'est pas occultée. Tant lui que son épouse font des métiers où on est exposé à une pollution sonore presque insoutenable (le marteau-piqueur, les machines de tri postal).
- parce que le métier d'institutrice n'est pas magnifié, au contraire, elle fait un peu partie de ces prolétaires de l'enseignement qu'on envoie chaque année dans une affectation différente, et elle a plutôt l'air de s'emmerder copieusement dans son école. En fait le hiatus entre elle est Vincent Lindon s'opère davantage sur le terrain de la culture (elle est mélomane et musicienne à ses heures, lui seulement sensible à la musique) et de l'environnement familial (lui est intégré dans une vaste famille et prend soin de son père âgé, elle est coupée de sa famile et entretient des rapports froids avec sa mère).
C'est un film qui prend son temps, donc il ne faut pas être allergique aux longues scènes contemplatives, mais très bien interprété et où tout sonne juste.
(NB le film est adapté du roman éponyme d'Eric Holder que je n'avais pas lu, donc je ne peux pas juger de la qualité de l'adaptation, mais c'est vrai qu'il y a un côté littéraire dans le traitement de l'histoire).