Abbas Kiarostami [Iran]

LE VENT NOUS EMPORTERA [1999] d’ Abbas Kiarostami
avec Behzad Dourani

Cet excellent film nous fait vivre par le truchement d’un visiteur dans un village iranien. On l’approche par une route en lacets, on grimpe dans ses maisons échelonnées sur la falaise, de jour, de nuit, on le voit sec et verdoyant (ou jaunissant). On rencontre ses habitants, des plus jeunes aux plus âgés.

Rarement dans un film on sent un contact aussi authentique avec les lieux et les personnages. Les lieux, c’est normal puisqu’on les parcourt plusieurs fois, suite à un coup de téléphone par exemple . Avec les personnages, la familiarité est immédiate.

Le vent nous emportera est un film poétique (on y entend quelques poèmes, cf. les haikus de kiarostami) mais surtout par le regard porté sur la beauté du monde, le silence, les bruits du village à chaque heure du jour.

Quant à l’histoire, elle est légère et malicieuse, vous la goûterez petit à petit, c’est le chemin qui a du charme.

une analyse

Kiarostami est un artiste complet. On a déjà parlé de ses haikus

Citation :

Dix fois
le vent
ferme
et ouvre
avec bruit
une porte

L'exposition de Beaubourg Victor Erice/Abbas Kiarostami - Correspondances jusqu'au dimanche 6 janvier 2008.

présente des photographies et installations de Abbas Kiarostami dont «La Forêt sans feuilles », formée de fûts verticaux recouverts d’écorce d’arbre, véritable forêt, virtuelle et réelle à la fois.



Cette monographie sur Kiarostami cinéaste et photographe inclut un dialogue entre Kiarostami et Ishaghpour à propos de « la photographie, le cinéma et le paysage ».

rappel de l'exposition de beaubourg

"Victor Erice/Abbas Kiarostami, correspondances". Centre Pompidou, place Georges-Pompidou, Paris-4e

Citation :

Qu'est-ce qui justifie leur rapprochement ? Pas mal de choses. Sur le plan historique : le hasard de la naissance (tous deux sont nés en juin 1940) et l'expérience de régimes attentatoires à la liberté notamment artistique, qu'il s'agisse du franquisme ou de la République islamique.

Mais plus encore sur le plan esthétique : une aspiration évidente à un retour aux sources documentaires du cinéma, une attention extrême portée à la matière première de la représentation cinématographique (nature, paysage, lumière, durée...).

Mais aussi un attachement constant à tout ce qui lie le cinéma à l'enfance et enfin une tendance à l'expérimentation formelle qui les porte naturellement l'un et l'autre au dialogue avec d'autres expressions plastiques, peinture pour Erice, photographie pour Kiarostami.

rotko a écrit:

LE VENT NOUS EMPORTERA [1999] d’ Abbas Kiarostami
avec Behzad Dourani

A défaut de voir l'exposition, je verrais bien ce film !

Cela rejoint les mandalas... le vent nous emportera, quand on l'accepte, on vit mieux...

J'en suis pas là

Citation :

"Le cinéma que l'on travaille avec les étudiants a coupé le cordon avec la littérature, explique Kiarostami. C'est une tendance que j'ai dans mes films et qui vient certainement de ma pratique de la photographie. Une photo est bonne quand elle parle d'elle-même, quand elle n'a pas besoin qu'on lui insuffle de la fiction. Le cinéma doit procéder de la même façon",

A Nice jusqu'au 16 décembre - comme à Barcelone, New-York ou au Maroc ces derniers mois - Abbas Kiarostami, organise des ateliers de courts métrages pour groupes d'étudiants et jeunes réalisateurs sélectionnés pour travailler sous sa houlette durant quinze jours.


pas encore vu "Le goût de la cerise"

Je vais pouvoir voir Ten de Abbas Kiarostami, pas vu encore Le vent nous emportera

Ten met en scène dix séquences de la vie émotionnelle de six femmes, qui pourraient aussi bien être dix séquences de la vie émotionnelle d'une seule et unique femme. Celles-ci sont amenées à relever des défis à une étape particulière de leur vie.

à suivre ...

L’exposition Erice Kiarostami montre des traits communs entre les deux cinéastes pourtant aussi géographiquement éloignés que l’Iran et l’Espagne.

Tous deux filment des hommes authentiques, s’intéressent aux insectes et aux mystères souterrains, aux orages et aux renaissances.

C’est surtout les plans et lignes de fuite qui ont retenu mon attention chez Kiarostami.

Les routes ou chemins qui franchissent les collines sont comme l’écriture de l’histoire sur ces paysages et on voit l’intérêt porté aux lignes :

lignes d’eau laissées par la pluie sur un pare-brise, traces de pas sur la neige, fûts droits des arbres avec leurs ombres latérales parallèles.

On comprend le sens de la formule : Kiarostami est un cinéaste du plan plus que du récit, et au cinéma il dit préférer la photographie, art solitaire et plus confidentiel.

Les lignes sont des signes, et dans leur régularité on retrouve ce que disait Butor des murs de pierres alignées photographiés par Boubat : une page d’écriture d’écolier.

On pense alors à l’ouvrage de Stanislas Dehaene, les neurones de la lecture chez Odile Jacob.



Initialement nos neurones étaient prévu pour s’orienter dans la nature, ils repèrent pour lire des signes simples à mémoriser.

Abbas Kiarostami écrit pour l’œil des pages-paysages, des haïkus visuels comme ceux qu’il couche avec des mots sur le papier.

TEN

Avec Abbas Kiarostami, on est à la fois désarçonné et séduit.

Ten, en 10 épisodes de 10 minutes, le tout en voiture, raconte une histoire familiale et dresse un portrait de la femme iranienne.

Tout se passe en voiture avec la même conductrice : le premier épisode se concentre sur Amin, jeune garçon qui refuse d’écouter sa mère, récemment divorcée : il veut revenir chez son père.



A la fin de l’épisode, on voit enfin la conductrice, que l’enfant refusait d’écouter, et on la suivra dans les 9 autres courts métrages.

Ces voyages successifs permettent de rencontrer d’autres personnages féminins qui, chacun à leur manière, expriment les souhaits et les douleurs de la femme iranienne.

On les écoute avec la bienveillance dont fait preuve la conductrice, dont on saura à la fin comment s’est résolu son problème familial avec Amin.

TEN De Abbas Kiarostami, avec Mania Akbari, Amin Maher
Iran en 2002.



Observation et écoute semblent être les maîtres mots de Kiarostami.

Sans tomber dans la froideur d’un documentaire, il montre les personnages avec tant de naturel qu’on se demande s’ils n’ont pas été filmés à leur insu.

Les conversations sonnent authentiques, et sans commentaires, on entre avec la voiture, sans doute le seul espace de vrai discours, dans le monde de femmes qui ont bien du mal à se retrouver dans l’univers iranien.

une fiche (trop?) complète chez filmdeculte.

Existe en coffret avec 2 DVD

Dans le 2e DVD, sorte de leçon de cinéma, Abbas Kiarostami explique que l’utilisation de la camera numérique lui convient bien puisqu’elle libère réalisateur et acteurs des lourdeurs de la technique et du recours au capitalisme. Son matériau, c’est l’être humain, dans des scénarios ouverts et stimulants et non fixés, car écrits à l’avance.

Il préfère avoir recours à des non acteurs qui jouent leur propre rôle, et parlent comme dans leur milieu social. Le lieu clos de la voiture avec des protagonistes placés l’un à côté de l’autre, leur donne une sécurité propice à l’échange : chacun exprime son monde personnel, sans se sentir sous le regard d’autrui.

A ce point de vue, la première séquence où l’enfant reproche à sa mère son divorce, et refuse d’écouter ses explications, est un moment authentique, intense et douloureux.

Le goût de la cerise,

On aurait mieux fait de traduire par le goût de la mûre, se dit-on le film terminé.

Comme d’habitude, Abbas Kiarostami inscrit une automobile dans un paysage en lacets, terre sèche, désolée, et pourtant belle. Le conducteur s’arrête dans différents chantiers de terrassement, dans des carrières où il noue conversation successivement avec des travailleurs pauvres pour leur promettre un salaire élevé pour un travail qu’il ne précise pas. On saura le fin mot de l’histoire dans un échange riche d’humanité avec un vieil employé du musée d’histoire naturelle.

Le début lent et équivoque répond pourtant à une tension interne : qu’entend obtenir le conducteur ? On partage les hésitations de ses interlocuteurs.

Le vieil employé domine le film, délivrant un message sensuel et concret, fait de chaleur humaine dont le séminariste, l’homme de foi, était bien incapable.



le vieil employé.

En accord avec le discours de l‘employé, le paysage devient plus agréable : des enfants, un coucher de soleil, une nuit étoilée, et la beauté d’un ciel d’orage fournissent une réponse optimiste - que le réalisateur, soucieux d’image, de métaphore et de poésie, s’est bien gardé d’exprimer par des mots.



Un très beau film, où Kiarostami manifeste, une fois de plus, ses talents de poète- photographe et une sagesse païenne très chaleureuse.

Lemonde 2 annonce que Kiarostami est chargé d elamise en scène de "Cosi fan tutte" de Mozart. représentation le 4 juillet à Aix en Provence.

il tourne actuellement dans les calanques de Cassis, pour faire les décors, marins, de l'opéra.

Dans l'exposition Kiarostami à Pompidou, il avait présenté des vues de la mer, en correspondance avec le cineaste espagnol Erice.

libé s'en prend à kiarostami à Venise.

Citation :

Etre un artiste contemporain est en passe de devenir le grave problème de Kiarostami.

A l’époque de Et la vie continue, il suffisait à l’Iranien de filmer une voiture dans une montagne pour tenir tête aux meilleurs artistes land art. La critique lui ayant répété (à raison) qu’il était un maître, Abbas signe depuis des plans qui visent l’art.

Ten mis à part, qui était tout en radicalité, il a passé ces six dernières années à s’éparpiller entre vidéos loupées, photos plates, expos prétextes et mise en scène de pièces du répertoire traditionnel iranien.

je ne renvoie pas à l'article puisque je cite la totalité du passage.

Un film qui s'interesse aux spectatrices !

Shirin ou les visages des spectatrices filmées !

le film vu, une sorte de Romeo et juliette perse,

Spoiler:

Ce que nous y montre Abbas Kiarostami, ce sont les yeux des 108 femmes qui assistent à cette projection, 108 femmes voilées, des Iraniennes. Le film que regardent ces femmes s'appelle Shirin. Celui qui montre l'impact de Shirin sur le visage de ces spectatrices se nomme Shirin lui aussi. C'est toute l'astuce de Kiarostami, qui a tourné les deux, le visible et l'invisible.

dit l'article du Monde

Citation :

double pied de nez à la République islamique :
- d'une part, la femme devient ici le personnage majeur d'un film, à la fois sur l'écran et dans la salle, où elle est largement majoritaire ;
- d'autre part, Kiarostami ignore délibérément le règlement qui impose en Iran des espaces séparés aux hommes et aux femmes dans les lieux publics. Ici, des mâles sont aperçus en arrière-plan, dans la pénombre.

conclusion :

Citation :

La beauté de Shirin sourd aussi de la communion, captée par Abbas Kiarostami, qui, le temps d'une messe en salle obscure, fait partager à des hommes et des femmes attention, sourires, perplexité, froncements de sourcils, crispations de mains, émois, effrois, tremblements, compassion, larmes.

La véritable histoire du Shirin de kiarostami est en fait un habile montage :

dans un premier temps, le réalisateur a demandé à 108 femmes individuellement de regarder un film, en pensant intensément à des épisodes personnels ; et il les a filmées.

Ensuite il a monté ces différentes attitudes sur une bande sonore du film Shirin relatant le récit persan, comme si ces femmes réagissaient au film projeté.

L'ideal pour Kiarostami serait de projeter son film sans la bande sonore, pour filmer les émotions humaines sans récit prétexte.

l'affiche de Shirin

Copie conforme, film italien, iranien, français d'Abbas Kiarostami, avec Juliette Binoche et William Shimell. En compétition à Cannes. En salles le 19 mai.

Copie conforme, est le premier film qu'Abbas kiarostami a tourné hors d'Iran.

Dans un village de Toscane, un homme et une femme y jouent la comédie de l'amour sur un scénario qui flirte entre vérité et mensonge. L'histoire de ce couple qui essaie de se reconstruire est celle d'une femme, de son désir contrarié, alors qu'elle est sur une terre étrangère.

Mais il s'agit surtout de la concrétisation d'une étroite complicité entre Kiarostami et Juliette Binoche, qui se connaissent depuis douze ans.

source: le Monde.

Copie conforme

Citation :

N'ayant vécu qu'en Iran, je n'ai pas de point de comparaison. Je ne sais pas si c'est différent dans un pays plus libre.
Mais ce dont je suis persuadé, c'est que les vraies dictatures, ce sont les dictatures intimes. Les oppressions personnelles.
Bien sûr, on peut souffrir d'une précarité économique, d'absence de liberté, mais les vraies souffrances sont ailleurs.

Abbas Kiarostami.

Citation :

les vraies dictatures, ce sont les dictatures intimes. Les oppressions personnelles.

disait Abbas Kiarostami, Il ne se rejouira pourtant pas de l'interdiction de son dernier film en Iran !

Copie conforme, ne sera pas diffusé dans les salles iraniennes. Le vice-ministre iranien de la Culture, Javad Shamaqdari, a expliqué cette interdiction par "l'habillement" de l'actrice principale. "Le film n'est pas mauvais (...) Mais en raison de l'habillement de Juliette Binoche, il ne pourra pas être présenté en salles",

'il pourrait toutefois être montré "dans certaines universités et certains cercles privés".

Close-up

A travers l'arrestation d'un "escroc" qui se fait passer pour le réalisateur
Mohsen Makhmalbaf, Abbas Kiarostami, fidèle à son habitude de fuir le spectaculaire, présente un film lent et convaincant sur l'amour du cinema, la place sociale du réalisateur, ses rapports avec la société et le pouvoir.

Peu à peu le présumé "escroc" devient un personnage sympathique et attendrissant, regard partagé par le réalisateur puisque celui-ci'il le récompense par un dénouement qui fait le consensus, et répond aux attentes du spectateur.

Un moment désorienté par le début du film, le spectateur se retrouve vite dans les sequences présent /passé, pour s'interesser à l'aspect humain et artistique de cette oeuvre, originale et attachante.

L'analyse complète du ciné-club de Caen

on a parlé des Makhmalbaf, et cet hommage d'un réalisateur à un autre est d'une grande élégance.

la bande-annonce sous titrée en anglais. Le film date de 1990.