Eran Kolrin: La visite de la fanfare

"La visite de la fanfare" d'Eran Kolrin avec Ronit Elkabetz, Sasson Gabai,

Citation :

huit musiciens égyptiens attendent à l'aéroport, le guide qui doit mener la Fanfare de la police d'Alexandrie à l'inauguration d'un centre culturel arabe, dans une lointaine ville israélienne. Mais le guide ne viendra pas et la fanfare, dont aucun membre ne maîtrise l'hébreu, tente de trouver son chemin par elle-même...

Un film empreint de poésie burlesque, et d'émotions. Il était en sélection officielle au 60e Festival de Cannes dans la section Un Certain Regard.

J’ai beaucoup aimé ce film, la visite de la fanfare, qui a un humour léger reposant sur le contraste et le décalage.

- Contraste entre des musiciens guindés de la police égyptienne et des Israéliens très cool; avec en premier plan, le chef de la fanfare, rigide et timide face à une jeune femme israélienne extravertie et très libre.

- Décalage entre des personnages officiels qui s’attendent à des amabilités protocolaires, et des situations inédites où il faudrait avoir recours au système débrouille ! Le couvert et le gîte leur seront finalement offerts par des habitants d’un petit village, autrement dit un « vrai trou » !

Plus profondément, on rejoint la solitude et les attentes de tous, Égyptiens en voyage, comme Israéliens dans leur désert, attentes qui sont aussi celles de chacun dans la vie, avec l’amour et le bonheur.

Spoiler:

Citation :

un film dont la douceur, exceptionnelle sous ces climats, fait d'autant plus de bien qu'elle n'occulte pas pour autant l'intelligence du regard critique.

lemonde.

Pour tenir compagnie à Maia

Ronit Elkabetz, amusante et émouvante, excellente dans ce film.

C'est un film dont on sort heureux.

Il n'y a pas grand chose, pas de grands moyens. On ne vous transporte pas dans un monde féérique hollywoodien où les pauvres hères se transforment en princes et les masures en châteaux.

L'environnement de cette ville israélienne est aride, on s'y ennuie, tout y est blafard, éclairé au néon verdâtre la nuit, écrasé de soleil le jour, fissuré, ensablé.

Tout sauf l'âme de ses habitants.

Quand les musiciens de la fanfare de la police d'Alexandrie échouent au milieu de ce désert, engoncés dans leurs uniformes et leurs craintes nourries de préjugés, rien ne se passe.
Le temps languit.

La rencontre avec les habitants se fera à la terrasse d'un petit restaurant tenu par une superbe femme, libre et directe.

Les scènes intimistes nous font entrer dans l'esprit des personnages avec beaucoup de pudeur. On découvre leurs failles, leurs aspirations, leur vision du bonheur.

Deux scènes m'ont particulièrement plu, quand les mots ne suffisent plus pour expliquer ce qu'on ressent, et que les gestes pallient les insuffisances d'un langage commun.

La première est celle pendant laquelle le chef d'orchestre tente d'expliquer à Dina, son hôtesse d'un soir, ce qu'est la musique pour lui. Un simple geste.

La seconde est la leçon de séduction donnée par le séducteur égyptien au jeune homme simplet, méchant par maladresse.

J'ai d'ailleurs aimé que ne soit pas traduite la définition de l'amour donnée en arabe par le bel égyptien. Son regard suffisait à comprendre toute la douceur de ses sentiments.

C'est pour toutes ces raisons qu'on se sent heureux et léger en sortant du cinéma. Parce que c'est la réalité, parce que ces voisins si proches et si lointains partagent les mêmes émotions, le même langage humain.
Parce que quelque chose est possible.

Ah oui!...j'aime beaucoup le commentaire de Bernique. En plus de ce qu'en disent Rotko et Bernique, j'ai particulièrement apprécié la fin, étonnante: lorsque le chef d'orchestre, le plus âgé, le plus timide, le plus strict se met à entonner une musique égyptienne chargée de ces roulements vocaux qui ne sont audibles que dans les langues arabes ? C'est surprenant car on s'attend à le voir diriger l'orchestre alors qu'il chante avec un bonheur si visible que celui introduit une plénitude incroyable dans cette fin de film. Son dernier regard est aussi le plus beau...Il se tourne vers le cadet des joueurs et tout est dit...

Pour ma part, ma scène préférée a lieu quand cette généreuse et gentille fille israélienne explique au vieux chef d'orchestre que pendant son enfance, on ne regardait au cinéma que des films avec Omar Sharif. Et que l'ayant rencontré, le premier soir, elle avait imaginé, comme toutes les jeunes filles égyptiennes de son époque, vivre une très grande histoire "à la Omar Shariff". Cette candeur, cette fraîcheur c'est aussi toute l'illusion et les rêves que nourrit le cinéma mais ici, sur fond de conflit israélo-arabe, il prend une signification précise. C'est un très beau moment.

Beaucoup de qualités et de moment heureux dans ce film.

Faire ressentir que l'aridité, la sècheresse de coeur par manque de contact avec autrui, ne mènent à rien, est une belle léçon du film qui occasionne cette rencontre entre "étrangers"

Suite à cette experience, le compositeur retrouve l'inspiration, le père se découvre un nouveau fils, et la musique peut devenir chaleureuse, là où elle n'était que militaire et administrative. Un peu de John Coltrane et des mots d'amour pour le chant et la danse.

J'ai tout simplement adoré ce film!
Tous les personnages sont attachants - surtout le dragueur... , tellement drôle!

J'y vois surtout un message d'espoir: une fois la première appréhension surmontée, arabes et israéliens peuvent se parler, manger à la même table, danser, rire, écouter de la musique ensemble...

Malheureusement, ce film devait participer à un festival à Dubaï et tous les pays arabes ont menacé de boycotter le festival si un film israélien y était projeté...
Comme quoi, ils n'avaient pas vu le film ou alors, s'ils l'ont vu, ils ont refusé de le comprendre